Tout comprendre aux changements à la direction de SAP France

Gianmaria Perancin (président de l’USF) revient dans cet entretien, accordé au MagIT, sur les péripéties des départs surprises de l’ancien DG et de l’ex-COO de SAP France, sur la longue transition qui a suivi, et sur le profil très cloud du nouveau DG. Et il confirme à nouveau l’intérêt de ses membres pour un cloud européen.

LeMagIT : En janvier au moment où Frédéric Chauviré (ex-DG de SAP France) partait, l’USF était dans l’expectative. Une « relation de confiance » s’était construite avec lui et avec son équipe et vous sembliez échaudé par un départ précipité, pas forcément expliqué par SAP, ainsi que par la lenteur de la désignation d’une nouvelle direction.

Depuis, Olivier Nollent, en provenance de Salesforce, a été nommé. L’USF est-elle « rassurée » ?

Gianmaria Perancin (président de l’Association des Utilisateurs SAP Francophones) : Tout d’abord, dans ma vie professionnelle, je ne peux faire abstraction du rapport humain. J’ai besoin d’avoir un échange avec quelqu’un avec qui je me sente en confiance. Et effectivement, nous avions entamé une très belle relation de confiance avec Frédéric Chauviré et Stéphanie Perchet [N.D.R. : COO France, partie chez Workday après 18 ans chez SAP]. Cela ne veut pas dire qu’on était toujours d’accord sur tout, il arrivait aussi que nous soyons d’accord de ne pas être d’accord. Mais surtout, nous pouvions discuter de manière directe et franche – évidemment pas de manière publique – et il y avait une écoute, et on savait s’appeler et s’apprécier.

Au sujet du départ de Frédéric Chauviré et de Stéphanie Perchet, j’ai été prévenu la veille. À l’USF, nous n’avions pas eu de signaux avant-coureurs et rien, pendant l’automne, ne pouvait nous laisser présager un tel dénouement. Évidemment, cela nous a fortement surpris.

Mais surtout, ce qui nous a gênés, c’est aussi que SAP a mis très longtemps avant d’annoncer officiellement ce changement et la nouvelle équipe.

Une décision prise par la région Europe du Nord ?

LeMagIT : Plusieurs semaines sont passées. Vous a-t-on expliqué depuis pourquoi Stéphanie et Frédéric étaient partis « dans un même wagon », si je puis dire ?

« À l’USF, nous n’avions pas eu de signaux avant-coureurs du du départ de Frédéric Chauviré et de Stéphanie Perchet. Évidemment, cela nous a fortement surpris. »
Gianmaria PerancinUSF

Gianmaria Perancin : Pas officiellement. En tout cas, il y a une chose très importante que nous avons bien comprise et intégrée à cette occasion : l’extrême puissance de la région [N.D.R. : Europe du Nord] par rapport à la Market Unit locale [N.D.R. : la France].

J’en ai discuté avec Christian Klein [N.D.R. : le PDG de SAP] en juillet, quand je suis allé à Waldorf, lors d’une rencontre informelle en tête à tête. Je lui ai dit que c’était très bien d’avoir des discussions locales avec SAP France et des relations mondiales au niveau du SUGEN. Mais maintenant, je me rends compte qu’il faut aussi absolument travailler sur une troisième dynamique, au niveau intermédiaire de la région.

LeMagIT : Pourquoi ?

Gianmaria Perancin : Parce que la région – qui est une entité à mes yeux plus commerciale que d’expertise – donne beaucoup de directives à ses pays. Or il est difficile d’appliquer la même méthode entre les « pays nordiques » et la France.

Chez SAP, la France n’est pas dans une région latine avec l’Espagne, l’Italie ou la Grèce… elle est dans une région anglo-saxonne avec la Hollande, la Belgique, la Grande-Bretagne, les pays nordiques, etc. Elle se retrouve donc dans un groupe où les usages et les comportements ne sont pas les mêmes. Par exemple sur les contrats : en Grande-Bretagne, on signe presque à n’importe quel moment de l’année ; alors qu’en France, les négociations commerciales s’achèvent très souvent en fin d’année ou du semestre. Ce fonctionnement semble peu compris par la région et peut provoquer des tensions inutiles sur les acteurs (clients comme fournisseurs). Nous devons ainsi échanger avec elle pour faire accepter cette différence et réduire les risques.

LeMagIT : Qu’est-ce qui vous a fait prendre conscience, dans le départ de la direction France, de cette prédominance de la région chez SAP ?

Gianmaria Perancin : Quand j’ai su que Frédéric Chauviré partait, dans les deux jours qui ont suivi, j’ai envoyé un mail à Christian Klein pour lui dire que je ne comprenais pas – je ne discutais évidemment pas la décision, elle appartient à SAP – mais cela nous mettait nous, l’USF, en défaut : avec qui devions-nous désormais discuter ?

« Chez SAP, la France n’est pas dans une région latine. Elle se retrouve dans un groupe où les usages et les comportements ne sont pas les mêmes. »
Gianmaria PerancinPrésident de l'USF

Il m’a mis en relation avec le président de région. Du coup, j’en ai conclu que ce n’était pas sa décision à lui. Et j’ai donc commencé à échanger avec Rohit Nagarajan [N.D.R. : président EMEA Nord chez SAP], que je n’avais jamais rencontré, puisqu’il avait pris le rôle pendant les confinements dus au COVID en 2020.

LeMagIT : Comment cela se passe-t-il avec ce nouvel interlocuteur ?

Gianmaria Perancin : En juillet, nous nous sommes rencontrés pour la première fois. C’est donc lui qui m’a annoncé la nomination d’Olivier Nollent. Il a aussi rencontré d’autres personnes de l’USF au SAPPHIRE à La Haye. Il rentre donc dans cette dynamique d’échange.

Ceci dit, autant je pense qu’il faut absolument que les clubs utilisateurs travaillent au niveau régional, autant je comprendrais qu’un président de région se dise « mais pourquoi donc des clubs utilisateurs veulent-ils venir me voir ? ».

Donc nous, de notre côté, nous devons travailler pour faire en sorte qu’à chaque fois que nous voyons Rohit Nagarajan, l’USF et les autres clubs de la région lui apportent de la valeur pour pérenniser ces échanges. Je le lui ai dit d’ailleurs, et cela l’a étonné que l’on ait cette démarche dans les deux sens.

Cela ne va pas être évident parce qu’on a une bande passante limitée. Mais travailler au niveau local, régional et au SUGEN devient désormais incontournable.

L’USF plébiscite le Président Karsenti

LeMagIT : Il y a Christian Klein. Il y a Rohit Nagarajan. Il a aussi un troisième « personnage » dans cette histoire, c’est Gérald Karsenti, le président de SAP France. Vous a-t-il parlé pendant cette phase de transition ? Et quel est son rôle véritable, d’après vous, si les décisions sur ses proches collaborateurs sont prises par la région ? J’ai cru comprendre aussi que le nouveau DG ne lui rendait pas compte.

Gianmaria Perancin : Gérald Karsenti a très bien fait la transition. Il a parfaitement assuré la représentation de SAP auprès de tout l’écosystème. Il a fait un travail exceptionnel et je tiens à le remercier chaleureusement.

Il a par exemple été présent à notre évènement (USF Force), fin juin avec Olivier Nollent, alors que celui-ci n’était pas encore « managing director ». Gérald Karsenti était à distance, mais sa présence était percutante, comme celle d’Olivier Nollent. Ils avaient très bien travaillé, tous les deux, la préparation des thèmes.

« Gérald Karsenti a très bien fait la transition. »
Gianmaria PerancinUSF

Pour répondre à votre question sur son rôle réel, j’aimerais revenir un peu en arrière. Quand il est nommé en 2018 chez SAP, Gérald Karsenti est directeur général et il prend rapidement le titre de président-directeur général. Début 2020, il garde le rôle de président et il délègue la partie DG à Frédéric Chauviré.

Quand Frédéric Chauviré est parti, Gérald Karsenti a repris ce rôle de président-directeur général… Mais en même temps, SAP nomme un DG par intérim, Ryan Poggi – basé à Londres avec Rohit Nagarajan. Et Orlando Appell prend la direction des opérations à la place de Stéphanie Perchet. Tout cela c’est en janvier.

Olivier Nollent arrive ensuite chez SAP deux à trois mois plus tard. D’abord comme responsable des grandes entreprises, puis en juillet comme successeur au poste laissé vacant par Ryan Poggi. Plus précisément, Olivier Nollent devient « managing director » – alors peut-être qu’il y a une subtilité qui m’échappe, mais la traduction en français de « managing director » que nous faisons à l’USF est bien « directeur général ».

Donc si je résume : il y a un DG (Olivier Nollent) qui reporte à Rohit Nagarajan (EMEA Nord), et un PDG, Gérald Karsenti.

LeMagIT : Cela ne fait-il pas doublon ? Y voyez-vous une volonté d’encadrer Gérald Karsenti ?

Gianmaria Perancin : Non ! C’est simplement un choix de gouvernance de SAP. Ils ont envie d’avoir un PDG et un DG. L’USF constate, mais ne juge pas.

C’est comme pour Stéphanie Perchet. Elle connaissait parfaitement le monde SAP, avec une vraie expertise et il aurait été intéressant pour nous qu’elle reste. Mais le choix de SAP et de Stéphanie Perchet a été différent. Soyons clairs, l’USF ne peut ni ne veut s’immiscer dans des décisions qui concernent uniquement SAP et ses managers.

Orlando Appell, nouveau COO

LeMagIT : Justement que vous inspire la nomination de Orlando Appell comme successeur de Stéphanie ? Avez-vous reconstruit cette confiance avec lui ?

Gianmaria Perancin : Orlando Appell n’est pas un « nouveau » pour moi. On se connaît depuis 2018. Il a été responsable des services pour la France et ensuite il est passé à la région – donc en reportant à Brian Duffy (ex-président EMEA Nord chez SAP) puis à Rohit Nagarajan. Aujourd’hui il revient de la région sur la France.

« Orlando. Je le connais : quand il ne sera pas d’accord, il me le dira franchement. »
Gianmaria PerancinUSF

Je pense qu’Orlando a vraiment cette capacité de faire tourner les opérations de SAP France de manière efficace et efficiente. Je n’ai aucun doute là-dessus. Il est très carré.

Nous avons échangé depuis sa prise de poste en tant que COO. Je l’ai trouvé à l’écoute. On se dira les choses, c’est sûr. Donc, je ne suis pas inquiet. C’est une autre personnalité que Stéphanie Perchet. Mais c’est un très gros travailleur. Et il connaît aussi très bien SAP.

LeMagIT : Donc pas de problème pour recréer une relation de confiance avec lui ? C’était quand même l’inquiétude que vous aviez au moment du changement. Vous disiez qu’une relation de confiance prend du temps à se créer, et qu’elle se détruit rapidement.

Gianmaria Perancin : Aucun problème avec Orlando. Je le connais : quand il ne sera pas d’accord, il me le dira franchement. Et je n’aurai pas à me demander ce qu’il est en train de me raconter ou ce que veut dire la petite ligne en bas qu’on ne comprend pas (sourire). Il est très direct et c’est très bien ainsi.

Je dirais même que la relation est en train de bien se mettre en place. C’est même lui qui m’a fait rencontrer un top exécutif de SAP qui réfléchit actuellement à la nouvelle configuration autour des services avec le cloud. J’ai trouvé que c’était une attention très appréciable.

Un nouveau DG très cloud arrivé de Salesforce

LeMagIT : Et Olivier Nollent ?

Gianmaria Perancin : Olivier Nollent vient du monde Salesforce. J’ai eu la chance de le rencontrer dès mai par l’intermédiaire de Gérald Karsenti, puis il est devenu DG. Et là encore, vu de l’extérieur, Gérald Karsenti l’a vraiment aidé à s’approprier le poste.

« Je n’ai pas de crainte sur le fait que SAP nomme quelqu’un de “très cloud” à sa tête. […] Je le sens très à l’écoute. »
Gianmaria PerancinUSF

Je dirais qu’on a déjà commencé à se connaître. Et son intervention à l’USF Force a été plébiscitée. Il nous a dit tout de suite « je viens d’arriver donc je ne suis pas encore au courant de tout. Je vais travailler avec vous. Mais s’il vous plaît, laissez-moi juste le temps de comprendre les points qui ne sont pas encore clairs ».

Certaines de ses réponses étaient par ailleurs très bien préparées. Et quand il ne savait pas, il l’a dit. Il a pris des notes et il nous a dit qu’il reviendrait vers nous. À nos yeux, la transparence prime pour établir une relation de confiance saine et durable.

LeMagIT : Olivier Nollent a une fibre très « cloud ». C’est un sujet sensible pour l’USF. Tous vos membres ne veulent pas forcément du SaaS. Sans aller jusqu’à dire que cela pourrait être une pomme de discorde, son profil très marqué vous a-t-il interloqué, voire inquiété ?

Gianmaria Perancin : Alors oui, il a connu Salesforce – c’est vrai que ce n’est pas un éditeur qui fait du « on premise », au contraire (rire). Et avant Salesforce, il a travaillé chez Microsoft au moment du virage cloud avec Azure. Tout cela va dans le sens de votre question.

« La vraie problématique c’est : est-ce que je suis “compliant” si je vais chez AWS, Google ou Azure ? La réponse, pour nous, à date, est : “non”. »
Gianmaria PerancinUSF

Ma réponse c’est que je n’ai pas de crainte sur le fait que SAP nomme quelqu’un de très cloud à sa tête, vis-à-vis de nos problématiques à nous, francophones, et de notre capacité à aller dans le cloud.

La problématique en France et en Suisse romande n’est pas de rester « on prem » par principe, ou parce que certains de nos membres ont leurs data centers en propres. Ça ne se résume pas en des termes aussi simplistes.

La vraie problématique c’est : où vont mes données ? Chez qui sont-elles hébergées ? Que peut me reprocher la CNIL ? Et est-ce que je suis « compliant » si je vais chez AWS, Google ou Azure ?... La réponse, pour nous, à date, est : « non ».

Donc à l’USF, la question est de savoir quels sont les autres moyens de profiter du cloud – et donc de passer en OPEX et de réduire les CAPEX – tout en restant conforme à une réglementation et ne pas subir les foudres d’un gendarme des données personnelles.

Par exemple : si vous êtes client SuccessFactors, vous pouviez être hébergé chez SAP. Donc dans un data center européen, d’un acteur européen, non soumis au CLOUD Act, au Patriot Act, au FISA, etc. On était certains de la protection de nos données. Mais SAP réfléchit à migrer les données vers un hyperscaler – voire il commence déjà à le faire. Pareil pour les solutions de type BTP (Business Transformation Platform) : des adhérents hébergés chez SAP ont reçu une lettre disant qu’ils allaient bouger chez un autre hyperscaler. Et là ce n’est plus du tout la même chose, même si le data center est en Europe !

Nous allons travailler sur ce sujet avec le cabinet juridique spécialisé en droit intellectuel qui nous accompagne depuis longtemps (ITLAW Avocats) pour comprendre comment on peut se protéger de cette clause contractuelle du changement de data centers.

L’épée de Damoclès du droit US

LeMagIT : Récemment, sur LinkedIn, un responsable commercial de Snowflake et un associé du BCG en France relativisaient cette menace. Vous-même et les membres de l’USF considérez donc, au contraire, qu’il y a un vrai danger d’espionnage industriel avec l’instrumentalisation du droit américain à des fins de guerre économique (comme l’avance le Docteur en science politique Ali Laïdi) ?

Gianmaria Perancin : Oui. De guerre économique, voire plus sur le commercial, « d’intermédiation non voulue » entre Google, AWS ou Azure entre nous et nos clients.

Mais il y a un autre aspect. Souvent, on nous dit que si l’on détient la clé de chiffrement des données, l’hyperscaler ne pourra pas donner suite à une demande d’un juge américain. Il lui dira « désolé, la clé est chez le client. Il faut que vous la lui demandiez directement ». Le client pourra refuser – nous dit-on. Sauf que… c’est alors vous qui risquez d’essuyer les foudres du gendarme américain qui peut, par exemple, vous interdire de faire des échanges en dollars.

Nous devons rencontrer les directions juridiques de SAP – au moins en France – pour poser correctement la question et comprendre comment répondre à cela.

Aujourd’hui, nous pensons qu’entre la loi [européenne], la volonté politique de la faire appliquer, et l’aspect opérationnel positif du cloud, il y a des incompatibilités. Même si la CNIL n’a pas encore sorti le fouet…

LeMagIT : Vous pensez que cela va arriver ?

Gianmaria Perancin : Je ne sais pas, mais cela peut arriver, c’est un risque à ne pas négliger.

« Les acteurs européens que nous sommes serions prêts à payer un petit peu plus cher pour avoir la garantie de centres de données “non visitables”. »
Gianmaria PerancinUSF

J’ai aussi discuté récemment avec quelqu’un chez SAP qui me disait que si un juge américain avait déjà demandé à un hyperscaler de lui fournir les données [d’un client SAP], il aurait fait écrouler le marché. Vrai ou pas ? Je ne sais pas non plus.

Mais tout cela reste une problématique importante. Et c’est la raison pour laquelle beaucoup en France sont réticents : on se trouve face à un risque de contrepartie tellement important que nous, l’USF, mais aussi le Cigref, nous disons à SAP que nous avons une épée de Damoclès au-dessus de la tête.

Ce n’est pas qu’on ne veut pas du cloud parce qu’on est le petit village gaulois qui résiste. C’est qu’il y a une interprétation de la règle qui n’est pas claire. J’ai fait part de cela à Olivier Nollent et à Rohit Nagarajan.

LeMagIT : Avec quelle réponse ?

Gianmaria Perancin : J’ai senti un début d’inflexion. Je vous donne un exemple : si vous voulez faire du Rise – ou du S/4 dans le cloud sans Rise –, vous pouvez désormais le faire en cloud privé, dans vos data centers. Oui, c’est du cloud. Mais chez vous.

Donc je sens une ouverture. Il y a une envie de comprendre nos problématiques.

LeMagIT : Il y a aujourd’hui une possibilité d’héberger HANA et S/4 sur OVH (OVH a été certifié par SAP). C’est une sorte de revirement de SAP qui disait que les clients ne le demandaient pas. Vous avez été un des artisans de ce mouvement vers OVH. Quels retours du terrain avez-vous, aujourd’hui que l’offre existe ? Vos adhérents sont-ils intéressés par ce type d’options « souveraines » ?

Gianmaria Perancin : Oui. À l’USF, nous pensons qu’il y a vraiment un fort intérêt pour des acteurs européens qui soient capables de développer leurs offres cloud. Nous pensons que c’est une offre de plus en plus intéressante.

Photo de Gianmaria Perancin Gianmaria Perancin,
Président de l’USF

Mais nous pourrions aller plus loin. Nous sommes prêts à discuter avec SAP pour que SAP lui-même s’engage dans des partenariats où ils gardent 51 % du capital d’une société et où les 49 % restants appartiendraient à un hyperscaler américain. Il paraît que dans ce cas, le droit américain pourrait ne pas s’appliquer. Nous sommes en train d’étudier les aspects légaux liés à cette idée.

En tout cas, avoir des acteurs européens – à 51 % ou à 100 % – rassurerait le marché sur le cloud. Je vais en rediscuter avec Rohit Nagarajan aussi vite que possible.

Nous croyons par ailleurs que les acteurs européens que nous sommes serions prêts à payer un petit peu plus cher – évidemment, cela doit rester dans les quelques points de pourcentage – pour avoir des données en Europe, avec un OVH ou avec un T System ou avec un acteur de type Bleu, pour avoir la garantie de centres de données « non visitables ».

Une confiance préservée entre l’USF et SAP France

LeMagIT : Et ce nouveau DG France au profil très hyperscaler, comment se positionne-t-il sur ces sujets « souverains » ?

Gianmaria Perancin : Je le sens très à l’écoute.

LeMagIT : Vous pensez également, m’avez-vous dit, qu’il peut aider SAP sur un de ces « points faibles ». Lequel ?

Gianmaria Perancin : Cela fait un certain temps que l’USF dit que SAP n’est pas dans le peloton de tête du CRM. SAP propose une solution qui doit certainement tenir la route, mais il reste en retard face à d’autres concurrents dans le cloud. On a demandé plusieurs fois à SAP quelle était sa stratégie pour combler cet écart, et nous n’avons toujours pas de réponse. J’aimerais beaucoup en discuter avec Olivier Nollent.

Peut-être pourra-t-il nous donner quelques retours d’expérience sur comment font leurs concurrents pour répondre aussi bien aux attentes des clients et gagner autant de contrats. Soit ces produits sont excellentissimes, soit c’est leur capacité à contractualiser, à individualiser les contrats ou à être à l’écoute du client. Ou les deux. Mais nous avons besoin de comprendre. Et du coup de comprendre ce qu’il faudrait que SAP fasse pour, doucement, essayer de rééquilibrer un peu le marché.

Non pas que nous voulions faire acheter à tout prix le nouveau CRM de SAP, mais c’est toujours bien d’avoir une alternative viable et fiable – surtout quand elle est européenne.

LeMagIT : Après avoir évoqué avec vous vos nouveaux interlocuteurs chez SAP, et pour conclure, vous semblez optimiste sur le fait de pouvoir recréer une relation de confiance. Simple impression ou est-ce le cas ?

Gianmaria Perancin : Avec Gérald Karsenti, c’est la continuité de notre relation : je ne suis évidemment pas inquiet. Avec Olivier Nollent, ça s’installe bien. Et Orlando Appell a prouvé lors du premier semestre que c’était possible, donc je ne suis pas inquiet non plus.

Effectivement, en janvier, je n’aurais pas été aussi optimiste. Mais aujourd’hui, je vois l’avenir avec bien plus de sérénité. À SAP, maintenant, de confirmer notre impression par leur engagement, leur implication et l’écoute qu’ils vont nous témoigner à l’avenir.

Pour approfondir sur ERP (PGI)

Close