Projet Nice du Crédit Agricole : les syndicats soulignent les points de tension

Non, le climat des discussions n’est pas le meilleur possible. C'est en tout cas l’avis des représentants syndicaux impliqués dans les négociations portant sur la dissolution des cinq GIEs actuellement chargés de l’informatique du Crédit Agricole et le regroupement de leurs activités dans deux nouveaux GIEs. Et de dénoncer en premier lieu le manque d’implication des futurs responsables de l’organisation cible.

Les représentants syndicaux des actuels GIEs chargés de l’informatique du Crédit Agricole ne semblent pas partager l’avis de Pascal Hamon, responsable PMO du programme Nice de la banque. Il y a peu, celui-ci nous indiquait que «les négociations continuent dans le meilleur des climats.» Un syndicaliste évoquait alors, de son côté, un climat tendu. Depuis, trois représentants syndicaux ont souhaité détailler au MagIT les points de tension.

Une délégation patronale au «mandat très restreint»

Les négociations portent actuellement sur les modalités sociales de dissolution/absorption des 5 GIEs actuels en deux - CA Technologies (accessoirement le nouveau nom de CA, l'ex Computer Associates) pour la MOE et CA Services pour la MOA - dans l’organisation cible associée au projet Nice. Une organisation dans laquelle un millier de postes doivent disparaître, soit plus d’un tiers des effectifs actuels - environ 2 500 personnes. Mais, l’organisation même de ces négociations semble source de difficultés. Arlette Carrié-Tisne, l’une des portes-parole de l’intersyndicale de la fédération nationale du Crédit Agricole (FNCA), souligne ainsi que «la délégation patronale a reçu un mandat très restreint de la part des caisses régionales». Ce sont celles-ci dont dépendent les GIEs actuels alors que les deux GIEs de l’organisation cible dépendront de la FNCA. Las, celle-ci semble relativement peu impliquée dans le processus. Arlette Carrié-Tisne indique en trouver régulièrement l’illustration : «on a du mal à avoir un interlocuteur qui prend des engagements fermes.» Annie Cairo, déléguée CFTC au sein du GIE Exa, souligne pour sa part un «discours souvent décalé entre le national et le local. Soit c’est volontaire pour brouiller les cartes, soit ils ne se parlent pas... Et cela ne concerne pas des points de détail de la négociation !» 

Des inquiétudes sur les rémunérations et les réaffectations

Justement, pour l’heure, les négociations achoppent essentiellement sur deux points : la garantie des rémunérations et les perspectives de réaffectation des salariés. Frédéric Rozzi, de l’Unsa, au GIE AMT, déplore ainsi que la délégation patronale «cherche à négocier vers le bas, en garantissant - sur 5 ans - une structure de rémunération moins disante.» Laquelle consisterait à réduire les composantes de la partie fixe de rémunération au profit de la part variable : «chez AMT, la partie fixe augmente au moins de l’inflation chaque année; du coup, la perte risque d’être immédiate du fait d’un gel - dans les faits - de la partie fixe, pendant les 5 ans de sa ‘garantie’». En outre, les syndicats s’inquiètent de la menace de «déclassification pour ceux qui seront transférés en agences» : «la plupart des informaticiens sont à des niveaux de classification équivalents à ceux des directeurs d’agence...»

Les informaticiens susceptibles de ne pas retrouver de poste dans leur métier concentrent d’ailleurs l’essentiel des inquiétudes. Arlette Carrié-Tisne souligne ainsi que, sur certains sites dont la disparition est prévue, «les perspectives d’affectation informatique proche sont très limitées.» Et, si «l’on dit aux informaticiens concernés ‘ayez confiance, ne vous inquiétez pas’ - au moins parce l’on a besoin d’eux pour les prochaines phases du projet impliquant l’existant -, la délégation patronale prévoit une simple rupture de contrat de travail en cas de refus de poste en agence; aucun cas de licenciement économique n’est envisagé, ni même de reconversion ou de formation.»

D’importants retards à prévoir ?

Pour Arlette Carrié-Tisne, le schéma actuellement retenu par la représentation patronale «est là pour parer au plus pressé.» Frédéric Rozzi va plus loin : «on voit bien que le projet ne peut pas tenir dans le calendrier prévu; soit il faut s’attendre à une réorganisation ultérieure, soit à un recours massif à la sous-traitance.» Accessoirement, selon lui, «les chefs de projet et l’encadrement supérieur le disent aussi : on a déjà grosso modo 6 mois de retard. Mais la direction ne veut pas communiquer là dessus.» Selon Annie Cairo, «on nous a dit que le projet avait déjà pris trois/quatre mois de retard seulement 2 mois après son démarrage.» Un retard rattrapable ? Peut-être : «trois mois plus tard, nous ne sommes plus dans une logique d’évolution par rapport à la souche mais dans une logique de clonage; la stabilisation et l’évolution viendront dans un second temps.» Et si, pour Arlette Carrié-Tisne, «le projet semble plutôt bien ficelé pour les études et le développement», cela semble moins évident, aux trois syndicalistes, pour l’intégration et la production. En attendant, le processus de négociation doit reprendre le premier septembre, notamment sur des accords sur lesquels les syndicats auront du se prononcer avant le 16 juillet au soir.

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