Dynamics 365 : Microsoft affirme ses ambitions dans l’ERP, mais reste humble

Cloud, ouverture, rebranding, R&D massive, Microsoft veut devenir incontournable dans l'ERP - et le CRM - avec son nouveau Dynamics 365. Mais l'Ă©diteur ne sous-estime pas le lourd poids de l'existant SAP et Oracle chez ses prospects.

« Microsoft investit trois milliards de dollars par an en R&D sur Dynamics Â». Cette confidence de Wilfrid Guerit, directeur de la Division Microsoft Business Solutions de Microsoft France, montre l’importance du lancement de la nouvelle offre d’applications mĂ©tiers de l’éditeur. Une offre regroupĂ©e et rebaptisĂ©e Dynamics 365 (prononcez « Three – Sixty Five Â»).

Il y a à la fois beaucoup et peu à dire sur cette nouvelle gamme. Peu parce qu’elle n’est au final que le regroupement des ERP (NAV et AX) et du CRM de l’éditeur. Beaucoup parce qu’elle montre le virage Cloud et la maturité grandissante de Microsoft sur ce marché B2B.

Dynamics 365 : un CRM, deux ERPs, des modules

L’offre tout d’abord. Dynamics 365, solution 100% Cloud, repose sur l’idĂ©e de n’avoir qu’un « seul et unique modèle de donnĂ©e Â» pour l’ERP et le CRM pour lutter contre les silos d’informations. Elle sera disponible en deux Ă©ditions : Dynamics 365 Business (qui est la continuitĂ© de Dynamics NAV dans le Cloud) pour les entreprises de moins de 250 utilisateurs, et Dynamics 365 Enterprise (continuitĂ© de AX dans le Cloud) pour les plus de 250 utilisateurs.

Le CRM (Dynamics CRM, pas la brique CRM plus limitĂ©e des ERP) reste en version unique. « Il peut rĂ©pondre aux besoins des entreprises de 10 Ă  20.000 personnes, en Ă©tant paramĂ©trĂ©s correctement et avec plus ou moins de customisation) Â», justifie Wilfrid Guerit.

Les clients peuvent choisir de prendre la solution entière (ERP + CRM) ou seulement quelques modules en fonction de leurs besoins.

La nouveauté – telle que présentée par Microsoft – est l’intégration de fonctionnalités d’AI (via Cortana Intelligence Suite). Mais bien malin celui qui pourra dire qui de Microsoft, Salesforce et autres Oracle/SAP ont les capacités analytiques (ici l’intégration avec Power BI) et prédictives les plus abouties (ou simplement pertinentes).

En fait, la vraie nouveauté est plutôt à chercher du côté de AppSource.

Des verticaux

Cette place de marchĂ© regroupe des verticaux et des extensions pour Dynamics pour adapter la suite aux secteurs et aux usages particuliers. Il y a aujourd’hui environ 250 extensions disponibles. « Elles sont dĂ©veloppĂ©es par les ISV et les partenaires, mais chacune est approuvĂ©e et validĂ©e par la R&D de Microsoft Â», rassure Wilfrid Guerit. Cette philosophie de vĂ©rification du code Ă  la Apple permet de « s'assurer que l'upgrade de Dynamics 365 sera possible Â» et sans heurts.

Côté mise à jour justement, deux updates fonctionnelles sont prévues par an, mais elles sont soumises à l’accord du client.

Toujours pour Ă©viter les usines Ă  gaz, les dĂ©veloppements spĂ©cifiques pour complĂ©ter la suite, toujours possibles sur le PaaS Azure, sont rĂ©duits Ă  leurs stricts minimums « grâces aux consultants que nous mettons sur les projets Â». Tout comme pour les extensions, ces codes faits maisons sont validĂ©s par la R&D de Microsoft. RĂ©sultat, « lĂ  oĂą on aurait eu du 80/20 (NDR : standard /

dĂ©veloppement spĂ©cifique) on arrive Ă  du 95/5 Â», se fĂ©licite le directeur de la Division Microsoft Business Solutions.

Cloud First

Avec Dynamics 365, Microsoft abandonne totalement les noms des produits qu’il a rachetĂ©s pour constituer sa gamme d’applications mĂ©tiers. Jusqu’ici les marques Navision et Axapta - les ERP danois qu’il a rachetĂ©s en 2002 - Ă©taient encore visibles dans le NAV et le AX de Dynamics. Pour une raison simple : Microsoft n’était pas identifiĂ© sur ce marchĂ© comme un acteur majeur alors que les produits bĂ©nĂ©ficiaient d’une bonne image.

Aujourd’hui, l’âge de maturité semble être arrivé pour Microsoft. L’éditeur ne sent en tout cas plus le besoin de faire référence à l’origine de ses produits (qui ont plus de 10 ans) et se repose sur sa seule marque.

Autre signe fort envoyĂ© par Dynamics 365, ce sont dĂ©sormais les ERP et CRM Cloud qui sont les fers de lance de la stratĂ©gie du numĂ©ro 1 mondial du logiciel. « On n’abandonne pas le on premise Â», prĂ©cise Wilfrid Guerit. Il n’en reste pas moins les mises Ă  jour seront dĂ©sormais d’abord dĂ©ployĂ©es dans le Cloud et - peut-ĂŞtre – ensuite, rendues disponibles pour les Ă©ditions sur site.

Quant aux architectures hybrides « c’est une possibilité… mais pas une prioritĂ© Â».

SAP et Oracle pas vraiment en ligne de mire

Avec ce positionnement, Microsoft sait qu’il ne concurrencera pas les ERP « centraux Â» de SAP (Business Suite) ou d’Oracle (eBusiness Suite, PeopleSoft et JD Edwards).

Ce n’est d’ailleurs, a priori, pas son but. Ce sont plutôt les filiales, ou les projets de consolidation d’ERPs de différents sites, que vise Microsoft avec son outil SaaS.

« Notre solution a Ă©voluĂ©, elle est mature », se fĂ©licite Wilfrid Guerit. « On est capable de rĂ©pondre aux besoins des très grosses sociĂ©tĂ©s. On a fait nos preuves Â». Mais le responsable ne sous-estime pas le très lourd poids de l’existant.

Les ERPs - comme les bases de donnĂ©es - sont tellement critiques que les entreprises deviennent quasiment captives de leurs fournisseurs. Microsoft – dont on pourrait presque se demander ce qu’il a Ă©tĂ© faire dans cette galère de l’ERP -  le sait bien. «L’ERP central est la dernière chose qu'on ira attaquer Â», admet sans dĂ©tour Wilfrid Guerit. Ce qui ne signifie pas qu’un jour Microsoft n’ira pas, mais pas tout de suite.

D’autant qu’il existe un marchĂ© Ă  prendre en dehors de ces projets pharaoniques. « Oui, il y a une vraie demande pour les ERP Cloud Â». A condition de savoir s’intĂ©grer dans les SI, et donc de se connecter aux ERP historiques pour les complĂ©ter plutĂ´t que de les remplacer. Ce que Microsoft propose dans sa nouvelle optique « d’ouverture Â» chère Ă  son PDG, Satya Nadella.

En clair, Dynamics 365 vise plus NetSuite ou Workday voire Infor ou Sage (X3). Et Salesforce pour le CRM.

D’oĂą le comparatif de Takeshi Numoto (Vice-PrĂ©sident en charge du Cloud chez Microsoft) pour montrer que son offre est moins chère (« quatre Ă  cinq fois moins coĂ»teuse que celle des fournisseurs traditionnels de CRM Â») que celle du leader des outils de relation client dans le Cloud.

A vĂ©rifier lors du lancement le 1er novembre. Aucun prix officiel n’a Ă©tĂ© (et ne sera) communiquĂ© par Microsoft. « Ils seront dĂ©voilĂ©s lors de la sortie officielle de l’offre Â» nous confirme Microsoft France.

Microsoft reste humble, et patient

« Il faut rester humble et faire des choses dans l'ordre Â», rĂ©sume un Wilfrid Guerit pour qui la stratĂ©gie long terme doit passer prioritairement par « des clients satisfaits Ă  100% Â».

Pour concrĂ©tiser cet objectif, ses Ă©quipes possèdent « des consultants pour s'assurer que tout se passe bien dans chaque projet et des architectes solutions basĂ© en France pour l'implĂ©mentation Â». Un support qui s’ajoute Ă  celui des partenaires comme Avanade, qui possède « la plus grosse practice sur Dynamics Â».

En plus d’être humble, Microsoft doit se montrer patient. Le cycle de dĂ©cision sur l’adoption d’un nouvel ERP va « de neuf mois Ă  un an et demi Â», lĂ  oĂą le choix et l’implĂ©mentation d’un ERP prend en moyenne 6 mois.

En France, Microsoft revendique 15 clients « AX online Â» - qui composent le mĂŞme cĹ“ur cible que celui de Dynamics 365 – pour une cinquantaine dans le monde. « Et 300 projets en cours Â», s’empresse d’ajouter le responsable. Selon que l’on verra le verre Ă  moitiĂ© vide ou Ă  moitiĂ© plein, on dira que c’est peu (par rapport Ă  ses concurrents) ou beaucoup (si l’on considère la jeunesse de l’offre Cloud).

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