Après avoir minimisé la crise, Syntec Informatique ne prévoit plus qu'une reprise molle en 2010

Après avoir longtemps cru à une "croissance zéro" en 2009, Syntec Informatique avale enfin la couleuvre : le marché des logiciels et services sera bien en décroissance en 2009. Toutes les composantes du marché sont concernées, sauf l'infogérance. Et l'organisation s'attend à une reprise des plus molles l'année prochaine.

Lors de sa traditionnelle conférence, Syntec Informatique, la chambre syndicale des SSII et éditeurs, a confirmé ce que de nombreuses analystes de marché prévoyaient déjà : la reprise de la dépense IT sera molle en 2010. Le syndicat patronal estime que le secteur (SSII, éditeurs et sociétés spécialisées dans le conseil en technologies) peut s'attendre à une croissance comprise entre 0 et 2 % sur l'année prochaine. "Pourquoi ne sommes-nous pas plus optimiste ?, a lancé Jean Mounet, le président de Syntec Informatique. Tout simplement parce que le premier semestre de l'année prochaine devrait être dans la continuité de 2009. La véritable reprise devrait se dessiner à partir du second semestre". Une prudence qui traduit une fois encore un manque de visibilité.

Offshore : les curieux calculs de Syntec Informatique
Ce serait le paradoxe du moment : présent dans la majorité des appels d'offre - et condition sine qua none chez certains grands comptes - l'offshore ne décollerait pas si rapidement en France. Syntec Informatique parle ainsi d'une croissance qui marque le pas, particulièrement vers l'Inde. Ces dernières années, la chambre syndicale des SSII et éditeurs évoquait des taux de croissance de 40 à 50 % pour l'offshore. L'organisation estime que la délocalisation dans les pays à bas coût représentera 4 % du marché des services en 2009. Un chiffre lui aussi bien paradoxal : en mars 2008, Syntec Informatique évaluait l'offshore à 5 % du chiffre d'affaires des services en 2007 et estimait que le phénomène était en croissance rapide.
Frédéric Giron, directeur des études de Pierre Audoin Consultants, évalue d'ailleurs la part de l'offshore plutôt "entre 6 et 7 %" du marché des services informatiques en 2009, avec certes une croissance moindre qu'en 2008. Mais celle-ci resterait, toujours selon Frédéric Giron, de l'ordre de 30 %. Dans cet ensemble, la délocalisation vers l'Inde pèserait moins de la moitié du total, devancée par le nearshore (Europe de l'Est, Maghreb).
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Pour l'année 2009, en revanche, la messe est dite : après s'être accroché à l'idée d'une année étale, Syntec Informatique reconnaît maintenant que ses trois marchés - services, édition de logiciel et conseil en technologies - seront en décroissance nette sur l'année. Sans surprise, c'est ce dernier qui affichera le recul le plus sévère (-6,5 %), tandis que les deux premiers se tasseront de 2,5 %, selon les chiffres de la chambre patronale. "On assiste à de grands écarts entre des marchés très dynamiques - comme le secteur public qui ne sera pas loin d'une croissance à deux chiffres - et d'autres particulièrement affectés, comme l'industrie ou la distribution", a expliqué Jean Mounet, qui note toutefois l'inversion de tendance dans la banque et l'assurance, avec une première partie de l'année "calamiteuse" et une reprise nette dans la seconde moitié. Globalement, les prévisions de Syntec Informatique sur cette année 2009 sont plus pessimistes que celles de Pierre Audoin Consultants (PAC), qui, fin septembre, n'anticipait "que" 1 % de recul pour le marché français des logiciels et services informatiques. "On est un peu plus optimiste sur la partie infogérance, où on anticipe plutot autour de 5 % de croissance", précise Frédéric Giron, directeur des études de PAC.

SSII : un troisième trimestre pas franchement rassurant

Les récents résultats des SSII, qui au troisième trimestre ne traduisent au mieux qu'une décélération de la décroissance (Logica, Sopra), tandis que d'autres poids lourds du secteur continuent, eux, à s'enfoncer (Capgemini et, dans une moindre mesure, Atos-Origin), ont certainement poussé le syndicat professionnel à la prudence. Rappelons que, dans ces grandes SSII, les branches conseil et intégration affichent souvent des décroissances à deux chiffres. Pour le syndicat professionnel, les très fortes pressions sur les prix, surtout dans l'intégration et le conseil, ont coûté environ un point de croissance au secteur. 40 % des dirigeants de SSII et de sociétés de conseil en technologies ont été confrontés à ce phénomène de baisse des prix... contre 4 % un an plus tôt.

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La TMA fait mieux que résister

Sans surprise, dans les services, les activités de conseil, de développement et d'assistance technique (régie) subissent de plein fouet la crise. Avec une décroissance deux fois moindre, les projets d'intégration au forfait s'affichent eux aussi en recul (- 3 %). Selon Syntec Informatique, l'infogérance terminerait elle l'année sur une note positive. Avec une croissance de 2,5 % dans l'infrastructure. Et même de 4 % dans l'infogérance applicative, confirmant l'attrait des grands comptes hexagonaux pour ces contrats comme l'ont montré ces derniers mois les exemples de Michelin ou SFR (contrat dit Verdi 2). Reste que, même si ce segment semble épargné, sa croissance se voit amputée de moitié par rapport à 2008, si on se réfère aux chiffres récents de Pierre Audoin Consultants sur le marché de la TMA en France. 

 

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L'évolution des différentes activités des SSII (2007-2009)

Dans l'édition de logiciels, comme en témoignent les résultats des éditeurs, c'est le créneau de l'applicatif qui est le plus impacté. Avec - 4 %, ce segment devrait encaisser un recul deux fois plus important que celui des logiciels outils ou d'infrastructure, selon le syndicat patronal. Sans surprise, ce sont les ventes de licences qui expliquent cette décroissance. Sur l'année, tous types de logiciels confondus, celles-ci se tasseraient de 10 %. Un coup de frein dans les investissements que compenserait en partie la progression de la maintenance (+ 5 %). Une évolution qualifiée de "positive" par Romain Hugot, co-président de la commission marchés de l'organisation, "car c'est la maintenance qui coûte le plus cher à un éditeur". Pas sûr toutefois que les DSI partagent cette opinion...

Chomâge : Syntec bien optimiste...

Bien entendu, comme l'a reconnu Alain Donzeaud, le président de la Commission social-emploi-formation de Syntec Informatique, si le secteur continue à recruter - mais deux fois moins qu'en 2008 -, il détruira des emplois cette année : entre 7 000 et 10 000 postes seraient ainsi perdus dans ce secteur qui employait 290 000 personnes en 2008. Pourtant, Syntec Informatique estime que le chômage dans la profession est limité à 2,5 %. Selon nos calculs, basés sur les statistiques de la Dares, la barre des 5 % d'informaticiens au chômage a pourtant été franchie dès juillet dernier. Et n'a cessé de croître depuis.

La France, parmi les bons élèves européens

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Avec 2,5 % de chute en 2009 (hors conseil en technologies), la France se classe parmi les bons élèves européens, aux côtés des autres gros marchés IT du Vieux Continent : la Grande-Bretagne et l'Allemagne. En revanche, la claque est sévère pour les marché espagnol et hollandais. Cette relative résistance du marché hexagonal confirme les prévisions du cabinet Forrester, parues en septembre dernier, où la France apparaissait bien positionnée sur le continent.

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