Cisco Live : la plateforme FSO débarque pour concurrencer Splunk

Full Stack Observability est une architecture qui permet de visualiser un même événement du point de vue de consoles qui servent à monitorer des activités différentes. Cisco vante un moyen d’innovation transverse pour les directions métiers.

Promesse tenue. La plateforme Full Stack Observability que Cisco avait dévoilée en février à Amsterdam et qui devait réunir tous ses produits de monitoring – AppDynamics qui mesure l’expérience utilisateur, ThousandEyes qui pointe les goulets d’étranglement sur le réseau… – est belle est bien commercialisée ce mois-ci, comme prévu. Pour autant, il reste beaucoup de chemin à parcourir avant de véritablement avoir un produit multifonction qui évite de multiplier les consoles.

La plateforme Full Stack Observability, alias FSO, est, pour l’instant, un moteur. Ou plutôt, pour rester dans la nomenclature de Cisco, une sorte de routeur qui interconnecte différentes consoles de monitoring.

Cisco a doté toutes ses interfaces de surveillance et d’administration – celles de ses multiples gammes d’équipements réseau, celles de ces solutions collaboratives WebEx, celles liées à la cybersécurité, celles liées aux applications – d’un connecteur logiciel de type OpenAPI. Ce connecteur leur permet d’échanger leurs relevés au format OpenTelemetry. Plus exactement, Cisco parle de données MELT (métriques, événements, logs et traçages).

Grâce à ce système, il devient possible d’ouvrir la console AppDynamics pour identifier quelle fonction d’une application est plus lente que prévu, de cliquer sur le problème et de voir la console de ThousandEyes se lancer toute seule pour montrer quel équipement réseau est fautif. Pour que cela fonctionne, il faudra bien évidemment que l’entreprise cliente ait acheté AppDynamics et ThousandEyes. Ou n’importe quel autre logiciel compatible avec ce système et qui corresponde à un autre cas d’usage.

Cloud Native Application Observability : première étape face à Splunk

La prise en charge d’autres cas d’usage est le sujet principal de l’annonce de FSO. Cisco ambitionne que les intégrateurs et les fournisseurs de solutions se mettent à développer des solutions de monitoring capables de se greffer sur un connecteur Open API. Voire qu’elles se greffent sur une console générique (que Cisco publie pour l’occasion) qui s’appelle Cloud Native Application Observability et constitue sans nul doute une première étape à une concurrence ouverte des consoles Splunk.

À l’occasion de ce lancement, Cloud Native Application Observability s’accompagne de quatre vues : Costs Insights, Application Resource Optimizer, Security Insights et Cisco AIOps.

Costs Insights permet d’estimer combien coûte l’exécution d’une application web au regard de l’infrastructure qu’elle consomme. Au-delà d’un calcul financier, elle sert aussi à évaluer l’impact carbone des applications. Cette vue va notamment piocher ses données dans AppDynamics.

Application Resource Optimizer se connecte à un agent installé sur un cluster Kubernetes pour mesurer la quantité de ressources – CPU, RAM, Stockage… – réellement utilisées sur un cluster de serveurs physiques ou sur des machines virtuelles éventuellement en cloud. Avec Costs Insights, il devient possible de mieux budgétiser ou d’optimiser ses investissements en infrastructures.

Security Insights combine des relevés issus des clusters applicatifs et des infrastructures réseau pour calculer un score de risque.

Cisco AIOps, enfin, regroupe sur une carte les principales métriques d’une infrastructure. Ce sont les goulets d’étranglement, les risques et les performances des serveurs et des switches réseau.

À cela s’ajoutent trois premières consoles tierces qui ont fait l’effort de s’adapter aux mécaniques de FSO pour, soit partager leurs relevés, soit s’enrichir de ceux envoyés par les consoles de Cisco.

CloudFabrix, un spécialiste de l’administration système automatisée, propose ainsi vSphere Observability and Data Modernization qui corrèle différentes mesures fournies par Cisco, pour dresser un bilan de santé d’une infrastructure virtualisée et containerisée, avec conseils de remédiation à l’appui.

Evolutio Fintech, de l’éditeur éponyme, se concentre sur les données financières qui circulent sur l’infrastructure pour mieux identifier les fraudes bancaires.

Capacity Planner and Forecaster de Kanari, enfin, trace des courbes historiques sur l’utilisation des ressources d’infrastructure – sur site, comme en cloud – pour, à l’aide d’un moteur de Machine Learning, prédire quand et dans quoi une entreprise devra investir.

Interview de Liz Centoni et Carlos Pereira

Dans le cadre de l’événement Cisco Live, qui se tient cette semaine à Las Vegas et qui a été le théâtre du lancement de FSO, LeMagIT est parti à la rencontre de Liz Centoni et Carlos Pereira (en photo), respectivement Directrice et Architecte de la Stratégie chez Cisco, afin de mieux comprendre comment Cisco compte commercialiser son nouveau produit

LeMagIT : Mesurer l’expérience utilisateur, mesurer l’infrastructure, mesurer la sécurité sont des domaines très différents. Dans l’entreprise, quelle direction va acheter FSO ou sous quelle forme ?

Liz Centoni : Pour l’instant, FSO est proposé aux clients d’AppDynamics. Nous travaillons à concevoir des bundles qui couvrent des cas d’usage précis et d’autres plusieurs cas d’usage. Il y aura des tarifs de base, avancés, calculés sur le nombre d’agents déployés en production, ou sur le nombre d’utilisateurs, selon les cas d’usage. Nous nous donnons encore un peu de temps pour mettre au point différentes combinaisons commerciales.

Carlos Pereira : Le scénario auquel nous nous attendons est celui d’une entreprise qui va d’abord chercher un cas d’usage, par exemple la surveillance de la sécurité des applications. Puis, une autre direction de la même entreprise souhaitera une autre fonction. Plutôt que d’acheter cette fonction au tarif le plus cher, elle pourra bénéficier d’un tarif préférentiel en greffant ses fonctions d’observabilité sur celles déjà déployées. Le bénéfice de ce modèle est que vous pourrez tout aussi facilement étendre vos fonctions d’observabilité du datacenter au cloud, par exemple.

Liz Centoni : Ce modèle permet surtout de simplifier l’expérience d’achat de solutions en entreprise. C’est une demande très importante de nos clients. Justement parce qu’elles se posent la question de qui doit acheter telle ou telle fonction. Notre modèle fonctionne, que vous ayez plusieurs responsables impliqués comme un seul. Mais une étude récente d’IDC explique que, de toute manière, toutes ces directions ont vocation à mieux collaborer sur l’observabilité et c’est exactement ce que FSO va leur permettre de faire.

LeMagIT : Manifestement, le succès de FSO va dépendre du bon vouloir d’éditeurs tiers à adapter leurs solutions à votre architecture. N’est-ce pas un problème ?

Liz Centoni : Plus que des fournisseurs tiers, ce sont surtout les intégrateurs qui se mobiliseront. Car, lorsqu’une entreprise a un projet d’observabilité, cela nécessite souvent de coudre ensemble plusieurs solutions techniques. Et, dans ce cas, le maître d’œuvre n’est pas l’éditeur d’une des solutions, mais celui qui les intègre ensemble. Je vous parle d’Accenture, de Capgemini. Ce sont des partenaires qui sont demandeurs de notre architecture d’intégration. Eux vont développer des outils, des ERP qui vont comptabiliser des ventes, des opérations financières, modéliser des processus, des risques commerciaux. Ils ont besoin de FSO pour coudre tous les éléments nécessaires ensemble.

Carlos Pereira : Et nous avons déjà des exemples d’intégration. Un centre hospitalier qui monitorait l’efficacité de ses applications nous a demandé s’il pouvait se servir de notre moteur pour alimenter ses processus de conformité. D’autres nous ont demandé comment étendre les moyens de monitoring que nous leur fournissions pour l’infrastructure interne aux outils qu’ils mettent à disposition de leurs clients. Dans les deux cas, Accenture devait se charger de l’intégration.

LeMagIT : Concrètement, va-t-on vers une disparition des marques ThousandEyes, AppDynamics et autres, au profit d’une seule interface FSO que l’on agrémenterait au fil du temps avec des fonctions optionnelles dédiées à tel ou tel monitoring ?

Carlos Pereira : Non. FSO n’a pas vocation à être une console globale. Il a vocation à être une base de métriques globale pour toutes les consoles. Nous n’avons par ailleurs aucun intérêt à faire disparaître des marques bien connues de nos clients. L’enjeu n’est pas de remplacer nos produits, l’enjeu est de permettre aux entreprises d’innover avec eux.

Pour approfondir sur Administration de systèmes

Close