
Clouds souverains : la timide communication de SAP
Malgré un climat géopolitique de plus en plus tendu, les responsables de SAP communiquent encore à demi-mot sur la disponibilité des logiciels de l’éditeur dans ses propres infrastructures en Europe, sur les clouds souverains et bientôt de confiance (SecNumCloud).
Lors du keynote d’ouverture de Sapphire 2025, SAP a très succinctement annoncé la disponibilité prochaine de son « IA Foundation » sur ses propres data centers européens.
Selon Philipp Herzig, CTO de SAP, au troisième trimestre 2025, certains data centers gérés par SAP, principalement en Allemagne (dont ceux installés à Waldorf), bénéficieront de clusters GPU pour exécuter les modèles IA de Mistral AI et les solutions GenAI ou les LLM fine-tunés d’Aleph Alpha.
Oui, l’éditeur ne l’a pas souvent rappelé par le passé. Pourtant, Christian Klein, PDG de SAP, répond lors d’une conférence de presse que l’éditeur allemand possède toujours « ses propres centres de données ». « Nous avons près de 50 centres de données, dont 20 en Europe. Vous pouvez donc avoir SAP de bout en bout », avance-t-il.
SAP est une société de droit européen. Ses infrastructures gérées par ses entités européennes sont donc peu exposées aux lois extraterritoriales.
Toujours plus de solutions souveraines et bientôt de « confiance »
« Tout le personnel est habilité d’un point de vue de la sécurité », ajoute Philipp Herzig. « Toute la pile est construite et gérée par SAP. Nous proposerons également l’IA, mais pas encore de manière totalement souveraine selon les lignes directrices de la BSI ».
En clair, SAP n’a pas fait qualifier la sécurité de ses data centers européens par l’homologue allemand de l’ANSSI. « C’est pour cela que nous avons le cloud Delos en Allemagne, en partenariat avec Arvato Systems, et que nous participons au projet Bleu en France », rappelle le CTO. Ces deux offres d’infrastructure ne sont actuellement pas disponibles.
Néanmoins, Philipp Herzig estime que depuis ses propres data centers SAP peut servir 80 % des cas d’usage des entreprises de secteurs réglementés, tels le secteur public ou la santé, pour ne citer que ces deux-là. Certains clients, comme le groupe Salins en France, ont fait expressément le choix d’un hébergement géré par SAP. Même S/4HANA Public Cloud Edition y est accessible.
Christian Klein a également rappelé le partenariat avec T-Systems en Allemagne, mais a aussi confirmé un accord avec Schwarz digits, une filiale du propriétaire de Lidl, responsable du cloud STACKIT.
Schwarz digits entend proposer une alternative sérieuse à AWS, GCP et Azure, et entrer dans le programme Rise with SAP.
« Lorsqu’un partenaire comme Schwarz décide maintenant de devenir un hyperscaler, nous vous donnons également le choix si vous voulez avoir un partenaire local en Allemagne, peut-être pour vos charges de travail allemandes ou européennes », avance le PDG de SAP.
Pour autant, pas question de délaisser les partenaires cloud américains.
« Nous pouvons aussi nous assurer, même avec les hyperscalers américains, que les données restent en Europe et que seuls des citoyens européens manipulent les données », rappelle-t-il. « Nous veillons à offrir à nos clients l’offre EU Access afin qu’ils soient protégés contre l’accès de personnes d’autres régions du monde aujourd’hui. SAP offre un large choix en matière de confidentialité des données ». Protéger contre les accès de citoyens américains, certes, mais pas contre les lois extraterritoriales.
« Temps d’incertitude » : un partenariat renforcé avec Alibaba en Chine
Étrangement, Christian Klein n’a pas entamé le keynote d’ouverture de Sapphire 2025 à Madrid en rappelant l’existence de ces multiples options en ces temps « d’incertitude » économique. Non. Au cours des cinq premières minutes de la session, il a dévoilé un renforcement du partenariat entre SAP et Alibaba, le géant du cloud chinois, qui lui-même prépare sa migration vers Rise With SAP.
« Alibaba deviendra un partenaire certifié pour Rise et Grow with SAP en Chine », a-t-il déclaré. Une initiative d’abord réservée au marché chinois et qui sera étendue en Asie du Sud-Est, au Moyen-Orient et en Afrique. Les entreprises déployant les solutions SAP en Chine sur Alibaba auront potentiellement accès aux LLM d’Alibaba (Qwen). Christian Klein a rappelé l’existence d’un partenariat avec DeepSeek localisé en Chine.
« La géopolitique, c’est un sujet important », assure le PDG de SAP lors du point presse. « C’est pourquoi nous nous engageons pleinement à localiser notre technologie et à établir des partenariats avec des entreprises chinoises afin de permettre à nos clients de mener leurs activités en ces temps incertains ».
Pour rappel, Alibaba a comme clients de grands groupes européens qui utilisent ses services afin de gérer une partie de leurs activités en Chine et en Asie. Dont LVMH.