Marcel fait entrer Publicis dans l’ère des plateformes

Publicis a enfin dévoilé son intelligence artificielle Marcel. Le géant français de la pub s'est allié à Microsoft pour mettre au point cet assistant numérique appelé à connecter 80 000 employés, mais aussi les agences et clients du numéro 3 mondial de la publicité.

C’est dans une ambiance digne d’une conférence Apple que Publicis vient de présenter à la presse et à ses plus gros clients, Marcel. Lancé en préambule de Viva Technology 2018, l’application Marcel, du nom de Marcel Bleustein-Blanchet, fondateur du groupe Publicis est difficile à cerner, à la fois assistant vocal, réseau social d’entreprise et outil de collaboration de type Slack. Lors de ce lancement officiel, Arthur Sadoun, Président du Directoire de Publicis Groupe expliquait : « Nous avons voulu créer une plateforme qui devait connecter 80 000 collaborateurs afin de leur permettre de travailler différemment, pour réinventer la façon de travailler. »

Le projet avait été défloré en janvier 2018 lorsque Satya Nadella, CEO de Microsoft, et Arthur Sadoun signait un partenariat afin d’appuyer ce projet sur les technologies Microsoft. A nouveau présent aux côtés d’Arthur Sadoun, Satya Nadella déclarait lors de la conférence de lancement à Paris : « Rapprocher les créatifs de la technologie va réellement transformer l’expérience de vos clients […] Je suis persuadé que l’IA peut augmenter les capacités et la créativité humaine. Publicis dispose déjà d’énormes capacités de création et Marcel devrait encore accélérer cela. »

Marcel, mobile avant tout

Onze mois après le lancement du projet, Marcel est en version alpha. La plateforme a été développée par les équipes de Publicis, notamment celles de Sapient, la filiale consulting digital du groupe, dans le cadre de ce partenariat étroit avec Microsoft. Sans surprise, Marcel est motorisé par de multiples technologies Microsoft, à commencer par Microsoft Azure et Office 365 pour la plateforme elle-même et les technologies d’IA et de Knowledge Graph de Microsoft.

Plusieurs démonstrations « live » ont été réalisées lors de la conférence de lancement, avec tous les aléas du direct que cela suppose. Marcel est encore un peu dur d’oreille et il faut souvent s’y reprendre à deux fois pour capter son attention. Néanmoins on en sait maintenant un peu plus sur les capacités réelles de cette intelligence artificielle. Marcel est un assistant numérique, une application mobile essentiellement commandée à la voix. A terme, les 80 000 collaborateurs du groupe Publicis auront leur profil sur cette plateforme qui n’existe pour l’instant que sous la forme d’applications mobiles pour Android et iOS. Une version Desktop figure à la roadmap, ainsi que d’autres types d’interfaces si le besoin s’en fait sentir.

Une IA qui se veut aussi un outil de transformation pour le groupe

« L'IA va apprendre du comportement des utilisateurs, apprendre de ce qu'ils partagent le plus, à quoi ils s'intéressent le plus, quels groupes d'utilisateurs se soucient de quel contenu, quelles sont les tendances du moment, etc. »
Dawn Winchester, EVP Chief Digital Officer de Publicis North America

Faisant notamment référence à l’impact des GAFA sur le marché de la pub, le président de Publicis a ajouté : « Notre industrie a été soumise à une forte pression et l’est encore chaque jour. Le monde du marketing a été disrupté et nous devions changer de modèle. Il faut faire face à la situation, on ne peut plus se permettre de continuer à jouer le même jeu. Le modèle de l’entreprise holding est gelé : tout a changé autour de nous : les clients, les médias, nos concurrents. Pouvions-nous nous contenter d’améliorations incrémentales ? Notre position, c’est qu’il faut casser cette industrie pour la reconstruire. » Si,  pour Arthur Sadoun, Marcel vise à casser les barrières entre la donnée, les créatifs et les technologies, de facto, Marcel doit avant tout casser les silos entre applications. Dawn Winchester, EVP Chief Digital Officer de Publicis North America a ainsi précisé : « Aujourd'hui, nous avons de multiples systèmes distribués, avec les données clients, les données relatives aux collaborateurs, etc. Nous travaillons énormément sur notre backend afin de connecter ces systèmes entres-eux et ce que nous présentons aujourd'hui s'appuie sur ce backend. Demain, nous aurons la combinaison de deux choses. Nous allons d'une part regrouper nos données afin de permettre à l'IA de mieux les exploiter, mais, plus important, l'IA va apprendre du comportement des utilisateurs, apprendre de ce qu'ils partagent le plus, à quoi ils s'intéressent le plus, quels groupes d'utilisateurs se soucie de quel contenu, quelles sont les tendances du moment, etc. » Cette analyse comportementale appliquée aux utilisateurs va aussi orienter Marcel dans ses recommandations, c'est l'IA qui va assurer la curation des contenus présenté aux utilisateurs et les premiers cas d'usage de Marcel présentés le 24 mai étaient résolument utiles.

Les premier cas d'usage pragmatiques de l'IA

Ainsi, le moteur d’IA va pouvoir analyser l’agenda des utilisateurs pour lui trouver quelques minutes dans la journée pour se restaurer ou surtout l’aider à préparer une réunion en lui recommandant un certain nombre de contenus à consulter, qu’il s’agisse de vidéos, de présentations Powerpoint, etc. De même, Marcel va afficher un résumé sur l’entreprise cliente, les profils des personnes qui participeront au meeting, un bref historique des relations entre le client et Publicis. C'est sans doute le cas d'usage le plus impressionnant de Marcel. Parmi les autres cas d'usage issus du M-Labs, l'incubateur dédié à Marcel, le moteur de recommandation qui va permettre de trouver un créatif pour un annonceur, avec la capacité, toujours en langage naturel de trouver le profil le plus adapté en quelques étapes. Le moteur est aussi capable d'orienter l'annonceur vers les agences en fonction du contexte du client et en fonction des réalisations de chaque agence et des tendances du moment.

Il est possible de lancer une campagne de crowdsourcing sur Marcel afin de glaner les idées des créatifs ; un annonceur peut même créer un "Open Brief" dans l'application. C'est ce qu'a fait Tony Rogers, le CMO de Wallmart USA qui a lancé un appel à idées sur Marcel via une simple vidéo façon Snapchat. Les propositions sont postées par les créatifs sur l’application qui stocke les fichiers sur Onedrive et le directeur marketing peut alors désigner l'équipe qui décrochera le budget.

Sur Marcel, les utilisateurs auront notamment accès à la base de données du festival Cannes Lions, soit 200 000 films publicitaires qui vont venir enrichir les recherches dans l’application. Ainsi, Marcel va pouvoir recommander au créatif de consulter un certain nombre de films avant un rendez-vous de "brief" avec l’annonceur. A terme, ce seront 5 milliards de fichiers qui seront accessibles à l'IA Marcel.

Marcel ne remplacera pas Maurice !

Actuellement en version alpha, Marcel est testé par une centaine d’utilisateurs. La version beta sera introduite en juin 2018 auprès de 1000 personnes sélectionnées afin que leurs profils soient représentatifs de l’ensemble du groupe sachant que l’objectif final est d’atteindre 90% des 80 000 employés de Publicis dans le monde à l’horizon 2020.

L'accès à Marcel ne sera pas facturé aux agences comme aux clients de Publicis, l'objectif étant de faire de Marcel  un atout pour Publicis vis-à-vis de ses clients. Outre les 80 000 employés de Publicis, Arthur Sadoun a précisé que Marcel sera, à terme, accessible aux 1200 agences et  4000 clients du groupe de communication sur la base du volontariat.

Interrogé sur le fait qu’un jour ce sera peut-être Marcel le futur président de Publicis, le président de Publicis a ironisé que ce n'est pas Marcel qui est en poste chez Publicis, mais Maurice, faisant référence à l'emblématique président du conseil de surveillance du groupe Maurice Levy, alors occupé à inaugurer Viva Technology 2018.

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