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Étude CNCF : en 2021, l’adoption de Kubernetes a « atteint un plateau »

La courbe d’adoption de Kubernetes se rapproche de celles des conteneurs, selon une étude commandée par la CNCF, mais semble avoir « atteint un plateau » au début de l’année 2021, un événement marqué par une très légère baisse de la croissance du serverless. Les auteurs voient pourtant l’émergence des déploiements Edge propulsés par l’orchestrateur.

Après avoir contacté 19 000 développeurs entre novembre 2020 et février 2021, SlashData (ou/Data) a analysé les réponses de 3 886 d’entre eux pour le compte de la fondation open source Cloud Native Computing Foundation (CNCF).

Dans son rapport « The State of Cloud Native development » publié le 20 décembre 2021, le cabinet d’étude a comparé ses résultats avec son précédent sondage mené à la même période entre 2019 et 2020 afin d’en connaître davantage sur les développeurs cloud natives, ce que leurs organisations achètent et à quelles technologies ils s’intéressent.

 CNCF oblige, l’analyse se concentre sur Kubernetes, les conteneurs et les services cloud. Ainsi, SlashData commence son rapport en évoquant ses estimations concernant le nombre de développeurs rompus au cloud. Ces indicateurs sont extrapolés des études réalisées auprès de 30 000 (données mentionnées dans le rapport) à 40 000 développeurs par an (informations présentes sur le site de SlashData).

Sans surprise, l’adoption de l’approche cloud native serait plus forte en Amérique du Nord (47 %) et en Europe de l’Ouest (46 %) et en Océanie (Australie, Nouvelle-Zélande, Mélanésie, Micronésie et Polynésie – 56 %). Il y aurait 6,8 millions de développeurs cloud natifs au premier trimestre 2021, soit une augmentation de 300 000 en un an.

Ainsi 4,6 millions de programmeurs utiliseraient des outils d’orchestration de conteneurs et 4 millions des plateformes dites « serverless ». Cet engouement pour le cloud natif serait naturellement porté par Kubernetes : au total, 5,6 millions de développeurs emploieraient la célèbre plateforme, dont 31 % de développeurs backend (informations extrapolées de l’interrogation de 7 000 développeurs backend), une proportion en hausse de 4 % en un an. À titre de comparaison, 10,2 millions de développeurs auraient déployé des conteneurs au Q1 2021, contre 8,2 millions au premier trimestre 2020.

Les entreprises délaissent-elles le serverless ?

Pourtant, le nombre de développeurs backend aurait baissé de 3 % sur la période 2020-2021, de 44 % à 41 % de cette population globale.

Cette baisse serait consécutive à la perte d’élan du serverless. Selon SlashData, l’usage de solutions de conteneurisation et d’orchestration de conteneurs aurait baissé de 6 points de pourcentage en Amérique du Nord, de 8 points en Europe de l’Esat, de 6 points en Asie du Sud et de 4 points au Moyen-Orient et en Afrique.

Pour obtenir ces résultats, le cabinet a échantillonné les réponses 4179 de développeurs backend au premier trimestre 2020 et de 3 836 d’entre eux au Q1 2 021. En Europe de l’Ouest, l’on note une petite baisse de 1 % non significative, tandis que l’Amérique du Sud (+ 5 %) et l’Océanie (+9 %) sont les seules régions à connaître une légère croissance de l’usage. Cette baisse somme toute légère pourrait s’expliquer par la différence de répartition géographique des deux échantillons utilisés. D’autant qu’en Europe de l’Ouest (et Israël), l’utilisation des différentes technologies cloud demeure stable : seul le recours aux conteneurs est en hausse significative de 11 % en un an.

« Cette tendance à la baisse semble refléter la voix de nombreux experts qui affirment que les solutions serverless manquent de flexibilité pour faciliter une adoption à grande échelle ».
CNCF - SlashDataRapport The State of Cloud Native development

Mais SlashData relie cette variance dans l’adoption à la taille des entreprises. Les groupes comptant plus de 500 employés auraient tendance à s’appuyer sur des solutions managées plutôt que sur des architectures serverless. « Cette tendance à la baisse semble refléter la voix de nombreux experts qui affirment que les solutions serverless manquent de flexibilité pour faciliter une adoption à grande échelle. Par exemple, les entreprises sont réticentes à s’enfermer avec un fournisseur spécifique », notent les auteurs de l’étude. Il n’y a toutefois pas de véritables comparaisons entre les usages des services d’orchestrations purs et durs et les briques serverless des fournisseurs.

Pourtant, l’adoption des services cloud serverless semble stable sur douze mois. Au premier trimestre 2021, AWS Lambda (utilisé par 54 % des développeurs backend), Google Cloud Functions (41 %) et Azure Functions (35 %) sont les plus populaires comme il y a un an (53 % des sondés utilisaient Lambda, 44 % privilégiaient GCF et 34 % optaient pour AF au Q1 2020), mais il faut noter la persistance des solutions serverless déployées dans les data centers des entreprises, utilisées par 22 % des répondants.

AWS, GCP et Azure indétrônables en 2021

Rappelons que SlashData a ajouté des questions à ses sondages entre le premier trimestre et le troisième trimestre 2020 afin de mesurer l’usage de services d’orchestration. Ainsi, les services cloud Kubernetes les plus utilisés par les 873 développeurs backend ayant répondu à cette question au premier trimestre 2021 sont Amazon Elastic Kubernetes Service (37 % d’adoptants contre 22 % au troisième trimestre 2020), devant Google Kubernetes Services (36 % au Q1 2 021 contre 28 % au Q3 2020), puis Amazon Elastic Container Service (stable à 33 %) et Microsoft Azure Kubernetes Service (30 % au premier trimestre 2021 contre 21 % troisième trimestre 2020).

Derrière, les usages de Red Hat OpenShift, Digital Ocean Kubernetes, IBM Cloud Kubernetes Service sont stables par rapport à l’an passé, tandis que Red Hat Avanced Cluster et Tanzu Kubernetes Grid de VMware bénéficient d’une belle croissance d’usage.

En outre, « dans tous les secteurs, l’Edge Computing a provoqué une croissance rapide de l’adoption de Kubernetes et présente aujourd’hui les taux d’utilisation les plus élevés des conteneurs et de l’orchestrateur », notent les auteurs du rapport.

Les orchestrateurs privilégiés des « développeurs Edge », soit une portion inconnue de l’échantillon des développeurs backend, seraient GKE (67 % des réponses), EKS (57 %) et les solutions hébergées, voire développées en propre (51 %). ECS, OpenShift et AKS sont en embuscade (50 %, 47 %, et 46 % des réponses).

Cette prépondérance des solutions « self hosted » est plus marquée chez les développeurs Edge. Près de 42 % d’entre eux ont recours à des installations sur site, contre 33 % dans le reste de la population de développeurs backend.

Toutefois, AWS, Azure et GCP demeurent les clouds de prédilection des entreprises, devant IBM Cloud, Oracle, OVH ou encore Digital Ocean, même si selon le cabinet, elles ont recours à des déploiements hybrides ou multicloud. Un autre rapport mené par la FinOps Foundation entre 2020 et 2021 auprès de 804 répondants dénote un paysage des déploiements bien plus contrastés. Les approches hybrides et multicloud sont de mises dans les grandes entreprises.

Edge Computing : le futur de Kubernetes selon SlashData

Cependant, il semble étrange que les questions portant sur les usages de Kubernetes concernent des projets naissants ou peu répandus. En effet, pour mesurer la pertinence de l’orchestrateur et des conteneurs dans les développements en cours dans les entreprises, SlashData s’est intéressé à 16 catégories, dont l’informatique quantique, la vision par ordinateur ; la conduite autonome, le Fog/Edge Computing, les agents conversationnels, la robotique, la 5G, la blockchain, les mini applications ou encore l’identification biométrique. N’oublions pas la volonté des sondeurs d’identifier les prochaines tendances qui affecteront la croissance des développements cloud natifs.

« Parmi les développeurs edge uniquement, l’utilisation de Kubernetes a augmenté de 11 points de pourcentage au cours des 12 derniers mois pour atteindre 63 %. Cette technologie a le taux d’adoption le plus élevé parmi tous les secteurs étudiés », indique le document.

Cette attention toute particulière pourrait émerger d’une demande plus spécifique du client, la CNCF, souhaitant se positionner sur le Edge Computing. Pour rappel, à ce jour la Fondation Linux a créé une filiale dédiée à cette architecture technologique, mais la CNCF héberge de nombreux projets Edge qu’elle pourrait mettre en avant pour le compte de ses sponsors et ses partenaires, à la manière de son paysage des solutions serverless.

L'adoption de Kubernetes a « atteint un plateau en égalant le taux d’adoption des conteneurs ».
CNCF - SlashDataRapport The state of cloud native development

Ainsi, les auteurs du rapport estiment que l’adoption de Kubernetes a « atteint un plateau en égalant le taux d’adoption des conteneurs », mais de nouveaux usages, dont l’IoT, « continueront à alimenter » sa croissance globale. Toutefois, le cabinet d’étude a bien compris la difficulté d’évaluation du marché Edge. « De nombreux cas d’utilisation du Edge Computing exigent que les applications résident sur site ou dans le cloud, tandis que d’autres s’exécutent dynamiquement [sur des équipements] en périphérie », rappellent les auteurs.

Si les résultats de cette étude posent parfois question, Kubernetes est bien un incontournable des architectures IT modernes. Une étude de la CNCF corrélant différentes formes de contributions réelles aux projets open source de la fondation (commits, pull requests, nombre de contributeurs, et commentaires/issues) sur les six derniers mois démontrent que Kubernetes reste largement en tête devant les autres protégés de la CNCF. OpenTelemetry, Argo CD, gRPC, Envoy, Prometheus, également très populaires dans l’écosystème de la fondation, sont des solutions open source intimement liées à Kubernetes.  

Enfin, la filiale de la Fondation Linux prétend chiffre à l’appui que Kubernetes est le deuxième projet open source le plus populaire après Linux et devant React, Pytorch et NixOS.

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