John Bates, Progress Software : “hier secondaire, le BPM est devenu un must-have”

Le nouveau directeur technique de Progress Software, John Bates, s’explique sur l’acquisition de Savvion. Un rachat qui a ouvert la porte du marché du BPM au groupe. Il nous livre ses ambitions en matière d’intégration et son souhait de faire converger BPM, analyse décisionnelle et CEP pour se rapprocher toujours plus près du métier.

LeMagIT : Qu'amène l'acquisition de Savvion (annoncée le 11 janvier) à l’écosystème de Progress Software ?

John Bates : Nous cherchions depuis un certain temps à entrer sur le marché du BPM. Et Savvion était la société la plus adaptée pour Progress. Une des raisons pour lesquelles nous l’avons sélectionnée est que Savvion possédait une des meilleures offres du marché du BPM, notamment pour ses possibilités très orientées entreprise. Auparavant, nous étions partenaires de Lombardi, mais nous l’avons rejeté comme cible potentielle à cause de leur offre trop spécifique, trop liée aux départements des entreprises. C'est d'ailleurs ainsi qu'IBM les a présentés après les avoir rachetés.

Nous recherchions de notre côté une solution résolument plus globale. Savvion ne proposait pas seulement des fonctions d’orchestration entre systèmes, mais également des outils orientés utilisateur et des fonctions de BPM orientées document. Outre des outils permettant de contrôler les processus via des événements, Savvion intègre également des modules d’analyse décisionnelle dans sa plate-forme de BPM ainsi qu’un moteur de règle. Nous croyons dans ce besoin de convergence, non seulement entre systèmes, mais également entre les BPM orientés document et le décisionnel associé à des règles. Avec l'objectif de former un tout au sein de processus.

LeMagIT : Pourquoi Progress est-il entré sur le marché du BPM ?

J.B. : Nous travaillons étroitement avec nos clients. J’ai pour ma part dirigé une division de Progress dédié au CEP (Complex Event Processing). Nous avons decellé chez nos clients des besoins de convergence. Premièrement, ils souhaitaient avoir davantage de visibilité sur leurs activités, sur le niveau d’efficacité de leur business, sur les moyens dont ils disposaient pour améliorer leur processus métier, et sur comment détecter les goulots d'étranglement dans leurs processus. Deuxio, grâce à des technologies comme le CEP, ils voulaient détecter rapidement les opportunités au sein de leurs activités et pouvoir y répondre. Enfin, nous avons vu que nos clients voulaient intégrer ces fonctions dans la gestion de leur processus métier. Pas en tant que BPM seul, mais davantage au sein d’une offre BPM capable de modifier les processus en fonction des événements détectés. Pour rendre les processus métier hautement réactifs, dynamiques et prévisibles. Nous avons ainsi compris le besoin de posséder une offre BPM, parce que nous voulions l’intégrer à nos autres produits et créer une proposition de réactivité opérationnelle. Nous ne voulions pas simplement sauter dans la locomotive du BPM.

LeMagIT : Les besoins en BPM ne sont pas nouveaux. Pourquoi estimez-vous que les entreprises sont désormais prêtes pour le BPM ?

J.B. : Dans certaines industries, le BPM est effectivement une volonté de longue date. Les services financiers, par exemple, l’ont intégré depuis longtemps pour rendre leur système de transactions plus réactif. Nous  travaillons nous-même avec cette industrie depuis longtemps. Sur d’autres marchés, le BPM était davantage considéré comme une solution “nice-to-have” [qui n’était pas indispensable, NDLR], non comme un “must-have [indispensable, NDLR]. Depuis l’année dernière, nous avons constaté un changement de perception. En octobre 2009, une étude qui a sondé 400 entreprises en Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord, dans les industries des services financiers, des telécoms, de l’énergie, des transports et de la logistique, a révélé que 94 % d’entre elles jugeaient “critique” le fait de rendre leurs processus réactifs en fonction d’événements. Et ce, en temps réel. Tant par rapport à leurs clients que par rapport à leurs concurrents. Cela a marqué un grand bouleversement pour nous. Cette même étude révèle surtout que la plupart de ces entreprises étaient dans l’incapacité réaliser ces opérations.[...] Nous avons alors senti qu’il existait un besoin très fort. Et nous avons senti que nous avions la position adéquate pour y répondre de par nos différentes briques technologiques.

En vidéo : pourquoi les entreprises sont aujourd'hui plus enclines à affecter des budgets aux projets de BPM.


LeMagIT : Le marché du BPM a connu ces derniers mois une importante concentration. Lombardi passé chez IBM, Savvion chez Progress et IDS Sheer chez Software AG. Nous dirigeons-nous vers la disparition de pure-players dans le BPM ?

J.B. : Il est difficile de savoir s’il existera encore des sociétés indépendantes dans le BPM. Le fait est qu'il s’agit d’une position difficile. Prenons le cas de Savvion. Leurs produits sont bons, mais se donner de l’élan et disposer d’investissements suffisants dans le BPM nécessitent une forte présence internationale. Et il est très difficile pour ces entreprises d’y parvenir. La solution est alors de trouver le bon partenaire pour fédérer les capacités et les faire évoluer sans les détruire. Je pense que c’est la situation dans laquelle se trouvent aujourd’hui les entreprises dans le BPM. D'un autre côté, le danger avec des solutions comme celles d’IBM, c’est que les clients vont être déroutés à cause de  trois offres distinctes, document-centic, system-centric et user-centric avec Lombardi. C’est ce que nous avons voulu simplifier de notre coté.

LeMagIT : Le BPM est-il accessible aux PME ?

J.B. : Nous avons une très forte position sur le mid-market. Et le cloud est une façon d’adresser ce segment. La philosophie de Progress est de placer toutes ses applications dans le cloud, tout en les fournissant sur un mode classique. Donc tous nos produits supportent les fonctions de multi-tenancy, sont déployables à travers le Web et peuvent être hébergées. De nombreux clients ont déjà déployé nos solutions dans le cloud et une bonne partie de nos futures ventes de licences sera générée grâce à cela. Notre stratégie est de rendre plus facile le déploiement de nos produits dans le cloud. Mais nous ne proposons pas directement d’offre d’applications hébergées.

LeMagIT : Rapprocher le BPM de la pile SOA de base - Progress est éditeur d’un ESB - ne vise-t-il à simplifier les architectures orientées services pour les entreprises, surtout dans un contexte où la SOA n’a pas bonne presse ?

J.B. : Je pense que la tâche est très difficile pour les personnes de l’IT qui ont bâti des SOA. Ils ont toujours la pression pour fournir rapidement de nouvelles applications et être toujours plus alignés sur le métier. Le BPM, placé au dessus de la SOA, constitue la prochaine étape d’un point vue IT. Car il donne au responsable IT la possibilité de parler aux responsables métiers, donc de délivrer des applications plus rapidement. C’est ainsi que, pour les puristes, le BPM est davantage considéré, non pas comme une technologie, mais comme une méthodologie. Une philosophie qui implique les utilisateurs dans les processus métier. Il ne s’agit pas uniquement d’orchestration de processus.

En vidéo : le rôle de l'arrivée d'éditeurs Open Source sur le marché du BPM.



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