Nutanix s’insurge contre l’apparence que VMware donne à ses résultats

Sous le coup de résultats en baisse et de piques lancées par son concurrent, le PDG Dheeraj Pandey martèle que le marché des infrastructures hyperconvergées lui est toujours favorable.

VMware et Nutanix ont décidé d’en découdre. Quelques jours à peine après que le PDG du premier a déclaré avoir gagné la guerre des infrastructures hyperconvergées grâce à sa solution logicielle vSAN HCI, le second accuse le coup de résultats en berne en rétorquant à qui veut l’entendre que VMware vend du vent.

Plus que des rapports financiers, l’objet du litige est une pique lancée par Pat Gelsinger, PDG de VMware, lors du discours d’ouverture du récent événement VMWorld que l’éditeur organisait à San Francisco : « on écrase Nut… Enfin, je veux dire que nous avons gagné sur le marché. On s’éloigne du No 2, on occupe de plus en plus d’espace. »

Deux jours plus tard, lors d’une conférence consacrée aux résultats de Nutanix, le PDG Dheeraj Pandey ne décolère pas : « nous, on ne vend pas du vent », dit-il, en référence aux contrats toujours nombreux que Nutanix signerait lors des appels d’offres lancés par les entreprises. Et de préciser sa pensée lors d’une interview accordée juste après aux journalistes américains de TechTarget :

« VMware vend beaucoup de vent. Et les clients qui achètent ces trucs s’en rendent compte. À chaque fois que ces produits – qui sont vendus en bundle – ne respectent pas leurs promesses, ils nous appellent. Ils savent que nous, nous ne fournissons pas de la quincaillerie. »

Quoi qu’il en dise, le succès de vSAN HCI est réel. Selon VMware, les ventes des licences de ce logiciel ont grimpé de 45 % d’une année sur l’autre, lors du dernier trimestre, tandis que les revenus comme les commandes ont simultanément baissé de 1 % du côté de Nutanix. Chez Dell EMC, on se félicite aussi d’une progression de 77 % des ventes d’infrastructures hyperconvergées VxRail, basées sur le SDS vSAN qui constitue le cœur de la solution vSAN HCI. Des chiffres qui suggèrent que ces configurations matérielles chez Dell EMC ont grignoté des parts de marché aux machines vendues sous la marque Nutanix.

Pour Nutanix, les bonnes ventes de vSAN HCI sont celles de vSphere

Selon IDC, VMware serait le No 1 des ventes dans la catégorie des logiciels pour infrastructures hyperconvergées et Dell serait le meilleur vendeur d’infrastructures hyperconvergées matérielles, Nutanix arrivant en seconde position dans les deux palmarès. Selon le cabinet concurrent Gartner, Nutanix serait toujours No 1 dans la catégorie logicielle, mais il y serait à présent talonné de très près par VMware.

Dheeraj Pandey rétorque que le succès commercial de vSAN HCI est une illusion d’optique. Il reposerait essentiellement sur la vente de bundles ; vSAN HCI n’est autre qu’une version de la plateforme de virtualisation de serveurs de VMware qui embarque le SDS vSAN. Selon lui, il faudrait donc lire dans les résultats, non pas la croissance des technologies vSAN dans le cœur des acheteurs d’infrastructures hyperconvergées en particulier, mais juste la confirmation que VMware vSphere reste la solution qui se vend le plus sur le marché plus global de la virtualisation des serveurs.

Et d’insister sur la propension de VMware à jeter de la poudre aux yeux, en prenant pour exemple les récentes annonces d’intégration de Kubernetes dans vSphere et d’ouverture aux communautés Open source. « C’est pire que du vent, c’est du slide PowerPoint ! Ah, c’est sûr, tout fonctionne dans les slides ! », s’emporte-t-il. Il ajoute, factuel : « nous, nous sommes réellement basés sur Linux. Nous avons profité des innovations de l’Open source, nous avons basé notre hyperviseur AHV sur Linux et nous en avons fait un produit taillé pour les entreprises. »

Les clients VMware séduits par vSAN HCI

Selon les clients rencontrés par LeMagIT lors du récent salon VMworld, englober vSAN, mais aussi le SDS NSX, dans la plateforme vSphere qu’ils connaissent déjà très bien est une raison suffisante pour les inciter à préférer vSAN HCI au détriment d’une autre plateforme d’hyperconvergence.

« Nous avons été convaincus par vSAN HCI parce que nous utilisions déjà une version de base de VMware et que toutes les nouvelles fonctions dont nous avions besoin se trouvaient dans vSphere. »
Lester ShislerIngénieur système, Harmony Healthcare IT

« Nous avons été convaincus par vSAN HCI parce que nous utilisions déjà une version de base de VMware et que toutes les nouvelles fonctions dont nous avions besoin se trouvaient dans vSphere. Qu’importe les problèmes que nous avons dû contourner avec vSAN, puisque nous aurions dû apprendre à en contourner d’autres avec une solution d’hyperconvergence concurrente, en plus de devoir apprendre à nous servir aussi de ses outils d’administration », témoigne Lester Shisler, ingénieur système chez Harmony Healthcare IT, un éditeur de logiciels médicaux basé en Inde.

Matthew Douglas, architecte système pour l’organisme de santé américain Sentara Healthcare, indique quant à lui avoir évalué Nutanix avant de finalement se décider pour vSAN HCI : « Nous avons choisi vSAN HCI parce qu’il manquait des composants à toutes les autres solutions que nous avions étudiées. vSAN HCI était mieux intégré, il avait le réseau NSX… En tant qu’entreprise, je n’ai pas les connaissances pour savoir quelle multitude d’outils séparés je devrais assembler pour obtenir une plateforme complète. Le clés en main est le différenciateur », raconte-t-il.

Une baisse des résultats à nuancer chez Nutanix

Même s’il perd des parts de marché, Nutanix affiche des résultats tout en nuances. D’un côté, son dernier chiffre d’affaires trimestriel de 300 millions de dollars était certes plus bas que celui de l’année précédente à la même époque, mais meilleur que les prévisions des analystes.

Nutanix explique que les pertes qu’il connaît à présent depuis deux trimestres sont essentiellement dues à un changement de modèle économique.

De plus, Nutanix explique que les pertes qu’il connaît à présent depuis deux trimestres sont essentiellement dues à un changement de modèle économique. Le fournisseur a en effet décidé d’arrêter à terme la commercialisation de matériels avec ses logiciels et de ne plus se consacrer qu’à la vente de souscriptions annuelles pour ses logiciels et leur support, un changement de stratégie dont il avait annoncé qu’il lui coûterait au démarrage 10 % de son CA.

Or, si l’on regarde de plus près ses derniers résultats, on remarque que les 300 millions encaissés comprennent 287 millions de dollars de souscriptions logicielles, soit une augmentation des ventes dans cette catégorie de 7 % par rapport au même trimestre de l’année précédente.

D’un autre côté, Nutanix souffre d’une explosion de ses dépenses. La concurrence avec VMware l’a manifestement obligé à muscler ses forces de vente et ses moyens marketing avec un budget 254 millions de dollars, contre 183 millions de dollars l’année passée. Cela l’a conduit à afficher des pertes de 194 millions de dollars sur le trimestre, soit plus du double des pertes dont il avait souffert un an auparavant.

Des chiffres que Dheeraj Pandey écarte d’un revers de la main : « nous nous intéressons plus à la croissance qu’au profit. La rentabilité est subjective, car beaucoup de choses ont été reportées dans notre bilan actuel. Notre préoccupation actuelle est de bien faire les choses pour nos clients lorsque nous leur vendons des souscriptions », conclut-il, en sous-entendant que ce n’est pas autant le cas chez la concurrence.

Pour approfondir sur Editeurs

Close