« Il faut rapprocher l’IA de la Data, pas l’inverse » (Oracle)

Oracle infuse l’IA sur l’ensemble de ses offres. Il propose 200 cas d’usage dans ses applications SaaS, et 50 « IA agentiques ». Le tout avec un business model plutôt étonnant : la gratuité.

Lors de la présentation des résultats du troisième trimestre 2025, le fondateur et CTO d’Oracle, Larry Ellison a annoncé l’accélération de sa stratégie cloud, avec un doublement de la capacité de ses datacenters en 2025. Oracle revendique 176 datacenters dans le monde – en production ou planifiés. La consommation de puissance GPU a crû de 244 % sur le cloud Oracle lors des derniers mois, chiffre le CEO qui ne compte pas laisser ce moteur de croissance à AWS, Google ou Microsoft.

Une nouvelle plateforme dédiée à l’IA

Autre annonce de Larry Ellison, le lancement d’Oracle AI Data Platform.

« Nous n’avons pas de LLM et n’avons aucune intention d’entraîner nos propres LLM. »
Neil SholayV-P Oracle AI Business Value EMEA

Cette plateforme s’appuie sur Oracle Database 23ai avec une intégration aux LLM (grands modèles de langage) d’OpenAI, xAI et Meta. Une nouvelle offre, alors que comme le souligne Neil Sholay, VP Oracle AI Business Value EMEA, la stratégie d’Oracle est quelque peu différente de celle de ses concurrents.

« Nous n’avons pas de LLM et n’avons aucune intention d’entraîner nos propres LLM », confie-t-il au MagIT lors de son passage à Paris. « Nous voulons rester neutres sur ce plan. Nous pensons qu’il est important de rendre disponibles les données aux LLM, mais il est aussi important de laisser le choix des modèles à nos clients. Et nous ne pensons pas qu’un LLM unique pourra répondre à tous les besoins. »

Un AWS, qui avait une position comparable, est revenu sur sa stratégie et commence à livrer ses propres LLM, en compléments des solutions du marché.

Les clients d’Oracle peuvent donc choisir le LLM adapté à chacun de leurs usages. La direction d’Oracle estime d’ailleurs que la plupart des entreprises vont exploiter plusieurs LLM à l’avenir.

L’autre différence martelée par Oracle, par rapport à ses concurrents hyperscalers, est d’être un éditeur de logiciels d’applications métiers en mode SaaS (ce qui est également le cas dans une moindre mesure de Microsoft). L’éditeur propose donc de l’IA sur l’ensemble de sa stack, du IaaS jusqu’à ces applications.

« Nous considérons que l’IA doit être infusée dans l’intégralité de notre plateforme. Que ce soit dans l’infrastructure, le stockage, ou dans la base de données », confirme Neil Sholay. « L’IA est embarquée dans notre base de données depuis 6 ans. Nous proposons des services IA pour la vision, le chat, etc. »

L’IA générative du SIRH Oracle peut par exemple rédiger une description de poste, la publier, puis rassembler les CV reçus, répondre aux candidats, leur suggérer des postes à pourvoir et proposer les candidatures au recruteur. Oracle travaillerait même sur un avatar capable de mener les entretiens… une perspective que certains jugeront plutôt effrayante et qui reste dans les cartons. Pour l’instant.

200 IA en production dans les applications SaaS Oracle

L’éditeur propose actuellement de l’ordre de 200 tâches IA et des agents qui sont intégrés nativement dans les workflows de ses applications SaaS.

« Toutes nos applications ont des fonctionnalités IA. Certaines plus que d’autres. Le domaine RH s’y prête bien (63 cas d’usage portent sur les RH contre 10 à 15 sur l’ERP) » précise Neil Sholay. « Nous avons pré-entraîné des modèles fournis par Cohere pour ces tâches précises, mis en place les garde-fous (Guardrails) adaptés, réalisé les intégrations avec les sources de données et rédigé les prompts. »

Le VP pointe le fait que tous les clients qui ont des licences SaaS peuvent utiliser ces IA sans coût additionnel. Un différenciant marketing assez unique.

Le second volet de la stratégie d’Oracle porte sur la matière première de l’IA : la donnée.

L’éditeur a la capacité de stocker tous types de données – structurées, non structurées, vectorielles – et embarque l’IA dans sa base. Mais Neil Sholay prévient : « nous n’entraînons jamais nos IA sur les données de nos clients. Mais nous les encourageons à intégrer leurs propres données pour alimenter leurs IA ».

« Cela n’implique pas de déplacer les données pour mener cet entraînement », continue le responsable. « Notre approche est d’amener l’IA à la donnée et pas l’inverse. C’est une approche qui nous est propre et qui a des bénéfices en termes de sécurité, d’exactitude, de performances et de coûts », avance-t-il.

Oracle va accélérer sur l’IA agentique

La plateforme AI Data Platform a été un premier élément de réponse d’Oracle sur l’IA. Aujourd’hui, l’éditeur planche sur le nouveau buzzword du moment, l’IA agentique.

Neil Sholay définit une IA agentique comme un agent capable de réaliser un traitement complet comptant plusieurs étapes. À l’écoute en permanence, l’agent comprend le contexte du processus et peut détecter une variation.

« À la réception d’une commande d’achat, l’agent peut constater que ce type de demande est généralement routé vers telle équipe. L’agent peut prendre cette décision de manière dynamique. »
Neil SholayV-P Oracle AI Business Value EMEA

« Il peut accomplir sa tâche de manière autonome, potentiellement sans humain dans la boucle. À la réception d’une commande d’achat, l’agent peut constater que ce type de demande est généralement routé vers telle équipe. L’agent peut prendre cette décision de manière dynamique. Cette capacité à apprendre est très différente de ce qu’un workflow classique peut accomplir. »

Sur les 200 fonctions d’IA des solutions SaaS Oracle, une cinquantaine d’entre elles sont des agents. Plusieurs centaines de clients Oracle les exploiteraient déjà.

Chaque trimestre, Oracle livre de nouveaux agents en fonction de la feuille de route de chacun de ses progiciels. De leur côté, les clients et les intégrateurs peuvent développer leurs agents en exploitant les données disponibles sur Oracle et en les recoupant avec des données externes.

Les développeurs IA peuvent donc déjà piocher dans un catalogue de services PaaS de l’éditeur. Mais dans quelques semaines, Oracle pourrait bien dévoiler une nouvelle offre pour répondre aux clients qui souhaiteraient, vivement, pouvoir créer plus simplement leurs propres agents IA..

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