Fabien Aufrechter, Havas : Blockchain, NFT, ou Métavers permettent de vendre, mais pas uniquement

Pour le directeur Sovereign Technologies d’Havas, il ne fait aucun doute que ces « buzzwords » font vendre. Mais pas uniquement parce qu’ils font « tendance ». En outre, selon lui, ils permettent de répondre à de vrais problèmes.

Fabien Aufrechter, directeur Havas Sovereign Technologies, s’exprimait lors d’une conférence plénière organisée au salon Ready for IT, qui se déroule cette semaine à Monaco. Pas question, pour lui, de nier la dimension « buzz » de termes tels que blockchain, NFT ou encore métavers – auquel est d’ailleurs consacré la dernière édition de notre eZine Applications & Données.

Une grande incompréhension

Selon Fabien Aufrechter, l’expansion de l’adoption des technologies décentralisées de type Blockchain est incontestable. Mais l’incompréhension n’en demeure pas moins grande – deux éléments qui contribuent à expliquer les difficultés de recrutement dans le domaine.

Alors Fabien Aufrechter prend l’exemple d’un cahier à spirale pour illustrer le concept de blockchain : la page est un bloc sur lequel est écrit à l’encre indélébile – relié à d’autres par la spirale – la chaîne. Mais celle-ci n’est pas intégralement stockée sur un unique point de défaillance, le fameux single point of failure, mais répliquée sur l’intégralité des ordinateurs des utilisateurs de la chaîne. Le risque d’indisponibilité ou d’altération est ainsi considérablement réduit. Et le contenu de chaque bloc est accessible en toute transparence.

Mais « rien n’est gratuit ». Passer d’une page à l’autre du cahier, ou d’un bloc à l’autre de la chaîne, demande de l’énergie : « le modèle a imaginé un système de récompense pour ce travail, le minage, afin de compenser la valeur perdue, par exemple l’énergie utilisée, un jeton ». Et c’est cela « qui permet de créer ce que l’on appelle des cryptomonnaies […] il n’y a pas de blockchain sans cryptomonnaie ».

Cette valeur peut prendre d’autres formes, explique Fabien Aufrechter, d’autres types de jetons, à commencer par des jetons « d’usage, pour utiliser un service », transformables en valeur financière, « une valeur positive, soit une action financière digitalisée, ou négative, une dette digitalisée ». À cela s’ajoutent les jetons fongibles et non fongibles, les derniers renvoyant aux NFT.

Et des idées reçues

Fabien Aufrechter ne manque pas de citer le créateur d’Etherum, Vitalik Buterin : « 90 % des ICO [émissions initiales de jetons, N.D.L.R.] sont des arnaques ». Pour le directeur Havas Sovereign Technologies, c’est presque une évidence, parce que lancer une nouvelle blockchain, « c’est très simple ». Du coup, n’importe qui peut y prétendre. De quoi justifier une régulation forte.

Fabien Aufrechter veut en outre tordre le cou à « des idées reçues », à commencer par « la blockchain, ça finance le terrorisme ». Pour lui, la transparence et la traçabilité constituent des filets suffisants pour décourager les activités criminelles. Sur le papier, cela peut paraître juste, et effectivement, la traçabilité du Bitcoin est clairement mise à profit par les forces de l’ordre pour débusquer des activités criminelles. Mais la réalité est nuancée.

Seconde idée reçue, « les cryptoactifs sont une bulle spéculative ». À cela aussi, Fabien Aufrechter a réponse, relevant que des bulles spéculatives peuvent apparaître pour n’importe quel actif, sans que le marché correspondant soit intrinsèquement spéculatif.

Enfin, toute chaîne de blocs est-elle nécessairement polluante, du fait de sa nature massivement distribuée ? « On pense à bitcoin, forcément » et là, « c’est vrai ». Mais c’est loin d’être la seule blockchain et d’autres modèles sont plus sobres.

Des applications et des bénéfices

Mais Fabien Aufrechter voit bien plus que du simple buzz dans ces technologies décentralisées. Pour lui, concrètement, « le mot Blockchain fait vendre. Lorsque l’on associe ce mot à un produit, il se vend mieux ». Et prendre l’exemple désormais bien connu de Carrefour, qui a adopté la blockchain pour rendre la traçabilité de certains de ses produits plus transparente : et justement, « le produit blockchain se vend mieux, parce qu’il est plus rassurant ». Même si l’effet « buzzword » joue également.

« La guerre des portefeuilles numériques sera la prochaine guerre en matière de souveraineté. C’est là qu’il faut regarder. »
Fabien AufrechterDirecteur Sovereign Technologies, Havas

Autre usage avancé par le directeur Havas Sovereign Technologies, sécuriser des données sensibles, contre une destruction éventuelle, à l’instar de diplômes ou de données cadastrales.

L’étape suivante, ce sont les NFT, les jetons non fongibles, qui rattachent un objet, physique ou virtuel, à une identité numérique : « certains artistes les utilisent pour vendre des œuvres digitales uniques », mais ce n’est pas tout. « Les NFT permettent aux Palaos de produire des passeports numériques uniques inviolables ». Les NFT permettent également de produire des doubles numériques – « qui n’est ni plus ni moins qu’un certificat d’appartenance », d’objets d’art par exemple. « Et en plus, on peut lier énormément de contenu à ces certificats ».

Mais pour Fabien Aufrechter, les entreprises doivent dès aujourd’hui regarder par-delà tout cela et se concentrer sur les portefeuilles de cryptoactifs : « ce sont eux qui captent la valeur », quelle que soit la cryptomonnaie. Et d’estimer que, « la guerre des portefeuilles numériques sera la prochaine guerre en matière de souveraineté. C’est là qu’il faut regarder ». Et cela d’autant plus que ces portefeuilles seront la clé du métavers : c’est là que tous objets et actifs numériques prendront leur pleine valeur.

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