Atos-Origin : les fonds règlent leur passif avec Philippe Germond

Manœuvrés au printemps par un Philippe Germond adroit, les fonds d'investissement présents au capital de la SSII prennent leur revanche en obtenant la tête du président du directoire. Ce dernier n'a pas résisté au trou d'air qui a commencé à affecter la société au troisième trimestre. Philippe Germond est remplacé par Thierry Breton.

Manoeuvrés par Philippe Germond au printemps, lors de deux assemblées générales rocambolesques, les fonds d'investissement Centaurus et Pardus prennent leur revanche en obtenant la tête du président du directoire, remplacé par Thierry Breton. Rappelons que l'assemblée générale du 22 mai avait été ajournée par Philippe Germond, en accord avec le président du conseil de surveillance de l'époque, Didier Cherpitel, suite à un incident de scéance. Pesant à l'époque 23 % du capital, et déterminés à entrer au conseil de surveillance de la SSII pour peser sur la stratégie, les fonds Centaurus et Pardus avaient alors dénoncé une "mascarade", dans la confusion la plus totale.

Juste un consensus de façade

Reconvoquée le 12 juin, l'assemblée générale avait cette fois donné l'apparence du consensus, les fonds activistes et la direction de la SSII étant parvenus entre-temps à un accord. Mais, comme nous l'écrivions à l'époque, ce consensus de façade masquait de nombreuses zones d'ombre. Car le psychodrame du 22 mai a immanquablement laissé des traces. Le directoire (composé à la sortie de l'AG de Philippe Germond, Eric Guilhou et Wilbert Kieboom) restait en effet sous la pression d'un conseil de surveillance dominé par les administrateurs choisis par les fonds. L'arrivée d'un troisième fonds, PAI Partners, qui le 20 juinannonçait détenir près de 18 % du capital de la SSII (et aujourd'hui 22 %), n'a pas suffi à stabiliser la situation du directoire. Des indices laissaient percer cette instabilité, comme la vague de départs parmi les dirigeants du groupe. En août, la société annonçait ainsi le départ d'un des trois membres de son directoire, Wilbert Kieboom, ainsi que celui du président des activités de la SSII en France, Didier Zeitoun.

"Avant tout un conflit de personnes"

Quelques jours après l'annonce des résultats du troisième trimestre de la SSII, où Atos-Origin a reconnu des difficultés et promis de nouvelles cessions d'actifs, c'est au tour de Philippe Germond de tomber. "C'est une petite surprise, même si on le savait en froid avec les principaux composants de son conseil de surveillance, commente Brice Thebaud, analyste de Aurel Leven. Après l'avertissement sur résultat du troisième trimestre - avec une marge opérationnelle de 5,5 % mais uniquement sur 95 % de l'activité -, les fonds ont trouvé le bon prétexte pour régler ce qui est avant tout un conflit de personnes. Le message est clair : contrairement à l'époque de Bernard Bourigeaud (le précédent président du directoire, ndlr), la maison ne fait plus crédit".

siteatos

Même son de cloche du côté de Dominique Raviart, analyste senior de Nelson Hall : "je pense que les fonds avaient accepté de signer la paix en juin dernier, contre l'assurance d'avoir la tête de Philippe Germond. Ce n'est pas l'invalidation de la stratégie mis en place autour du plan de transformation 3O3 notamment, mais plutôt des questions de politique interne." L'annonce a en tout cas été brutale et a visiblement pris de court les équipes internes. Ce matin, le site Web du groupe n'était par exemple pas encore à jour comme en témoigne la capture d'écran ci-dessus.

Place donc à Thierry Breton, ex Pdg de Thomson et de France Télécom. Et surtout ex ministre de l'Economie et des Finances de 2005 à 2007. Un Thierry Breton dont le bilan de capitaine d'industrie reste sujet à polémique. "Il va récolter les lauriers de la transformation engagée par son prédécesseur et les bénéfices des ventes d'actifs engagés par la société. Mais sera-t-il capable d'aller plus loin ? En faisant d'Atos-Origin un acteur européen majeur dans les paiements et un vrai groupe dans l'IT doté d'une forte base arrière offshore", commente Brice Thebaud.

Les garanties obtenues par Thierry Breton

De son côté, Dominique Raviart pronostique l'annonce d'un plan de restructuration mettant l'accent sur l'offshore, notamment pour tout ce qui touche aux activités dans l'infrastructure. Là encore, une inflexion déjà entamée par Philippe Germond qui a insisté sur ce point lors de ses communications depuis plusieurs mois déjà. L'option consistant à vendre Atos paraît - elle - plus lointaine que jamais, compte tenu des conditions de marché. La société n'est aujourd'hui valorisée qu'au niveau de son chiffre d'affaires sur un trimestre, soit environ 1,3 milliards d'euros. Difficile d'imaginer une cession dans ces conditions, même si des acquéreurs potentiels, comme T-Systems, pourraient être intéressés par le profil de la SSII franco-néerlandaise.

Un point qu'aura de toutes façons pris soin de régler Thierry Breton avant de s'engager. Dans le communiqué émis par la SSII ce matin, ce dernier se réjouissait de trouver des "actionnaires stables qui ont de grandes ambitions légitimes pour la société et son développement". L'ex ministre a également obtenu que la modification des statuts de la société de SA avec conseil de surveillance en SA avec conseil d'administration soit proposée lors de la prochaine assemblée générale. Une société dont le Pdg deviendrait Thierry Breton. "Le président du directoire dépend beaucoup de son conseil de surveillance. Alors que les décisions sont plus collégiales avec un conseil d'administration. C'est surement une des conditions qu'a négociées Thierry Breton pour prendre la tête du groupe", estime Brice Thebaud.

A la mi-journée, le titre progressait de près de 2 % à la bourse de Paris.

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