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Automatisation métier : Hunch enchaîne les chatbots avec des flèches

Misant sur une interface la plus intuitive possible, la startup propose un outil d’automatisation qui, pour une fois, n’a rien à voir avec les processus techniques. Ses cas d’usage sont dans le marketing, la rédaction, l’analyse de marché.

Automatiser le travail intellectuel comme on automatise des processus sur les chaînes de production. Telle est la proposition de la startup Hunch, qui entend réinventer le RPA (automatisation robotisée des processus). Sur l’interface de son application SaaS, on enchaîne visuellement des tâches à accomplir qui ne sont plus des actions préprogrammées, mais autant de fenêtres de chatbots dans lesquelles l’utilisateur décrit ce qu’il veut faire, en langage courant.

Et il n’a pas à réécrire sa description à chaque fois : les tâches sont sauvegardées et réutilisables pour automatiser d’autres travaux. Une sorte d’implémentation excessivement concrète des promesses de l’IA agentique.

« Depuis 40 ans, le RPA n’a rien fait de significatif pour le travail intellectuel quotidien : passer des données d’un système à un autre, faire des copiés-collés, formater, répéter des gestes standards... Les IA ont ouvert une brèche, mais les usages courants, à base de prompts, de no-code sont peu utilisables et cloisonnés. Hunch automatise plutôt tous les mécanismes sous forme de canvas réutilisables et même partageables au sein des équipes » explique David Wilson, le PDG de la startup, que LeMagIt a rencontrée à l’occasion d’un événement IT Press Tour en juin.

Il donne en exemple des déploiements qui illustrent la polyvalence de la solution comparativement aux outils sectoriels qui nécessitent des développements spécifiques.

Dans le marketing digital, une agence de communication a déployé 3 000 tâches Hunch pour surveiller les prix de 500 marques concurrentes et générer des rapports personnalisés pour chaque client. Résultat : une réduction de 80% du temps de veille concurrentielle. « C’est le type de dossier qu’Accenture aurait mis des semaines à produire. Hunch le fait en une matinée », argumente David Wilson.

Autre exemple, un fabricant automobile utilise Hunch pour automatiser le traitement des réclamations clients. Le système analyse les emails, catégorise les problèmes et génère même des bons de retour le cas échéant. Le gain mesuré est l’économie de quatre heures de traitement manuel par jour.

Assembler visuellement des chatbots

L’interface du logiciel se présente comme un tableau blanc sur lequel on colle des éléments que l’on relie avec des flèches. Par exemple, on place un premier document à partir duquel il faut travailler : la retranscription d’un échange, une étude, une liste de sites web, une vidéo. De celui-ci on tire une ligne vers une première tâche à accomplir, présentée comme la fenêtre volante d’un chatbot dans lequel on écrit un court prompt. Il s’agira classiquement de demander l’extraction des points clés, de commander un résumé, de faire vérifier des informations.

La réponse sous forme de texte brut est nulle ? Ce n’est pas un souci. On colle en amont une nouvelle fenêtre de chatbot dans laquelle on fournit une présentation type, puis on la relie à celle de notre premier résultat. Immédiatement, il se met en page selon les indications.

Puis on tire une nouvelle flèche vers une deuxième tâche, qui partira du résultat précédent pour en faire quelque chose, pour approfondir la recherche, ou pour déclencher une action. Hunch revendique 200 connecteurs vers d’autres logiciels. Il s’agit principalement de publier des résultats vers des canaux de communication d’un outil collaboratif (Teams, Slack...), d’exécuter des scripts Python qui lanceront des applications avec les données générées, de faire passer ces données à un service comme Zapier pour qu’il les intègre à un autre service web, ou tout simplement de demander à une IA de générer quelque chose.

Et on enchaîne ainsi les tâches les unes après les autres, jusqu’à la production finale du travail : un rapport, un flyer, etc.

Pour les plus profanes des utilisateurs, Hunch propose l’interface Overclock. Il s’agit d’une surcouche qui masque toute la composition par blocs et propose juste un chatbot dans lequel l’utilisateur décrit le résultat qu’il souhaite obtenir. L’outil propose une procédure, l’exécute et la modifie selon les retours. La même logique agentique reste à l’œuvre, mais l’interface masque la complexité. L’utilisateur ne manipule ni les modèles ni les blocs. Il utilise un espace de conversation guidé, avec historique, corrections, ajustements.

Sous le capot, Hunch repose sur un algorithme baptisé Auto AI qui aurait le mérite d’aller faire travailler l’IA la plus adaptée au contexte. Hunch interroge des services d’IA en ligne qu’il refacture sous la forme de packs de crédits de 50 dollars utilisables jusqu’à épuisement (c’est-à-dire sans date limite de consommation) et renouvelables ensuite.

David Wilson promet de ne prélever qu’une faible marge sur les tokens que les services d’IA facturent à Hunch. Selon lui, un seul pack de crédit de 50 dollars par mois permettrait d’accomplir des automatisations assez intensives.  A noter que la consommation des tokens est transparente : elle est indiquée dans l’interface. Le logiciel permet aussi à l’utilisateur de choisir une IA alternative s’il constate qu’elle serait plus rentable.

Le système gère les droits d’accès, le cloisonnement par équipe et ne conserve aucun des documents ajoutés par l’utilisateur lors d’une automatisation.

Vers une marketplace collaborative et une meilleure intégration avec les ERP

L’équipe derrière cette solution est en fait celle précédemment à la tête de Cape Networks, une startup spécialisée dans le monitoring réseau et qui a été acquise en 2018 par Aruba, division de HPE. Hunch n’a plus rien à voir avec Cape Networks, mais David Wilson explique que la philosophie est la même : les entreprises ont besoin de comprendre ce qu’il se passe ou ce qu’elles font, pas de subir des alertes ou des modules préformatés.

Parmi les évolutions à attendre, David Wilson reconnaît qu’il manque actuellement à Hunch des moyens d’interagir avec les ERP des entreprises. Il promet que des intégrations avec SAP et Oracle seront proposées avant la fin de l’année.

La dépendance de Hunch aux API des modèles d'IA constitue un autre sujet de développement. Une indisponibilité d'OpenAI ou d'Anthropic, par exemple, pourrait en effet paralyser les processus automatisés. Hunch planche donc actuellement sur un système de basculement automatique qui mitigera ce risque.

La feuille de route 2025 de Hunch intègre aussi l'automatisation prédictive. Les agents apprendront à anticiper les besoins des utilisateurs en analysant les patterns d'usage. Cette évolution transformerait l'outil en assistant proactif, franchissant une étape supplémentaire dans l'automatisation cognitive.

La startup prépare également une marketplace d'agents pré-configurés, qui permettrait aux utilisateurs de partager les tâches d’automatisations qu’ils ont configurées. David Wilson veut croire que cette approche collaborative accélérera l'adoption de sa solution et enrichira son écosystème.

Selon Gartner, 65% des entreprises prévoient d'adopter des solutions d'automatisation low-code d'ici à 2026, contre 35% actuellement. Hunch s'inscrit dans cette tendance avec une proposition qu’il veut la plus accessible possible. Le marché sur lequel il commercialise son produit, l'automatisation robotisée des processus, a été évalué à 20 milliards de dollars en 2024.

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