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ITSM : le portail développeur de Datadog éveille l’intérêt des pros du DevOps
Datadog ouvre une autre voie pour empiéter sur le territoire d’Atlassian et de ServiceNow. Son portail développeur en libre-service exploite des données en temps réel sur l’état observé des ressources informatiques.
Datadog a fait un pas important dans le domaine de l’automatisation IT cette semaine en livrant un portail de développement interne au sein de son ensemble croissant d’outils ITSM.
Pour l’instant, le nouveau portail de Datadog reste distinct des plateformes internes pour développeurs. Tous deux abrégés IDP, les portails internes se concentrent sur la découverte centralisée de services, tandis que les plateformes offrent des « chemins d’or » plus étendus et souvent personnalisés que les développeurs utilisent pour livrer des logiciels en production.
Lord de DASH 2025, les porte-parole de Datadog ont souligné cette semaine que le portail de développement de Datadog peut fonctionner avec des outils existants. Y compris Backstage, un outil confié à la Cloud Native Computing Foundation par son créateur, Spotify.
Dans sa version initiale, le portail développeur de Datadog se concentre sur l’accès en libre-service des développeurs au dépannage, à la mise à jour et à la création d’infrastructures et de services au sein de la suite ITSM nommée Datadog Service Management.
Elle comprend également le produit de gestion des incidents Datadog On-Call lancé l’année dernière. Dans sa première version, le portail interne de Datadog inclut un catalogue de logiciels, des actions en libre-service basées sur des modèles prédéfinis et des tableaux de bord qui mesurent la conformité des services IT avec les politiques de l’entreprise.
Bien que le portail n’incorpore pas encore de « golden paths » pour le déploiement de logiciels, il peut déjà invoquer des processus dans l’outil d’orchestration Workflow Automation de Datadog et des outils CI/CD tiers pour mettre en place ou bloquer des déploiements de logiciels, selon Michael Whetten, vice-président de la gestion des produits, lors d’un entretien préalable à la conférence avec Informa TechTarget.
« Pour l’instant, il est davantage axé sur la visibilité et la gouvernance », affirme Michael Whetten. « Nous allons sans doute bientôt nous intéresser davantage à la déclaration et à l’expédition de nouveaux services ».
Dans les grandes entreprises, l’IDP de Datadog a peu de chances de détrôner les plateformes plus larges d’automatisation des flux de travail, ou de suites ITSM proposées par des fournisseurs tels qu’Atlassian et ServiceNow, juge Michael Whetten. Pour autant, les équipes DevOps et de réponse aux incidents au sein des entreprises pourraient l’utiliser pour collaborer. Les entreprises qui sont encore en train de faire la transition vers une infrastructure cloud-native et qui coordonnent leurs efforts à l’aide de feuilles de calcul et de processus manuels trouveront également ce portail intéressant, ajoute-t-il.
Parallèlement, M. Whetten a présenté ce portail comme une alternative plus conviviale et potentiellement plus précise aux bases de données de gestion des configurations (CMDB) qui sont traditionnellement du ressort des grands fournisseurs ITSM.
« Ce portail est construit à partir de l’état observé et non de l’état déclaré », nuance-t-il. « Beaucoup de CMDB traditionnelles étaient difficiles à maintenir à jour, même pour les clients qui utilisent des choses comme Backstage. Avec notre solution, ce problème disparaît en grande partie puisque nous examinons ce qui est déployé et que nous pouvons le rattacher à d’autres systèmes d’enregistrement ».
Le portail de développement de Datadog supplante Backstage chez Nexthink
Pour un client de Datadog, l’accès anticipé au portail de développement au cours des six derniers mois a incité à abandonner un projet pilote Backstage.
« Nous avons décidé de changer parce qu’il utilisait exactement les mêmes fichiers, les mêmes formats, sans aucun changement par rapport à ce que nous faisions auparavant avec Datadog », déclare Pascal Gandilhon, responsable de l’observabilité chez Nexthink, un éditeur de logiciels de gestion de l’expérience numérique des employés. « Nous pouvons tout avoir sur le même portail, au même endroit, et non pas avec un outil différent. Dans le monde DevOps, la prolifération des outils est un énorme problème ».
Nexthink a d’abord signé un accord d’achat avec Datadog à la fin de 2023, ce qui l’a éloigné d’un autre éditeur d’observabilité que Pascal Gandilhon a refusé de nommer. Selon lui, Nexthink a opté pour cette solution principalement parce que Datadog prend en charge les métriques personnalisées. Elles constituent une alternative moins coûteuse aux métriques du fournisseur existant, construites sur des logs préindexés. En outre, les développeurs de l’entreprise ont de l’expérience avec Datadog.
L’amélioration des pratiques de livraison continue pour les nouvelles applications cloud native propulsées par des microservices fait partie des prochains points à l’ordre du jour de Nexthink. Là aussi, le portail des développeurs pourrait également jouer un rôle, selon Michael Gandilhon. L’entreprise utilise également GitHub Actions et Microsoft Azure, mais Datadog « serait le choix naturel » pour gérer ces flux de travail chez Nexthink.
« Nous utilisons déjà les fonctions avancées d’observabilité APM [gestion de la performance des applications], de sorte que nous disposons déjà de toutes les informations concernant la latence, les dépendances et les traces », explique M. Gandilhon. « Une entreprise qui n’utilise que les métriques et les logs pourrait peut-être envisager un autre outil, mais si vous êtes déjà très impliqué dans l’APM et toutes les fonctionnalités qui l’entourent, utiliser le portail de Datadog est une évidence ».
Les entreprises jouent à mélanger les IDP
Les outils ITSM de Datadog n’ont pas remplacé un autre fournisseur chez Nexthink, mais une approche manuelle et ad hoc de la gestion des incidents basée sur des documents statiques qui maintenait l’entreprise en « mode survie ». C’est en tout cas qu’a affirmé Michael Gandilhon lors d’une session en petit comité.
Pour les autres participants à la session qui travaillent déjà avec des outils ITSM tels que Jira Service Management d’Atlassian et Incident.io, l’adoption du portail développeur de Datadog ne sera pas aussi simple. Mais l’idée de relier directement l’ITSM aux données d’observabilité n’est pas dénuée d’intérêt.
« Il y a des ponts à construire entre ces outils », envisage Eric Swanson, ingénieur SRE chez DBT Labs, un éditeur d’une suite logicielle de transformation de données. « Il s’agit peut-être simplement de renforcer les métadonnées, l’étiquetage et les attributs dans Jira, ce qui pourrait aider à connecter et à tirer davantage de valeur de la partie “On Call” de Datadog ».
Pour un autre présentateur de DASH 2025 disposant d’un déploiement Backstage bien établi, le portail de développement de Datadog ne remplacera pas le système hautement personnalisé qu’une équipe interne a déjà construit. Il pourrait toutefois intéresser des entreprises plus petites pour un objectif similaire.
« La taille de l’équipe entre en jeu – si vous avez quelques équipes de développement et 50 services ou quelque chose comme ça, cela n’a pas de sens de construire et de gérer l’ensemble », affirme Mark Avery, ingénieur logiciel chez Cvent. « Datadog offre de nombreux avantages en tant que source fiable et sincère de données réelles, plutôt que s’appuyer sur des données saisies par l’utilisateur ».
Pour un analyste présent à DASH 2025, le facteur décisif pour les entreprises qui envisagent d’utiliser le portail de développement de Datadog ne sera pas en fin de compte la taille de l’entreprise, mais son degré d’orientation technologique et l’importance cruciale pour elle de répondre aux incidents en temps réel.
« Les préférences entre Datadog et ServiceNow peuvent varier selon le niveau organisationnel », observe Carlos Casanova de Forrester Research. « Une organisation axée sur l’ingénierie, qui s’intéresse aux détails techniques, pourrait davantage s’appuyer sur Datadog et considérer ServiceNow comme un gestionnaire de charges de travail post-processus. En revanche, à un niveau hiérarchique plus élevé, l’on pourrait adopter plutôt la perspective de ServiceNow : il s’agirait de recevoir les alertes et événements de Datadog, mais d’opter pour une gestion qui offre une meilleure compréhension des enjeux métier ».
Le fait de pencher trop vers l’approche de haut niveau pourrait signifier que les entreprises réagissent trop tard aux incidents urgents, tandis que privilégier les alertes en temps réel pourrait conduire à des réactions excessives face à des problèmes à faible impact, soupèse l’analyste.
« C’est de plus en plus complexe, mais je pense que cela va probablement se jouer en fonction de la maturité technologique d’une équipe IT, » a-t-il dit – « du moins, pour le moment ».
« Toutes ces organisations de plateformes se chevauchent déjà, et pour l’instant, elles semblent bien travailler et coopérer, mais à un certain point, le marché poussera l’une d’entre elles à essayer d’évincer les autres, » conclut Carlos Casanova.