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2025, année de l’IA et de l’Europe pour Numeum
Plaidant en préambule pour une stabilité politique retrouvée, la présidente de Numeum, Véronique Torner, a profité de ses vœux 2025 pour rappeler les priorités du patronat français du numérique : l’IA, la fédération de l’écosystème, et l’action à l’échelon européen.
« Le secteur a bien morflé l’année dernière. Et cela va continuer quelques mois ». Avant l’ouverture de la soirée des vœux 2025 de Numeum, un dirigeant du secteur du numérique confiait ainsi au MagIT ses sentiments quant à la situation de l’industrie, en faisant référence au net ralentissement enregistré par les acteurs du conseil et de l’édition logicielle.
Contrairement à ses précédentes prises de parole, la présidente du syndicat patronal, Véronique Torner, a fait le choix dans son discours de ne pas égrener les difficultés du moment.
Une année de bouleversements et une fragilité sous-estimée
Son premier vœu fut un appel pour une « année 2025 placée sous le signe de la stabilité politique ». Un souhait accueilli par l’audience par quelques rires, et pas mal de doutes. Le plaidoyer en faveur de l’innovation et de la croissance responsable a suscité, lui, plus d’adhésion.
Alors que s’ouvre 2025, Véronique Torner a qualifié la période écoulée « d’année de bouleversements ». Et les chocs vont continuer de se propager, prévient-elle, en référence au « contexte géopolitique nouveau, en particulier dans la tech avec l’élection de Donald Trump. »
Ce changement est source « d’impacts à venir » pour le secteur. Pour l’illustrer, la présidente de Numeum cite par exemple l’officialisation du projet Stargate par les États-Unis. Doté d’un budget de 500 milliards de dollars, il vise à « investir massivement dans l’IA. »
Les séismes émanent aussi de la Chine. Au sein de Numeum, le cas DeepSeek n’est pas passé inaperçu non plus. La startup chinoise, « avec son modèle open source [N.D.R. : il ne l’est pas, il est open weight] et son coût [N.D.R. : à modérer en inférence], bouscule les acteurs établis qui semblaient pourtant indétrônables. »
Des cahots, le patronat en attend aussi en provenance du climat économique international et français. Cette situation a pour effet de fragiliser la capacité des entreprises à anticiper et à planifier leurs investissements. « Et cela reste encore trop souvent sous-estimé », estime Véronique Torner.
Ne pas sacrifier notre économie sur l’autel du court terme
Numeum se veut vigilant et attaché à la préservation des dispositifs budgétaires tels que le CIR (Crédit Impôt Recherche). « L’avenir de notre économie ne peut être sacrifié sur l’autel du court terme », exhorte sa présidente, tout en reconnaissant la complexité des arbitrages budgétaires.

Pour assister (guider ?) les décisions politiques, le syndicat met en avant « son travail de pédagogie » auprès des gouvernants. Sa méthode ? Informer sur « les signaux du ralentissement économique » afin de pousser « à une mobilisation collective. »
« Préserver l’avenir de notre économie, c’est continuer à investir dans notre innovation », plaide la patronne de Numeum.
Mais le lobbying politique, souvent aux côtés du Medef, ne constitue pas le seul domaine d’action de l’organisation.
Dans le bilan 2024 dressé par Véronique Torner, elle rappelle ainsi les trois priorités poursuivies sur la période, à savoir les régions, les compétences et le numérique responsable. En 2024, l’organisation a ainsi circulé sur tout le territoire dans le cadre de son « Numeum Tour » et du « Tour de France de l’IA ».
Les vingt étapes du Tour « ont été l’opportunité de mettre en lumière le dynamisme et l’appropriation des outils de l’intelligence artificielle par les entreprises, ainsi que les initiatives pour développer les nouvelles compétences attendues. »
2025 placée sous le signe de l’action pour l’IA
Par ce parcours, Numeum a posé des fondations en préparation du Sommet de l’IA des 10 et 11 février, et dont le syndicat patronal est partenaire auprès du gouvernement et de l’Élysée. 2024 déborde en 2025 puisque l’IA constitue l’une des trois priorités définies par la nouvelle équipe de direction.
« 2025 sera une année placée sous le signe de l’action pour l’IA », insiste Véronique Torner. Il est vrai qu’il reste beaucoup à faire pour transformer en réalité l’ambition de la Commission européenne : atteindre 75 % d’entreprises utilisatrices de l’IA d’ici 2030.
En France, elles ne seraient que 6 % – estime la dirigeante en s’appuyant sur les chiffres Eurostat de 2023. « On sait que cela a accéléré en 2024, mais nous sommes encore loin du compte des 75 %. Le défi est immense. »
Numeum attend, par conséquent, du prochain Sommet pour l’IA qu’il débouche sur « des actions concrètes. » Le risque, sinon, serait celui d’un « décrochage massif de la France et de l’Europe face aux États-Unis, à l’Inde et à la Chine. »
« Plus que jamais, nous devons nous mobiliser pour rester dans la course technologique », exhorte Véronique Torner. Le patronat français du numérique se dit en tout cas prêt à apporter sa contribution. D’ailleurs, il a déjà commencé avec un guide de mise en œuvre de l’AI Act, co-réalisé avec le Cigref, et de son guide sur l’IA éthique.
Une équipe de France du numérique à Bruxelles
En 2025, Numeum entend également jouer aux avant-postes pour fédérer l’écosystème numérique français via des actions communes et pour faire entendre sa voix auprès des instances européennes. L’équipe de France du numérique se consolide déjà.
Cette « réalité », Véronique Torner ambitionne de « l’amplifier. » La fédération est selon elle une nécessité. « Notre écosystème est très dynamique, mais très dispersé, voire dans certains cas atomisé », déclare-t-elle en référence aux 40 associations composant le paysage français.
« Notre filière numérique doit être unie par son ambition et par ses actions en une équipe forte de ses diversités. Elle doit être visible pour parler d’une seule voix », assure Véronique Torner. Cette ambition sera reprise et soutenue plus tard dans la soirée par la secrétaire d’État Clara Chappaz – avec la diffusion d’une vidéo enregistrée.
Un espace numérique partagé
Pour traduire cette volonté d’union, Numeum annonce l’ouverture d’un espace numérique partagé, à l’image de la plateforme Planet Tech'Care dans le domaine du numérique responsable. Afin de peser, les associations sont appelées à collaborer, en particulier à l’échelon européen.
C’est à cet échelon que le patronat prévoit de renforcer sa présence et ses actions. À Bruxelles, Numeum se fixe comme objectifs de peser en faveur « de la simplification réglementaire », de contribuer à la mise en œuvre du plan Draghi sur la compétitivité, et enfin de faire rayonner la France.
« Nous pourrons d’autant mieux réussir cette mission si nous sommes rassemblés au sein d’une équipe de France forte et emblématique », martèle Véronique Torner. Et Numeum est prêt à jouer les sélectionneurs.