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Cornerstone OnDemand racheté par un fonds : quelles conséquences pour ses clients ?

Le fonds d’investissement Clearlake Capital a racheté la solution SIRH Cornerstone OnDemand. Une opération à 5 milliards $ qui peut apporter plus de liberté à l’éditeur. Mais aussi le pousser à recentrer sa feuille de route sur quelques produits.

En plein été, Cornerstone OnDemand a été rachetée par un fonds d’investissement pour un montant estimé à 5,2 milliards de dollars. Clearlake Capital a conclu un accord pour acquérir les actions de Cornerstone au prix officiel de 57,50 dollars, soit une prime de 31 % par rapport au cours du 1er juin.

L’opération, annoncée parallèlement à la publication des résultats du deuxième trimestre de Cornerstone, devrait être finalisée dans le courant de l’année. Dès lors, l’éditeur de logiciels de HCM/SIRH, de formation (LMS ou Learning Management System) et de gestion des talents (Talent Management) deviendra une entreprise non cotée.

Selon l’analyste Josh Bersin, « il ne s’agit pas d’un rachat pour démanteler une organisation et en retirer des liquidités. […] Il s’agit plus d’un rachat pour donner à une entreprise l’argent et la liberté nécessaires pour se développer d’une manière plus agressive ».

Plus de liberté pour Cornerstone

Lors du point sur les résultats de son deuxième trimestre 2021, Cornerstone a annoncé un chiffre d’affaires de 214,3 millions de dollars, en augmentation de 16,3 % par rapport à l’année précédente. Selon son rapport financier, la société emploie 2 700 personnes et compte 6 000 clients pour 75 millions d’utilisateurs dans le monde.

Mais sa croissance a probablement été bridée par les contraintes inhérentes à une société cotée en bourse, avance Josh Bersin. « Lorsqu’une société est cotée, chaque investissement fait l’objet d’un examen minutieux », souligne-t-il.

« L'intégration [de Saba] est coûteuse, et Cornerstone n'avançait pas très vite sur ce dossier. »
Holger MuellerConstellation Research

Ces contraintes n’ont pas empêché Cornerstone de faire l’acquisition d’un de ses concurrents dans le Talent Management, Saba Software, en février 2020, pour 1,4 milliard $. À la clef, Phil Saunders, le président de Saba, est devenu le PDG de la nouvelle entité. Mais l’arrivée de Clearlake Capital devrait permettre à Cornerstone d’accélérer.

Pour Holger Mueller, analyste chez Constellation Research, le fait que ce rachat intervienne après l’acquisition de Saba n’est d’ailleurs pas surprenant. « L’intégration [de Saba] est coûteuse, et Cornerstone n’avançait pas trop vite sur ce dossier », observe-t-il. « Devenir non cotée, du point de vue des investisseurs, a une certaine logique ».

Recentrage en vue sur le LMS et le Talent Management

Brian Sommer, fondateur de la société de conseil en technologie TechVentive, voit aussi dans l’acquisition de Saba le signe d’un recentrage de Cornerstone sur le LMS – où l’éditeur a fait ses débuts. « Avant Saba, Cornerstone disposait d’une gamme SIRH complète, même si la formation constituait un de ses cœurs de métier », rappelle-t-il. « Avec Saba, Cornerstone s’est clairement recentré sur ce domaine. Et certains autres ont été un peu délaissés ».

Le fait que Cornerstone redouble d’efforts dans le Talent Management et, surtout, dans les LMS peut être intéressant. Avec la pandémie, les LMS connaissent en effet un regain d’intérêt en raison – pêle-mêle – de la rotation des employés (turnover qui impose de former de nouveaux embauchés), du télétravail (besoins d’outils de formation à distance), de problématiques inédites (qui obligent à acquérir rapidement des compétences nouvelles – le upskilling et le reskilling – ou de se familiariser avec des procédures repensées).

« Tant qu’il y aura de la volatilité et de l’incertitude, l’apprentissage et la formation resteront des sujets brûlants », prédit Brian Sommer. Et donc un marché porteur pour Cornerstone.

Avantages et inconvénients pour les clients

Mais l’analyste de TechVentive voit aussi l’investissement de Clearlake Capital avant tout comme « une transaction financière. Ce n’est pas un deal technologique ».

L’opération poserait des questions, en particulier aux clients qui ont investi dans les produits autres que la gestion de talents et le LMS. Brian Sommer recommande à ces utilisateurs de surveiller de près l’évolution de la stratégie de l’éditeur et de se renseigner régulièrement sur les modifications des feuilles de route des solutions qu’ils possèdent.

« Lorsque des clients achètent et implémentent une nouvelle technologie, ils le font parce qu’ils supposent qu’il y aura une continuité dans le produit », argumente l’analyste. « Un changement de propriétaire peut modifier les orientations et, par conséquent, l’envie d’un client de conserver la gamme de produits ».

Autre point d’incertitude, un fonds n’a pas vocation à rester ad vitam aeternam au capital d’une entreprise, ce qui implique que, à plus ou moins long terme, il y aura à nouveau un changement de propriétaire et donc, peut-être, de cap et de roadmap.

Néanmoins, Holger Mueller nuance les éventuelles inquiétudes. Sortir de la bourse donnera aussi et surtout à Cornerstone « le temps de construire une offre meilleure, élargie et plus intégrée, pour la gestion des talents », argumente-t-il.

Le précédent Ultimate Software

Optimiste lui aussi, Josh Bersin compare la prise de pouvoir de Clearlake Capital sur Cornerstone à celle de Hellman & Friedman sur Ultimate Software en 2019.

L’arrivée du fonds chez le propriétaire, depuis 2018, du Français PeopleDocs avait également abouti à la fin de la cotation de cet autre éditeur RH. Hellman & Friedman avait déjà mis la main sur Kronos et entendait créer des synergies entre ses deux actifs. « Depuis, ils [N.D.R. : Ultimate et Kronos] ont connu une croissance folle », constate Josh Bersin, qui y voit un exemple de ce que pourrait donner le triptyque Cornerstone, Saba, Clearlake Capital.

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