CCaS, PBX, cloud hybride, PME : les plans de Zoom en Europe

Dans la région EMEA, Zoom entend croître en convainquant davantage de PME. Il espère également bénéficier de la migration des technologies PBX et de centre de contact vers sa plateforme cloud tout en prenant en compte la montée des tensions géopolitiques.

En marge de Zoomtopia, Steve Rafferty, Head of International chez Zoom, n’a cessé de répéter que l’entreprise ne voulait pas se retrouver en concurrence frontale avec Microsoft. Dans les grands groupes, il prône une approche « best of breed ».

« Nous nous substituons à Teams ou nous le complétons parfaitement avec notre système téléphonique et notre centre de contact », déclare-t-il. « Dans un monde idéal, nous remplacerions tout le monde, mais il faut rester réaliste. Tout dépend de ce que veut le client ».

En revanche, auprès des indépendants, des PME et des ETI, il considère que les solutions de l’éditeur d’outils de collaboration ont toute leur chance.

Et c’est cette chance qu’il compte bien provoquer dans la région EMEA.

Les PME européennes, prochain relais de croissance pour Zoom

« Lorsque vous examinez notre clientèle, vous constatez que nous avons une base considérable de groupes internationaux, d’entreprises et d’organismes publics. Nous essayons donc de répondre à tous les besoins », affirme-t-il. « Nous voyons une opportunité dans les PME et le marché intermédiaire pour vraiment accélérer cette croissance ».

En langage familier, l’on pourrait écrire que l’éditeur « ratisse large ». Les représentants britanniques de la société assurent que les solutions de Zoom sont autant ajustées aux « solopreneurs » (autoentrepreneur) qu’aux grands groupes.

Selon Monique Koster, head of Small Business EMEA chez Zoom, il s’agit plus spécifiquement de cibler « des entreprises de moins de 50 salariés ». L’équipe de 17 personnes dirigée par Monique Koster est basée à Amsterdam. Elle couvre 11 pays dans 9 langues différentes.

« Nous disposons de capacités d’entreprise à des tarifs adaptés aux petites entreprises » vante Monique Koster. « Cela est particulièrement important pour les PME, car elles souhaitent se professionnaliser et développer leur activité. Nous les aidons également en leur fournissant des services localisés ».

Ici, la responsable évoque Zoom Workplace et Zoom Phone. L’attention portée aux « solopreneurs » n’est pas anodine. Elle décline d’une volonté de convertir des usagers du forfait gratuit vers des formules payantes lorsque leur entreprise grandit, mais aussi d’initier leurs contacts à « l’expérience Zoom ».

Aux PME, l’éditeur propose le forfait Pro : 12,49 euros HT par utilisateur par mois (jusqu’à 99 sièges, paiement annuel). Celui-ci inclut 10 Go de stockage par siège, Docs, Clips plus, une boîte mail et un calendrier, AI Companion, le Hub Zoom, ou encore l’automatisation des flux. Des extensions pour des services non compris dans l’offre de base peuvent être achetées.

À titre de comparaison, les offres Microsoft 365 Business Basic et Standard sont facturées 5,60 euros par usager par mois et 11,70 euros par mois, Teams inclus. Les offres Business Starter et Standard de Google Workspace coûtent 6,80 euros et 13,60 euros par mois.

Financièrement, Zoom n’est, a priori, pas à son avantage pour convaincre les PME. L’entreprise compte « redoubler d’efforts » pour favoriser l’adoption de ses outils, s’intégrer avec un plus grand nombre de logiciels présents dans ces organisations et y infuser l’IA.

Les acquisitions de ces « petits » clients se font majoritairement en direct. « En général, si des clients viennent nous voir ou si nous les contactons, nous prenons toujours le temps de leur montrer ce que la plateforme offre spécifiquement aux PME », avance Monique Koster.

Convaincre les grands groupes d’adopter Zoom Contact Center et le cloud

Les partenaires seraient toutefois formés pour cibler cette clientèle. De fait, Zoom attribue 40 % de ses revenus aux intégrateurs et revendeurs. Comme l’a déjà évoqué LeMagIT, ceux-là sont davantage sollicités pour aider les grands comptes et les ETI à migrer des solutions PBX et de centre de contacts existantes vers Zoom Phone et Contact Center.

C’est ce que le groupe cherche à faire au Royaume-Uni, en Irlande, dans les pays du Benelux, en Allemagne et en France.

En France, selon Steve Rafferty, l’activité PBX de Zoom est « très forte, puisque c’est une solution mûre », lancée en 2018. Désormais, il s’agit de convaincre davantage d’entreprises de choisir Zoom Contact Center. Cegedim aurait déjà sélectionné cette offre.

Zoom entend non seulement favoriser les migrations de solutions tierces on premise vers sa plateforme, mais également des CCaaS de « premières générations qui n’ont pas vraiment évolué ».

« Pour cela, nous travaillons avec des partenaires. Nous signons des contrats avec des infogéreurs, des prestataires régionaux qui entretiennent des relations étroites et approfondies avec nos clients », précise-t-il. D’où la refonte du programme de partenariat.

« J’ai travaillé sur le marché français pendant plusieurs années. Il faut que cela ait un caractère local, vous ne voulez pas que quelqu’un vienne du Royaume-Uni pour discuter en anglais », poursuit le dirigeant. « Vous avez vraiment besoin de cette connaissance locale et de tous les détails concernant les nombreuses lois en matière de gestion de données et du droit du travail ».

Tensions géopolitiques : Zoom Node gagne en traction

Pour les entreprises européennes aux activités les plus sensibles, Zoom ne s’arrête pas au chiffrement de bout en bout et au « bring your own key ». L’éditeur vante les capacités de Zoom Node, une solution de cloud hybride présentée en 2023.

« Nous offrons le meilleur des deux mondes : le cloud et les solutions sur site. Nous proposons ainsi une sécurité renforcée, du chiffrement et des services destinés aux administrations publiques », assure Steve Rafferty. « Cela permet enfin aux entreprises de se passer de Skype et d’autres produits plus anciens déployés depuis 20 ans ».

Node serait en cours de déploiement à grande échelle en Europe « pour répondre à des cas d’usage limites très spécifiques », ajoute-t-il. Plus précisément, cette solution « modulaire » est compatible avec Meetings, Recording, Team Chat ou encore un connecteur pour salles de conférences.

Zoom demeure un acteur américain. Si Node doit offrir davantage de contrôle sur la protection des données, certaines informations (par exemple la facturation) continuent d’être transférées vers les États-Unis, reconnaît Drew Smith, responsable des relations gouvernementales Royaume-Uni et Irlande chez Zoom.

Questionné par LeMagIT au sujet des demandes des clients en matière de solutions souveraines et isolées du cloud, Jim Butler, head of EMEA Growth Markets chez Zoom, déclare que l’entreprise en récolte de plus en plus.

« Nous avons reçu un certain nombre de demandes concernant les solutions de séparation physique, et c’est quelque chose que nous étudions actuellement », indique-t-il. « C’est un sujet très difficile à traiter pour un éditeur SaaS, comme vous pouvez l’imaginer », souligne-t-il. « Je ne peux donc pas m’engager au nom de Zoom sur la création d’une solution “air-gapped” ».

Au vu de cette difficulté, Zoom préfère proposer des « solutions intermédiaires », couvrant des périmètres restreints de son offre. « Si l’on considère les enjeux géopolitiques, les clients et les partenaires réclament davantage de résilience et de capacités de survie », affirme Jim Butler. « Nous avons lancé des options en ce sens ».

Zoom Phone Local Survivability (ZPLS) est un module de Zoom Node octroyant une « fonctionnalité de basculement, de connectivité et de résilience en cas d’interruption d’Internet ou du service », dixit la documentation de l’éditeur.

Cette solution permet de conserver des fonctions de base comme les appels en interne. En déployant le module (ZPLS) sur différents sites, cela maintient les communications entre plusieurs bureaux. Il faut en revanche que les réseaux locaux ne soient pas impactés par la panne. Une fois le problème terminé, le module se reconnecte automatiquement à Zoom Cloud.

Enfin, l’éditeur propose depuis 2020 Meeting et Recording Connector. Meeting Connector « offre l’infrastructure et l’architecture de réunion Zoom exclusivement au sein de vos centres de données, sans possibilité de repli vers le cloud ni de support ». Recording Connector permet d’enregistrer les meetings opérés via Zoom Meeting Connector sur site, sans passer par le cloud ou un stockage sur les ordinateurs des utilisateurs.

Cette deuxième option semble peu connue. Selon les retours des administrateurs qui l’ont déployée, la configuration n’est pas documentée en détail (ou réclame l’intervention d’un technicien Zoom) et demande des serveurs bien dotés en CPU et en RAM.

Crédit Photo : Gaétan Raoul pour LeMagIT

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