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Recapitalisation d’OpenAI : Microsoft s’offre des garanties substantielles

Alors qu’OpenAI termine sa restructuration commerciale, Microsoft obtient des garanties pour garder un haut niveau de contrôle sur les technologies et les revenus de la société dirigée par Sam Altman.

Le 28 octobre, OpenAI a annoncé avoir terminé sa restructuration capitalistique. Comme prévu, une organisation à but non lucratif supervise l’entité commerciale du fournisseur de LLM.

L’ONG, désormais nommée OpenAI Foundation, détient l’équivalent de 130 milliards de dollars de l’entreprise valorisée environ 500 milliards, soit 26 % des parts. Elle engagera 25 milliards de dollars dans deux initiatives. La fondation veut développer des solutions pour « accélérer les diagnostics, améliorer les traitements de maladies ». En commençant par constituer des jeux de données massifs pour entraîner des LLM.

Elle souhaite par ailleurs renforcer la « résilience de l’IA » en développant des « solutions pratiques et techniques » afin de « maximiser ses bénéfices et minimiser les risques ». L’intention est peu claire, mais il s’agirait par exemple de s’assurer qu’aucun modèle frontière sur le marché ne puisse servir à créer un pathogène digne d’une arme de destruction massive.

Microsoft lâche un peu la « bride »

Ce qui est plus limpide, c’est que Microsoft dispose d’une bonne part dans l’entité commerciale. Elle détient 27 % de l’OpenAI Group PBC, environ 135 milliards de dollars. Cela représente plus de dix fois la mise de départ du géant du cloud. Il a investi au total 13 milliards de dollars dans la société depuis 2019.

 « En excluant l’impact des récents tours de financement d’OpenAI, Microsoft détenait une participation de 32,5 % sur une base convertie dans la société à but lucratif OpenAI », précisent les deux partenaires.

Surtout, OpenAI et Microsoft clarifient leur relation, parfois tendue. Le moment de (re) découvrir l’emprise que la firme de Redmond exerce sur la startup californienne. 

Premièrement, Microsoft s’assure l’accès aux modèles et produits propriétaires d’OpenAI jusqu’en 2032. Elle peut ainsi les exploiter dans ses propres produits. La firme a également accès aux méthodes confidentielles d’OpenAI (documentation, techniques d’entraînement) jusqu’en 2030. Le propriétaire de Windows n’a toutefois pas accès aux architectures, poids, code des modèles et aux IP (hardware, software) liés aux centres de données. De même, Microsoft n’aura plus de droits de regard sur les éventuels équipements grand public qu’OpenAI pourrait développer.

OpenAI gagne la possibilité de développer « certains produits » avec des acteurs tiers. En revanche, s’ils sont disponibles par API, ils s’appuieront exclusivement sur l’infrastructure Azure. Les produits qui ne sont pas des API, comme les applications (ChatGPT n’est pas mentionné) pourraient être déployées ailleurs. OpenAI peut donc entraîner ses modèles sur les supercalculateurs d’Oracle ou y héberger certaines applications.

 En outre, OpenAI peut désormais vendre directement des produits aux agences gouvernementales américaines sans passer par Microsoft. Les administrations américaines tentent, elles aussi, de ne pas dépendre d’un seul fournisseur cloud.

Il semblait également y avoir des restrictions sur la typologie des modèles open weight qu’OpenAI pouvait « libérer ». La startup a davantage de marge de manœuvre, tant qu’elle ne lance pas dans la nature un modèle d’Intelligence artificielle générale.

L’intelligence artificielle générale comme condition de libération des obligations envers Microsoft

Oui, même si la notion d’AGI semble moins la priorité immédiate à l’ère de l’industrialisation des agents IA, Microsoft se réserve le droit d’accès à un modèle frontière de ce genre. La condition est applicable jusqu’en 2032.

D’ailleurs, OpenAI ne pourra pas prétendre avoir atteint cet objectif sans la revue dudit modèle par un panel d’experts indépendants. C’est l’une des conditions affichées par la société dirigée par Satya Nadella. Microsoft précise qu’OpenAI peut s’aider de tiers pour ce faire.

« Il est possible que les systèmes de deep learning soient à moins d’une décennie de la super intelligence. [Nous parlons] de systèmes qui sont beaucoup plus intelligents que nous sur un grand nombre d’axes critiques », affirme Jakub Pachocki, directeur scientifique d’OpenAI, dans une session de question – réponse diffusée sur YouTube le 29 octobre.

Ces travaux sont d’abord dirigés vers le développement de systèmes de recherche scientifique en IA autonome qui pourrait voir le jour publiquement en mars 2028, et en septembre 2026 en interne. « Nous pourrions fortement nous tromper concernant ces dates, mais cela vous donne une idée de notre calendrier et de notre organisation », ajoute Jakub Pachocki.

Cependant, si Microsoft développe un modèle AGI avant qu’OpenAI atteigne son objectif, celui-ci sera soumis à des seuils de calcul « bien plus important que ceux utilisés actuellement pour entraîner les meilleurs modèles ».

En attendant cette hypothétique avancée scientifique (encore très débattue), Microsoft s’est assuré qu’OpenAI signe un accord « incrémental » pour l’achat de 250 milliards de dollars de services Azure. Le papa de ChatGPT pourra payer sa facture sur le long terme. Il ne pourra plus subir de « premier refus » aux infrastructures de Microsoft.

OpenAI n’écarte pas l’IPO

OpenAI a toutefois intérêt à atteindre le fameux stade de l’IA générale. Tant que cela ne sera pas fait, la licorne lui rendra « une partie de ses revenus » à Microsoft. Selon les sources anonymes citées par Bloomberg, OpenAI doit « continuer » de lui reverser 20 % de son chiffre d’affaires.

D’après Reuters, Sam Altman gagne aussi davantage de marge de manœuvre pour attirer de nouveaux investisseurs et partenaires dans le cadre de la recapitalisation.

Lui-même explique lors de la session de question-réponse que la nouvelle structure permettra de favoriser l’infrastructure nécessaire à l’avènement de l’AGI. Cela impliquerait un investissement de 1 400 milliards de dollars, selon Sam Altman.

Pour ce faire, OpenAI a besoin de « générer des centaines de milliards de dollars par an et nous sommes sur une courbe assez raide qui nous rapproche de cet objectif », déclare-t-il.

Il imagine que les solutions d’entreprise généreront la majorité du chiffre d’affaires. La diversification des offres pour le grand public (nouvelles applications, appareils, etc.) doit aussi contribuer à cet effort. Une partie des sommes obtenues seront réinvesties dans la construction de data centers. 

Au vu de ses ambitions et de la taille du groupe, le dirigeant n’écarte pas l’option de l’introduction en bourse. « Ce n’est toutefois pas une priorité pour nous en ce moment », précise-t-il.

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