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VCE va étendre ses composants pour rester en tête des machines convergées

Alors que sa situation peut paraître instable après le rachat d’EMC par Dell, VCE entend rester numéro 1 des infrastructures convergées en conservant une extrême rigueur dans la standardisation de ses composants et en les enrichissant toutefois bientôt de KVM, Hyper-V, ViPR ou encore de GPU.

Selon IDC, VCE est le numéro 1 (26,3% de parts) du marché des infrastructures convergées. Un concept dont il est l’inventeur et qui consiste à vendre clés en main des machines dans lesquelles serveurs, stockage, réseau et virtualisation sont assemblés en usine. On dit pourtant l’avenir de VCE menacé depuis qu’EMC, son propriétaire à 90%, s’est fait racheté en octobre dernier par Dell, le no 2 des serveurs toutes catégories confondues. La crainte ? Que Dell veuille exister directement sur le marché des infrastructures convergées en faisant de l’ombre à VCE, voire en l’avalant. En effet, les ventes d’infrastructures convergées progressent annuellement de 44,8%, tandis que celles du marché des serveurs n’augmentent plus que de 7% par an.

Mais ce n’est pas tout. Cisco, le propriétaire des 10% restants de VCE, s’est associé depuis cinq ans avec NetApp, le concurrent d’EMC, pour proposer FlexPod, une infrastructure convergée concurrente. Et leurs ventes talonnent aujourd’hui (23,8% du marché) celles du Vbloc de VCE. Pendant ce temps, des acteurs comme Nutanix et Simplivity tirent le marché des infrastructures hyperconvergées, des infrastructures convergées dans lesquelles il n’y a pas de baies de stockage et qui sont donc plus abordables. Les ventes des machines hyperconvergées progressent, elles, de 116% par an. Les ventes des serveurs, des infrastructures convergées et des infrastructures hyperconvergées pesaient respectivement, au second trimestre 2015, 13,6 milliards de dollars (menées par HP à 25,2% et Dell à 17,4%), 1,55 milliard de dollars et environ 200 millions de dollars. 

Pour que le tour d’horizon soit complet, citons également le marché des plateformes intégrées, à savoir des infrastructures convergées conçues pour une application donnée (base de données, application Java, etc.). Les ventes trimestrielles de ces machines pèsent 755 millions de dollars (Oracle a 51,9% de parts, IBM 5,6%, Hitachi et HPE obtiennent chacun environ 3,1%). Mais elles déclinent de 2,5% par an ; ce qui pourrait inciter HP, typiquement, à plutôt redoubler d’efforts face à VCE en proposant des solutions basées sur ses serveurs x86 et ses baies 3PAR. Même IBM, qui n’a pourtant que des machines propriétaires Power et mainframe, semble désormais vouloir jouer dans la cour des fournisseurs des infrastructures convergées.

Pour conjurer le sort, VCE prépare en coulisse des mises à jour qui vont mener ses machines au-delà des modèles de conception jusqu’ici établis. Cela suffira-t-il à repousser les assauts de la concurrence ? Philippe Charpentier, architecte Cloud de la marque en est persuadé. Rencontre.

 

LeMagIT : Quel impact le rachat d’EMC par Dell a-t-il eu sur votre activité ? 

Philippe Charpentier : Sur le business, ce rachat n’a eu aucun impact ! D’abord parce qu’il est trop tôt pour que cela en ait un : le rachat, qui a eu lieu en octobre, doit encore être validé par différentes commissions, si bien qu’on ne saura même pas avant sept à douze mois s’il se concrétise. Cependant, je peux dire qu’en France les retours sont très positifs. Nos clients se souviennent en effet qu’EMC et Dell avaient des offres très intéressantes à l’époque où ils travaillaient ensemble (de 2001 à 2011, ndr) : l’un pour fabriquer les serveurs, l’autre pour concevoir les baies de stockage. Leur union suscite un engouement de la part des entreprises françaises et elles considèrent que nous faisons partie de cette dynamique. 

Cela dit, il faut tout de même rappeler que même si son ADN est très présent chez nous, EMC n’est propriétaire de VCE qu’à hauteur d’un peu moins de 90%, le reste appartenant toujours à Cisco ; ce qui fait de nous une structure commerciale indépendante. 

LeMagIT : Tout de même, vous n’êtes plus seul sur les infrastructures convergées. Entre les constructeurs de serveurs classiques qui arrivent et les machines hyperconvergées qui progressent, ne vous sentez-vous pas pris entre quatre feux ? 

Philippe Charpentier : Non. La concurrence n’est pas nouvelle. Lorsque nous avons démarré, nous devions déjà faire face à des solutions clés en mains, comme l’ExaData d’Oracle. Nous nous sommes imposés parce que nous avons été très rigoureux sur le respect de notre modèle industriel, allant jusqu’à refuser de collaborer avec des clients qui voulaient des configurations non standard. Nos machines sont toutes montées en usine avec les mêmes composants que nous avons validés, alors que nos concurrents continuent de customiser leurs solutions en les installant chez le client. Nous sommes les seuls à pouvoir nous engager sur une maintenance fiable. Nous n’avons que 5 ans, mais nous réalisons déjà un chiffre d’affaires de plus de 2 milliards de dollars par an et sommes durablement le numéro 1 du marché des infrastructures convergées.

Il faut aussi comparer ce qui est comparable. Notre offre historique, celle qui représente 99% de nos ventes, c’est le Vblock, une infrastructure convergée composée de serveurs Cisco, d’un réseau Cisco, d’une baie de stockage EMC et d’une virtualisation VMware. L’infrastructure convergée va rester l’offre packagée la plus demandée car elle offre de la résilience aux applications : il est possible, grâce aux fonctions de la baie de stockage, d’installer deux Vblocks sur des sites distants et de synchroniser leurs contenus. C’est une offre pour les grands comptes. Les nouveaux entrants arrivent avec des infrastructures hyperconvergées, c’est-à-dire dans lesquelles la baie de stockage est remplacée par du Software Defined Storage (SDS). C’est une offre pour le mid-market qui n’a pas la fonction de résilience et, pour cela, les infrastructures hyperconvergées ne représenteront jamais que 1% des ventes d’infrastructures packagées. A ces offres, nous avons répondu avec notre modèle VSPEX Blue, une version standardisée par nos soins des infrastructures VSPEX ultra-customisables d’EMC, sur la base de serveurs Quanta, de la virtualisation VMware et du SDS VMware Virtual SAN. Est-ce que les ventes sont bonnes ? Je ne saurais vous le dire : nous avons lancé ce modèle il y a à peine six mois. Mais nous sommes convaincus que nos efforts d’industrialisation de la solution feront une nouvelle fois la différence. 

Ce que je peux vous dire, en revanche, c’est que nous sommes les premiers - et jusqu’ici les seuls - à proposer une troisième famille d’infrastructures intégrées, l’hyperconvergée hyperscale, au travers des nos modèles VxRack, également lancés il y a six mois. Dans ceux-ci, nous remplaçons le SDS de VMware par ScaleIO d’EMC. Alors qu’une infrastructure hyperconvergée classique ne peut contenir que quelques dizaines de nœuds, nos VxRack grimpent à plusieurs milliers ! Nous avons dores et déjà des commandes de la part d’opérateurs qui, typiquement, veulent s’en servir pour héberger de nouvelles offres de services. Avec VxRack, ils testent leur service sur une configuration minimale et la font croître au fur et à mesure qu’ils ont des clients.

LeMagIT : Comment votre stratégie va-t-elle évoluer ?

Philippe Charpentier : Nous allons standardiser de nouvelles briques matérielles et de nouvelles couches logicielles sur nos machines. Dès aujourd’hui, il devient possible de mettre tous les modèles de baie de stockage EMC dans les Vblocks. D’ici à six mois, nous proposerons des serveurs Cisco en rack intégrant des cartes particulières, comme par exemple les GPU de nVidia. Il s’agit de pouvoir proposer des infrastructures convergées encore plus adaptées au VDI, entre autres. Ces serveurs Cisco seront appelés des Technologies Extensions. 

Sur le plan logiciel, nous n’installons aujourd’hui que la virtualisation de VMware. Dans les semaines à venir, nous pensons proposer des modèles équipés des hyperviseurs KVM et Hyper-V. Il y a quelques jours, nous avons standardisé ACI, la solution Software Defined Network (SDN) de Cisco, alors que nous ne proposions jusqu’alors que NSX de VMware. Le SDN n’est présent que sur notre modèle VxBlock, à savoir un Vblock qui n’intègre pas de routage réseau matériel.

Nous réfléchissons également à l’opportunité de standardiser ViPR Controller d’EMC, pour cataloguer toutes les ressources disponibles dans nos infrastructures - stockage comme puissance de calcul - et les présenter à des portails de plus haut niveau sur lesquels les métiers choisissent typiquement des ressources pour leurs besoins.

Enfin, nous allons lancer au début de l’année prochaine Vscale, un commutateur Cisco doublé du logiciel de supervision VCE Vision 3.0, qui permet de contrôler plusieurs Vblock au travers d’une console unique, alors que chacun fonctionne de manière indépendante aujourd’hui. 

LeMagIT : OpenStack fera-t-il partie des briques standardisées ?  

Philippe Charpentier : Non. Nous avons effectivement étudié cette possibilité, mais OpenStack a trop de modules, ce qui nous empêche d’en faire une installation standardisée et ce qui casserait notre modèle industriel. Nous fournirons néanmoins à nos clients toutes les informations pour qu’ils puissent installer eux-mêmes, le plus facilement possible, OpenStack sur nos machines.

LeMagIT : Comptez-vous proposer des VxRack basés sur le SDS Ceph, ne serait-ce que pour contrer les baies de stockage SDS à bas coût qui promettent de déferler dans les semaines qui viennent ?

Philippe Charpentier : Non. Nous ne vendons pas de baies de stockage SDS. Quand nous vendons des VxRack, ce sont des machines équipées du SDS ScaleIO, certes, mais qui servent aussi à exécuter des machines virtuelles. Vous voudriez peut-être savoir si nous mettrons du Ceph avec l’hyperviseur KVM, comme nous mettons du ScaleIO avec VMware ? La réponse est un grand non : nous n’avons, à date, aucun plan pour supporter Ceph sur nos machines. Nous sommes très prudents avec les solutions Open source : les projets sont si mouvants que les fabricants de serveurs qui ont voulu à un moment donné standardiser une couche logicielle ont pratiquement tous fini par faire machine arrière pour en standardiser un autre qui avait entretemps évolué plus rapidement. Encore une fois, notre force réside dans des choix technologiques standardisés et durables.

 

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