Messageries électroniques : faites une pause, une vraie

C'est suffisamment rare pour être relevé : un ministre canadien vient d'adresser une directive à ses collaborateurs les enjoignant de se ménager de véritables coupures entre travail et vie privée.

C'est suffisamment rare pour être relevé : un ministre canadien vient d'adresser une directive à ses collaborateurs les enjoignant de se ménager de véritables coupures entre travail et vie privée.

Le message de Richard Fadden, ministre délégué à la citoyenneté et à l'immigration, est clair : "la séparation vie privée et travail est une priorité pour moi ainsi que pour cette administration ; la réussite dans chacun de ces deux domaines nous est profitable, tant à chacun individuellement qu'à tous collectivement." Et d'estimer que réussir à équilibrer son engagement professionnel et sa vie privée permet non seulement de "servir [le Canada] plus efficacement mais aussi d'attirer et de retenir les salariés qui nous aident à construire un Canada plus fort." Richard Fadden encourage donc à ses collaborateurs à éteindre leur Blackberry entre 19h et 7h mais aussi les week-ends et pendant les vacances.

Linda Duxbury, professeur à l'école de commerce Sprott de l'université de Carleton, salue, dans un entretien accordé à la chaîne de télévision canadienne CTV, le courage de Richard Fadden : pour elle, être joignable 24h/24 et 7j/7 sur son Blackberry "n'augmente pas la productivité mais le déséquilibre [personnel] et le stress". Linda Duxbury a notamment participé à la rédaction d'un rapport sur les conflits entre impératifs professionnels et personnels pour le compte de la sécurité sociale canadienne. Sur un plan strictement professionnel, l'enseignante estime que la culture de la réactivité qui accompagne l'extension des moyens de communication instantanée s'avère préjudiciable à la réflexion et à la préparation.

Mais si Linda Duxbury n'est pas seule à approuver l'initiative de Richard Fadden, d'autres voix s'élèvent pour relever les difficultés, notamment humaines, d'extension sinon même d'application de la mesure : celui que l'on appelle parfois le "crackberry", en référence à une drogue, vire, pour certains de ses utilisateurs, au "mode de vie".

L'été dernier, trois britanniques, l'informaticienne Karen Renaud, de l'université de Glasgow, la psychologue Judith Ramsay et le statisticien Mario Hair, tous deux de l'université de Paisley, ont relevé que "de nombreux utilisateurs d'ordinateurs sont victimes d'un stress lié à la pression exercée par la messagerie électronique" : 33 % des 177 salariés sondés pour cette étude relèvent leur courrier électronique rien moins qu'une fois tous les quart d'heure; 64 % d'entre eux ne tiennent pas sans consulter leur boîte de réception deux fois par heure, au minimum, avec la volonté de répondre à chaque missive le plus vite possible.

En France, on évoque parfois - quoique timidement - la notion de "stress électronique" ou "technostress". Ce dimanche Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, déclarait même dans un entretien accordé à LCP qu'il faudrait rapidement intégrer ces nouvelles "pénibilités au travail" - il évoquait notamment les centres d'appels - dans la réflexion sur la prévention des risques et sur les retraites.

 

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