
Pure Storage commande des NAND en quantité pour les hyperscalers
Le fabricant de baies de stockage aurait donc réussi son pari : parvenir à vendre ses solutions aux hyperscalers alors que cet énorme marché est d’ordinaire fermé aux fabricants d’équipements pour entreprises.
Dans la perspective d’importants contrats avec les hyperscalers, Pure Storage s’est rapproché de Micron et de Kioxia pour réserver une part importante de leur prochaine production de mémoires NAND QLC, dite de neuvième génération. L’objectif serait de permettre aux hyperscalers de remplacer enfin et une bonne fois pour toutes les disques durs par des médias offrant beaucoup plus de densité.
L’information, surtout, est que Pure Storage aurait donc bel et bien signé la vente de produits à des hyperscalers, alors que cela n’arrive jamais aux autres grandes marques d’équipements pour datacenter.
Vendre aux hyperscalers
En juin dernier, Pure Storage avait dévoilé qu’il travaillait à adapter la technologie de ses DFM (DirectFlash Modules) aux besoins des hyperscalers. Si ces modules de stockage ne sont pas des SSD ordinaires, c’est parce qu’ils sont dépourvus de firmware et de RAM pour calculer dans quelles cellules NAND stocker les données. Ce sont les baies de stockage du constructeur, dans lesquelles sont enfichés les DFM, qui effectuent ce calcul. Selon Pure Storage, la baie ayant une meilleure connaissance de la nature des données à écrire, elle serait plus efficace pour déterminer lesquelles superposer dans des cellules QLC qui stockent quatre bits.
L’intérêt, surtout, est que des SSD dépourvus de firmware et de RAM consomment moins d’énergie, s’usent beaucoup moins vite et libèrent de l’espace pour installer plus de circuits de NAND. D’ailleurs, chaque génération de DFM offre 2,5 fois plus de capacité que les SSD commercialisés en même temps. Soit, en ce moment, 150 To contre 60 To. Pour les hyperscalers qui achètent les plus importantes quantités de disques, ces avantages représenteraient d’importants bénéfices.
Pure Storage avait dit que l’un des trois grands hyperscalers annoncerait en décembre 2024 les bénéfices chiffrés de cette technologie après l’avoir implémentée dans son infrastructure. Dans les faits, c’est le constructeur lui-même qui a déclaré que « l’un des quatre géants d’Internet » aurait obtenu des mesures satisfaisantes.
Pour Pure Storage, l’enjeu est de taille. AWS, Azure, GCP et Meta achètent à eux quatre 43 % de la production mondiale de serveurs. Et ils n’achètent que des modèles en marque blanche qu’ils personnalisent selon leurs besoins. Ce marché, excessivement rentable, est de fait interdit aux grandes marques du datacenter. Pure Storage, Dell, HPE, NetApp et les autres n’y ont normalement pas accès, car leurs appareils de série sont trop génériques.
Dans sa stratégie, Pure Storage revendrait donc ses DFM en marque blanche aux hyperscalers, lesquels s’inspireraient du fonctionnement de son OS pour mettre au point leurs propres baies de stockage. On ignore officiellement quels hyperscalers seront clients des DFM de Pure Storage. On sait en revanche que GCP et Meta, au moins, ont déjà rebaptisé sa technique de placement logiciel des données en Flexible Data Placement.
Des SSD dix fois plus capacitifs que les disques durs
Jusqu’ici, les hyperscalers préféraient déployer des disques durs pour motoriser tous leurs services de stockage froid, car ceux-ci restaient bien moins chers que des SSD. Et pour cause : ils sont aussi beaucoup plus lents. Mais l’avènement de l’IA, avec sa nécessité à puiser rapidement dans les données froides (sauvegardes, archives, lacs de données…), incite à présent les grands hébergeurs à ne plus utiliser que des SSD.
Encore faut-il qu’ils soient très capacitifs pour être rentables. Justement : les nouvelles générations de NAND QLC de Micron et Kioxia devraient permettre de produire des DFM de 300 To, soit l’équivalent de dix disques durs.
En fin d’année dernière, Kioxia dévoilait quelques détails sur sa prochaine génération de mémoire NAND. Il utiliserait notamment des pièges à charge plutôt que des portes flottantes pour stocker plus rapidement l’information dans les cellules NAND tout en consommant moins d’énergie. Par ailleurs, Kioxia a aussi partagé des mesures obtenues sur des tests d’écriture en Flexible Data Placement : avec une base NoSQL comme RocksDB, les informations seraient relues 1,8 fois plus vite et la durée de vie des cellules NAND serait multipliée par trois.
De son côté, Micron était déjà le fournisseur des mémoires NAND pour les DFM de Pure Storage. Le fabricant a partagé peu de détails sur sa prochaine génération de SSD. On sait juste que les circuits de NAND seront 19 % plus capacitifs que les circuits actuels qui empilent 232 couches de cellules.
En décembre dernier, Pure Storage annonçait un chiffre d’affaires trimestriel de 831 millions de dollars, en hausse de 9 % par rapport à l’année dernière. Il est donc derrière Dell, dont l’activité stockage a généré un CA de 4 milliards de dollars au dernier trimestre, soit +4 % en un an (sur un CA global de 24,37 Mds $, +10 %). Également derrière NetApp, dont le dernier CA trimestriel est de 1,66 Md $ (+6 %). Et sans doute aussi juste derrière HPE qui ne précise pas quelle est la part du stockage dans ses 8,5 Mds $ de CA trimestriel.