Freshworks se pose en alternative à Salesforce et ServiceNow

Il n’a pas l’envergure de Salesforce ou de ServiceNow. Et pourtant, Freshworks entend rivaliser avec les deux géants du CRM et de l’ITSM sur un segment bien particulier. Il mise sur la relative simplicité de ses produits, ainsi que sur des agents et copilotes propulsés à l’IA générative.

L’éditeur américain d’origine indienne a été fondé en 2010 par Girish Mathrubootham et Shan Krishnasamy. Il s’appelait alors Freshdesk. Installée à San Mateo depuis 2018, la société a pris son nom actuel en 2017. Girish Mathrubootham, actuel président du conseil d’administration, a laissé sa place de CEO à Dennis Woodside en mai 2024.

Dennis Woodside est un ancien dirigeant chez Google et Motorola Mobility (avant sa vente par Google à Lenovo). En tant que PDG et directeur opérationnel, il a contribué à l’introduction en bourse de Dropbox. Entre 2019 et 2022, il siégeait au conseil d’administration de ServiceNow. « J’ai 25 ans de carrière dans le secteur des technologies », affirme le CEO de Freshworks auprès du MagIT.

Qui est Freshworks ?

Freshworks a d’abord bâti une solution SaaS de gestion de tickets clients et IT avant de se lancer dans la gestion de la relation client. Son catalogue produit couvre les domaines de la Customer Experience (CX), l’ITSM et le CRM.

Le 1er mai dernier, l’acteur a acquis Device42 pour 230 millions de dollars. Cet éditeur développe une solution de « découverte, de gestion des actifs et de cartographie des dépendances dans les centres de données et le cloud ».

Freshworks CEODennis Woodside,
CEO, Freshworks

« Nous avons trois priorités », résume Dennis Woodside. « La première est notre activité dédiée à l’expérience employé. Le nom du produit est FreshService et il aide les départements informatiques en automatisant leurs opérations et la façon dont ils servent leurs clients internes », ajoute-t-il.

La deuxième priorité de l’éditeur ne serait autre que l’IA. La troisième priorité ? Elle est incarnée dans le produit Freshdesk, consacré au service client.

Ces trois socles ont permis à Freshworks de convaincre près de 70 000 clients dans 120 pays, dont plus de 22 000 rapportent chacun à l’éditeur un revenu récurrent annuel de 5 000 dollars. Au troisième trimestre fiscal 2024, l’éditeur évoquait un socle de 3 000 clients dépensant plus 50 000 dollars dans ses solutions.

Des ambitions en France, aux Pays-Bas et en Allemagne

« Nous avons environ 2 500 clients en France », note Dennis Woodside qui cite la RATP, Carrefour, le Paris Saint-Germain, tandis que Decathlon et Airbus sont référencés dans la présentation des résultats du Q3 2 024 de l’éditeur.

« Mondialement, 45 % de nos revenus proviennent des États-Unis et 40 % de l’Europe. Le Royaume-Uni est notre plus grand marché en dehors des États-Unis, avec environ 13 % de notre chiffre d’affaires, et la France vient juste après. La France est donc un marché important pour nous », assure le CEO de Freshworks.

En 2025, l’éditeur entend d’ailleurs développer son activité dans l’Hexagone, aux Pays-Bas et en Allemagne.

Freshworks a acquis ses lettres de noblesse auprès des PME et des entreprises de taille intermédiaire. Voilà qu’il veut s’étendre auprès de plus grands groupes.

« Nos clients types comptent généralement entre 5 000 et 20 000 employés. Par exemple, des entreprises comme la RATP ou Carrefour Belgique entrent dans cette catégorie ».
Dennis WoodsideCEO, Freshworks

« Nos clients types comptent généralement entre 5 000 et 20 000 employés. Par exemple, des entreprises comme la RATP ou Carrefour Belgique entrent dans cette catégorie », affirme Dennis Woodside. « Ces organisations sont suffisamment importantes pour avoir des besoins avancés en matière d’informatique ou d’assistance à la clientèle et nécessitent des systèmes évolutifs et de qualité professionnelle. Cependant, il ne s’agit pas de géants avec 100 000 employés, où des équipes de 10 personnes ou plus peuvent être dédiées uniquement à la gestion de plateformes comme Salesforce ou ServiceNow ».

Ces entreprises auraient besoin de solutions aux mains de services d’assistance ou d’IT plus petits. « C’est là que nous excellons, car aucune autre solution n’est aussi efficace que les nôtres sur ce créneau », avance le dirigeant.

Les outils de Freshworks seraient plus simples à prendre en main par les agents et les services IT que leurs équivalents du marché. Et au dirigeant de l’éditeur d’assurer que les déploiements peuvent être adaptés aux besoins des DSI.

« Le taux de rotation des agents du service clientèle peut atteindre 30 % chaque année. Il faut constamment former de nouvelles personnes », déclare Dennis Woodside. « Il est donc important que l’interface soit facile à comprendre et à utiliser. C’est resté un de nos principes fondamentaux. Mais derrière cela, notre plateforme a beaucoup de sophistication dans des domaines comme la sécurité, la façon dont nous traitons les données », vante-t-il.

L’IA générative, déjà un vecteur de croissance pour Freshworks

Justement. Au vu des enjeux qui se posent pour cette clientèle, les agents d’IA seraient les bienvenus. « Nous avons trois produits dans le domaine de l’IA », relate le CEO. « L’un d’eux aide les clients finaux à obtenir de meilleures réponses à leurs questions. Le second aide les agents à être plus efficaces dans leur travail. Enfin, un produit appelé AI Insights aide les managers à mieux faire leur travail ».

Chez Freshworks, ils se nomment Freddy. Il y a Freddy AI Agent pour les clients finaux, Freddy Copilot pour les agents et, bientôt, Freddy AI Insights pour les managers.

Ces trois produits sont ou seront infusés dans Freshservice et Freshdesk. S’ils s’appuient sur plusieurs LLM du marché, dont ceux d’OpenAI et de Google, l’éditeur promet que les clients peuvent les personnaliser. Les « agents » internes peuvent être intégrés dans Slack et Teams.

Le tout sert à gérer les questions les plus fréquentes et à automatiser des tâches répétitives, par exemple l’édition de billets d’avion ou le changement de mot de passe.

Ces agents IA, selon Dennis Woodside, seraient également là pour faire gagner du temps aux employés chargés d’effectuer et de trouver des informations dans des bibliographies techniques.

« Dans ces entreprises plus sophistiquées, de nombreux agents humains passent beaucoup de temps à chercher la réponse aux questions plus complexes. Ils doivent consulter des FAQ ou des manuels de produits. Cette étape est supprimée, ce qui permet de gagner du temps. Et nous constatons une amélioration de la productivité d’environ 30 % grâce à l’utilisation de l’IA dans ces situations », affirme-t-il.

Des arguments qui semblent faire mouche. Freshworks enregistrait 1 700 clients payants pour Freddy Copilot et 1100 pour Freddy AI Agent au troisième trimestre fiscal 2024.

« Nous vendons Freddy Copilot dans environ la moitié des nouveaux contrats », allègue Dennis Woodside. « C’est notre produit qui connaît la croissance la plus rapide ».

« Nous constatons donc une forte traction de la part des clients sur l’IA. Elle motive les achats. […] Je pense que cela va continuer parce que les clients ont tout simplement un appétit pour obtenir plus de productivité de leurs équipes ».
Dennis WoodsideCEO, Freshworks.

« Nous constatons donc une forte traction de la part des clients sur l’IA. Elle motive les achats. […] Je pense que cela va continuer parce que les clients ont tout simplement un appétit pour obtenir plus de productivité de leurs équipes et l’IA leur permet d’atteindre ce but », poursuit-il.

L’usage des produits Freshworks propulsés à l’IA générative dépend d’un abonnement supplémentaire par siège.

« Le tarif catalogue est fixé à 29 euros par poste et par mois, en supplément de la licence du produit principal », détaille le CEO. « Le marché semble accepter ces deux niveaux de tarification », ajoute-t-il. « Les clients raisonnent souvent en termes de coût pour résoudre un problème. Une mesure clé est le coût par résolution : ils calculent cela en divisant le coût de l’agent (et les frais associés) par le nombre de tickets résolus. Ils obtiennent ainsi un coût par ticket ».

Les tarifs des produits « cœur » de Freshworks vont de 15 euros par siège par mois à près de 100 euros par siège par mois.

« Nos prix sont en moyenne inférieurs à ceux de Salesforce et de ServiceNow, mais notre modèle tarifaire est cohérent avec le leur », observe Dennis Woodside.

Un adversaire de Zoho

Le dirigeant de Freshworks ne mentionne pas un autre concurrent sur le volet du CRM : Zoho. Un adversaire plutôt. En 2020, Zoho a accusé Freshworks de détournement de secrets commerciaux, un différend réglé par un accord en 2021. Freshworks a reconnu qu’un ancien employé avait utilisé des données confidentielles de Zoho de manière illicite, sans l’approbation de l’entreprise. Par ailleurs, Shridar Vembu, fondateur de Zoho, a critiqué le licenciement de 13 % du personnel de Freshworks dévoilé par Reuters en novembre 2024 au vu de sa santé financière. Freshworks a enregistré une hausse de 22 % de son chiffre d’affaires au troisième trimestre fiscal 2024, atteignant 186,6 millions de dollars. Ses pertes nettes étaient de 29 millions, mais sa trésorerie totale s’élevait à 1,05 milliard de dollars au 30 septembre dernier.

Pour approfondir sur ITSM, Case Management, Enterprise Service Management