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Les conseils des entreprises championnes de la GenAI pour passer à l’échelle

Le cabinet de conseils Publicis Sapiente a observé les bonnes pratiques d’entreprises françaises qui ont réussi à tirer de vrais ROIs de leurs projets d’IA générative. Elles ne seraient que 15 %. Leurs enseignements devraient donc en inspirer beaucoup d’autres.

Une étude de Publicis Sapiente a interrogé plus de 200 décideurs français sur l’intelligence artificielle générative en entreprise. Il en ressort un paradoxe intéressant. D’un côté, près d’une entreprise sur deux dit avoir une stratégie IA, mais seulement 15 % ont réussi à déployer des projets à grande échelle.

Un écart entre espoirs et réalisations

Pourquoi cet écart ? Parce que la technologie n’est qu’une partie de l’équation, rappelle le cabinet de conseils. L’enjeu est aussi organisationnel et humain.

L’étude souligne d’ailleurs une forme de malentendus très humains entre fonctions techniques (IT, R&D, dev) et fonctions métiers. Ces deux « groupes » ne regarderaient pas du tout l’IA avec les mêmes yeux.

À la question « l’IA est-elle en place dans l’entreprise ? », 21 % des métiers ont répondu oui, contre moitié moins pour les équipes techniques (10 %).

L’écart vient de la compréhension de « en place ». Pour une équipe marketing, l’expression peut vouloir dire « utiliser ChatGPT pour rédiger des postes ». Pour des équipes IT, « en place » veut plutôt dire construire une solution sécurisée, conforme au RGPD, et déployée pour des milliers de personnes.

Ce décalage de perception n’est pas anecdotique. Il est même un des éléments qui peut faire échouer un passage à l’échelle, avertit le cabinet de conseils.

Les freins : le triptyque « utilité, compétences, risque »

Pour déterminer les différents freins à l’IA générative, Publicis Sapiente a observé deux groupes d’entreprises : celles qui ont « déployé », et celles qui attendent.

Du côté des attentistes (les 52 % qui n’ont pas encore investi), trois raisons principales ressortent. La première, citée par 62 %, est le manque d’utilité perçue. La deuxième, quasiment au même niveau (61 %), est le manque de compétences en interne. Et la troisième (à 58 %) concerne les craintes sur la sécurité et la confidentialité des données.

Curieusement, ces freins ne sont pas levés du côté des entreprises qui se sont lancées. Au contraire même.

L’inquiétude sur la sécurité et la confidentialité monte à 72 %. En creux, on peut y voir une prise de conscience, bien concrète lors du déploiement, de problématiques théoriques au moment de la phase de réflexion (anonymisation des données, localisation des modèles, etc.). Idem pour les coûts. La préoccupation passe de 44 % avant le projet à 61 % pendant.

En revanche, le doute sur l’utilité tombe de 62 % à 32 %. La mise en pratique semble donc révéler le potentiel.

Des ROIs, mais pas forcément des gains visibles

Pour synthétiser cette analyse, Publicis Sapiente s’inspire de la Hype Cycle de Gartner

Après une phase d’enthousiasme, les entreprises françaises seraient entrées dans la « vallée du désespoir » sur l’IA générative.

D’autant plus qu’il existerait un autre paradoxe : sur le ROI. C’est d’ailleurs certainement l’enseignement le plus important de l’analyse. Les bénéfices peuvent se scinder en deux catégories : les gains de productivité (avec une approche d’optimisation) et les gains de revenus (avec une approche plus transformationnelle). Les deux ne vont pas de forcément de pair.

Du côté de la productivité, les attentes sont très hautes avec un gain espéré de 7,6 %. Et l’IA générative a plutôt tenu promesse avec un gain réel de 5,4 %.

Mais la réduction des coûts qui en découle ne serait que de 3,3 %. Ce qui semble poser la question de l’utilisation du temps libéré.

Du côté de la transformation, les entreprises espéraient une croissance de 3,3 % de leur chiffre d’affaires grâce à l’IA. Dans la réalité, l’impact mesuré est de « seulement » 1,2 %, soit presque trois fois moins que prévu. Ce qui semble montrer que les processus n’ont pas été repensés pour l’IA, mais que l’IA a simplement été ajoutée de-ci de-là.

Que font les champions de l’IA générative

Reste que 15 % des entreprises seraient sorties, par le haut, de cette vallée du désespoir.

Publicis Sapiente identifie trois facteurs de succès.

Une stratégie claire

Le premier facteur est une stratégie claire avec une feuille de route co-construite de manière tripartite : direction, équipes techniques et métiers. D’où l’importance d’une définition commune de « en place ».

Seuls 10 % des entreprises auraient une telle stratégie. Mais la quasi-totalité de ces 10 % réussirait. Là encore, en creux, ce chiffre semble montrer que 8 entreprises sur 10 (N.B. 10 % disent « ne pas savoir ») avanceraient « à tâtons » et « au jour le jour » (sic) en fonction des demandes ou des capacités. Autrement dit, en réaction et au doigt mouillé.

Collaboration entre IT et métier

Le deuxième pilier est une collaboration « équilibrée » entre IT et métier.

Dans les entreprises qui ont déployé à l’échelle, cette collaboration est jugée équilibrée dans 46 % des cas (contre 31 % pour celles qui sont en cours de projet).

« Pour réussir sa transformation IA, il est nécessaire de dépasser les difficultés de collaboration entre les fonctions techniques et business », insiste le cabinet de conseils.

Là encore, aplanir les incompréhensions est critique.

Compétences et externalisation

Le troisième conseil est de pallier le manque de compétences internes, ou la montée en compétence trop faible, avec l’externalisation. Mais pas n’importe comment.

Cette externalisation doit être maîtrisée. Là encore, les prestataires sont le plus souvent pilotés conjointement par un binôme tech et business.

« C’est la capacité à transformer des organisations, à faire collaborer les équipes et à repenser les processus qui déterminera le succès de l’IA en entreprise. »
Publicis SapienteÉtude

Enfin, le quatrième pilier est de former les employés à l’IA. « 70 % des entreprises actives dans l’IA déclarent avoir mis en place des formations dédiées pour les employés ».

Le cabinet de conseils donne d’autres conseils, moins centraux, mais qui restent importants. Comme de nommer des employés pour superviser les outils d’IA, et plus largement créer de nouveaux postes et de nouveaux rôles consacrés à l’IA, au fur et à mesure, ou déterminer une gouvernance claire pour éviter une « bataille d’influence » néfaste entre… tech et métiers.

« L’innovation technologique ne suffit pas », insiste Publicis Sapiente. « C’est la capacité à transformer des organisations, à faire collaborer les équipes et à repenser les processus qui déterminera le succès de l’IA en entreprise. »

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