Bamboo relance l’aventure des serveurs ARM

Portée par les décisionsd’Apple, les succès internes d’AWS et les récents progrès de l’architecture ARM, la startup propose des serveurs deux à trois fois moins gros et moins chers que les x86.

La mutation de l’informatique vers les processeurs ARM est en marche. Après Apple qui a récemment dévoilé son projet d’abandonner les x86 dans ses Mac, ce sont les fabricants de serveurs qui s’intéressent – ou se réintéressent – à ces petites puces bien plus économiques et bien moins énergivores que les Xeon d’Intel.

« Dans un contexte où les datacenters consomment à présent 3,5 % de l’énergie produite dans le monde, nous arrivons pour lancer des serveurs à base de processeurs ARM qui coûtent 50 % moins cher à l’achat, qui consomment 75 % d’électricité en moins et qui occupent 80 % d’espace en moins », lance Tom Craythorne, le PDG de la jeune startup Bamboo, lors de l’événement IT Press Tour qui consiste à présenter à la presse les dernières innovations en termes d’infrastructure et auquel LeMagIT a pu participer.

Bamboo a mis au point le B1000, un module de seulement 1U qui contient huit serveurs Linux. Ceux-ci prennent la forme de petites cartes, à peine plus grosses qu’un Rasberry Pi, montées sur deux lames de quatre éléments chacune. Chaque carte serveur embarque un processeur Layerscape LX2160A, un ARM fabriqué par NXP qui comprend 16 cœurs Cortex A72 à 2 GHz et 8 Mo de cache. On y trouve également 32 ou 64 Go de RAM DDR4 à 2 933 MHz, 8 To de stockage sur un disque NVMe PCIe Gen3 dont la bande passante est de 3 Go/s et deux ports Ethernet 10 Gbit/s.  

À l’échelle de la machine – plus exactement sur le modèle B1008 qui possède deux lames et non le B1004 qui n’en a qu’une – un module de 1U offre 128 cœurs, 2 ou 4 To de RAM, 64 To de stockage avec 24 Go/s de bande passante et 4 connecteurs Ethernet 40 Gbit/s au format QSFP en façade arrière.

Deux à trois fois moins cher, moins gros et moins énergivores

Selon John Goodacre, le directeur technique de Bamboo, huit modules B1000 seraient équivalents en puissance brute à huit serveurs R740xd de Dell EMC. Il montre un tableau comparatif particulièrement éloquent.

Côté Dell EMC, le R740xd est une machine 2U bi-socket qui totalise 28 cœurs Xeon à 2,7 GHz et qui possède 4 ports Ethernet 25 Gbit/s. En configurant chaque nœud avec 256 Go de RAM DDR4 et 64 To de stockage NVMe, on obtient un cluster de 16U de haut, avec 448 cœurs, 2 To de RAM, 32 ports Ethernet, 512 To de stockage, qui coûte 560 000 dollars et qui consomme 16 kW.

Côté Bamboo, le cluster totalise 1 024 cœurs. Avec 32 Go de RAM par nœud, il offre également 2 To de RAM, 512 To de stockage et 32 ports Ethernet. En revanche, il n’est haut que de 8U, ne coûte que 200 000 dollars et ne consomme que 6 kW.

Pas vraiment pour les applications monolithiques

Le point important est que les serveurs Linux dans la machine de Bamboo ne partagent ni leur mémoire ni leur stockage. Ils ne communiquent entre eux que par le réseau, la lame qui les porte faisant office de switch Ethernet. En pratique, cela signifie qu’une application ne peut utiliser à la fois que les 16 cœurs d’un nœud serveur.

Et encore : les processeurs ARM ont la réputation de ne pas être très doués pour paralléliser à la volée le code d’une application. En attendant l’arrivée d’un nouveau design Neoverse 2, censé régler ce problème, leurs cœurs sont plutôt destinés à exécuter chacun un code particulier, sans interaction avec les autres.

Sur un serveur comme le Dell EMC R740xd, en revanche, une seule application peut tirer profit des 56 cœurs présents pour accélérer son exécution.

Pour Tom Craythorne, ce n’est pas un problème. « Les serveurs Xeon ont été conçus il y a des années pour exécuter rapidement des applications monolithiques en C++. Notre machine est conçue pour exécuter des containers, c’est-à-dire plein de flux indépendants en parallèle, soit le modèle de développement actuel », assure-t-il.

Idéal pour les containers

« Nous proposons donc une machine bien plus optimale pour exécuter les travaux des DevOps, qui économise de l’espace dans les projets de Edge Computing, qui condense plus de puissance pour l’analytique sans devoir ajouter le coût de GPUs, et qui consomme moins d’énergie dans les datacenters conçus pour proposer des services applicatifs en ligne », dit-il, en énumérant à peu près tous les cas d’usage de Kubernetes, l’orchestrateur standard des containers.

Et de conclure : « nous n’avons rien inventé. Nous déclinons juste un modèle qu’AWS a éprouvé lui-même en mettant au point les serveurs Graviton pour ses besoins internes. Ces serveurs motorisent les services de son cloud public et ils exécutent tous les types d’applications qui avaient été imaginés à la base pour des serveurs x86. »

L’ambition d’équiper les serveurs de puces ARM ne date pas d’hier. Dès que ce type de processeurs a connu le succès sur les équipements mobiles, divers fabricants ont tenté l’aventure. Pendant longtemps en vain. Cette technologie semble néanmoins avoir bondi avec la mise au point du ThunderX2 par Cavium il y a un peu plus de deux ans, puis son évolution en architecture Neoverse l’année dernière.

À terme, Bamboo devrait ajouter à son catalogue une machine B4000, haute de 4U et qui contiendrait cette fois-ci 12 lames.  

Pour approfondir sur ARM

Close