Processeur : Ampere dévoile un ARM à 128 cœurs pour le cloud
Constitué de deux dies de 64 cœurs chacun, l’Altra Max à 3 GHz serait plus performant et moins énergivore que les Intel Xeon et AMD Epyc. Ampere espère le vendre à Microsoft pour Azure et à Oracle pour OCI.
Ampere, l’un des principaux fabricants de processeurs ARM pour serveurs, dévoile un nouveau modèle Altra Max doté de 128 cœurs et disposant d’une finesse de gravure en 7 nm. Comme son prédécesseur, l’Altra, sorti il y a quelques mois à peine, ce processeur est cadencé à 3 GHz et repose sur les cœurs Neoverse N1 d’ARM. Les Altra se destinent à équiper les serveurs des hébergeurs de cloud.
Parmi les clients cités par Ampere, on trouve les noms de Microsoft Azure et d’Oracle OCI pour les clouds publics IaaS, ainsi que celui de Cloudflare, qui propose une infrastructure cloud d’accès sécurisé pour d’autres services. Selon les informations que LeMagIT a pu obtenir, ces acteurs en seraient toujours à la phase de tests des serveurs à base d’Altra. Seul l’hébergeur Equinix proposerait déjà à ses clients des infrastructures managées qui reposent sur les processeurs d’Ampere.
Un processeur où performances et consommation ne varient pas
Les processeurs Altra héritent d’une architecture mise au point il y a quelques années par AppliedMicro, dans le cadre de son projet X-Gene, qu’Ampere a rachetée il y a trois ans.
La première particularité de cette architecture est que la fréquence annoncée de 3 GHz est fixe : les 128 cœurs de l’Altra Max et les 80 de l’Altra tout court fonctionnent tous ensemble et en permanence à cette fréquence. Il n’y a pas ici de mode « turbo », quoique plébiscité sur les processeurs x86 d’Intel et AMD, ce qui signifie en pratique que certains cœurs fonctionnent à leur fréquence maximale au détriment du ralentissement des autres cœurs, afin de maintenir la température du processeur sous un plafond critique.
Selon Ampere, le fait de ne pas avoir de mode turbo serait une caractéristique importante pour les hébergeurs de cloud, car ce mode ralentit de fait les machines virtuelles de plusieurs de leurs clients dès que l’un d’eux lance des calculs intensifs. De plus, l’absence de mode Turbo rendrait la consommation du processeur bien plus prédictible.
Pour autant, les processeurs d’Ampere peuvent fonctionner à une fréquence réduite, la même pour tous les cœurs, en baissant simplement leur voltage dans le BIOS du serveur. Selon Ampere, un processeur Altra serait plus rapide que les Intel Xeon et AMD Epyc quand ils fonctionnent tous à 3 GHz, ou il consommerait moins d’énergie qu’eux si on le configure pour qu’il atteigne le même niveau de performances. Selon des tests publiés l’année dernière, le premier Altra serait 14 % meilleur que l’AMD Epyc 7742 en termes de performances par watt, et deux fois meilleur que l’Intel Xeon 8280. Entretemps, Intel et AMD ont chacun lancé une nouvelle génération de processeur, mais les tests n’ont pas été mis à jour.
Les cœurs des Altra n’ont pas non plus de mode multithread, qui consiste sur les x86 à exécuter deux flux d’instructions en parallèle. Ici, 128 cœurs signifient que 128 flux fonctionneront simultanément. Encore une fois, Ampere avance que le multithreading ne serait pas une science exacte : l’exécution d’un flux pouvant ralentir la seconde, n’en exécuter qu’un seul permet d’avoir une mesure absolument précise de la performance dont bénéficieront les clients d’un cloud qui louent leurs VM selon le nombre de cœurs.
De plus en plus de processeurs ARM pour les serveurs du cloud
Ampere n’est pas le seul à faire le pari des processeurs ARM pour les hébergeurs de cloud. Le mois dernier, ARM dressait le bilan des acteurs qui lui avaient acheté une licence de ses cœurs Neoverse. Dans cette liste figurent les géants du cloud public AWS, Alibaba et Tencent (ces deux derniers étant chinois) qui implémentent eux-mêmes leurs processeurs ARM. On trouve également Marvell, qui compte dédier ses processeurs Octeon aux équipements réseau. Et puis, bien entendu, SiPearl, qui met au point le processeur Rhea pour que l’Union européenne puisse avoir son propre processeur.
L’architecture Neoverse N1 d’ARM, dévoilée en 2020, repose sur le jeu d’instructions 64 bits Armv8, plus adapté aux traitements en parallèle sur les serveurs que ses prédécesseurs. Il y a un mois, ARM a révélé deux évolutions.
Les prochains cœurs Neoverse V1 seront des versions optimisées du Neoverse N1, 50 % plus rapides sur les serveurs grâce à de nouveaux circuits qui implémentent les nouvelles instructions Armv8.3 et Armv8.4 dédiées aux calculs vectoriels (SVE, pour Scalable Vector Extension), au chiffrement et à la virtualisation. Accessoirement, l’architecture Neoverse V1 supportera les futurs bus PCIe 5.0 et mémoires DDR5.
Sont également déjà prévus les Neoverse N2, les premiers à implémenter le jeu d’instruction Armv9 qui repousse les capacités de calcul vectoriel et apporte des instructions d’auto-diagnostic. Le pipeline des Neoverse N2 a été revu pour permettre d’exécuter 40 % d’instructions en plus par cycle d’horloge. Surtout, ces cœurs Neoverse N2 s’accompagnent d’un nouveau circuit d’interconnexion, le CMN-700, qui permet de fabriquer des processeurs contenant jusqu’à 256 cœurs et 512 Mo de cache par die, contre 64 cœurs et 128 Mo par die pour l’actuel circuit CMN-600. On notera que les Altra d’Ampere intègrent deux dies de 64 cœurs chacun ; ils sont tous actifs sur l’Altra Max, alors que 24 sont inactifs sur chaque die de l’Altra premier du nom.
Ampere déclare lancer la production des Altra Max d’ici à la rentrée prochaine, sur les chaînes de montage de TSMC. Le fabricant espère produire un successeur dès 2022 : il sera basé sur des cœurs Neoverse N2 et sera gravé avec une finesse de 5 nm.