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OS : RHEL débarque sur Oracle Cloud Infrastructure

Oracle et Red Hat viennent d’annoncer un partenariat stratégique. La première étape de cette relation vise à accueillir les licences Red Hat Enterprise Linux sur Oracle Cloud Infrastructure et ses dérivés.

Depuis ce 31 janvier 2023, Oracle prend en charge l’image de base de l’OS RHEL sur les « formes flexibles » certifiées, c’est-à-dire les machines virtuelles (VM.Standardx.Flex) disponibles depuis Oracle Cloud Infrastructure (OCI). Ces VM récentes, propulsées par des processeurs Intel, AMD ou Ampere (ARM), peuvent disposer de 1 à 80 OCPU (pour rappel, 1 OCPU vaut au moins 2 vCPU), et de 1 Go à 1024 Go de RAM.

« Les formes flexibles permettent aux clients de sélectionner le nombre exact de cœurs et la quantité de mémoire vive dont ils ont besoin », assure Leo Leung, Vice-président, produits et stratégie chez Oracle.

Ces VM personnalisables peuvent être déployées sur les 41 régions publiques d’OCI et les régions dédiées. Plus tard, les distributions RHEL supportées par Red Hat pourront être installées dans des VM par-dessus Cloud@Customer, Oracle Alloy, une déclinaison en marque blanche de Cloud@Customer, et également sur EU-Sovereign Cloud, dont la disponibilité est prévue cette année.

Les deux partenaires pratiquent donc le BYOS (Bring Your Own Subscription) afin que les clients puissent importer les charges de travail, les licences et le support liés à RHEL sur OCI. En cas de problème, les clients peuvent appeler indifféremment Red Hat ou Oracle, les techniciens des deux acteurs se chargeront de transmettre « de manière transparente » la demande à la bonne personne selon si le défaut concerne l’OS ou le reste de l’infrastructure. « La plus grosse composante [de ce partenariat] est l’accord consacré au support conjoint », estime Leo Leung.

La prochaine étape du partenariat entre Oracle et Red Hat portera sur la prise en charge officielle de RHEL sur les serveurs bare-metals d’Oracle. Pour le moment, les clients conserveront une relation commerciale séparée avec Red Hat, précise le vice-président.

Coopétition

Ainsi, les deux acteurs mettent de côté leur rivalité historique autour des distributions Linux. En 2018, IDC évaluait que Red Hat détenait environ 30 % des parts du marché des distributions Linux entreprises, quand Oracle en avait un peu plus de 5 %.

Malgré la fin de vie de CentOS7 prévue pour 2024, un événement perçu comme une opportunité majeure pour les concurrents de Red Hat, les entreprises ne semblent pas s’être massivement tournées vers Oracle Linux.

Pour rappel, Oracle Linux offre une compatibilité avec Red Hat Linux Enterprise et son kernel, mais le fournisseur ne supportait pas officiellement l’OS de l’éditeur au chapeau rouge.

Entre RHEL et OEL (Oracle Enterprise Linux), Oracle vante une phase de migration pratiquement indolore. Or, la grande majorité des entreprises utilisent les versions de RHEL et ne souhaitent pas forcément abandonner la technologie, les licences et le support de Red Hat. Sur les forums d’Oracle, un usager d’OCI et de Red Hat réclamait justement une prise en charge de sa souscription RHEL sur ce cloud public.

« Red Hat et Oracle ont tous deux reçu de nombreuses demandes de clients pour ce type de support au fil du temps », confirme Leo Leung.

OCI, bientôt « un cloud comme un autre »

« Il s’agit davantage de convaincre les clients de ne pas exécuter leur charge de travail sur site que de les convaincre d’aller sur un cloud ou un autre. »
Leo LeungVice-président, produits et stratégie, Oracle.

En outre, Oracle est bien conscient qu’environ 90 % des membres du Fortune 500 utilisent les technologies Red Hat et Oracle. Tout comme le partenariat avec Microsoft Azure, cet accord avec Red Hat semble motivé par la volonté d’Oracle de gagner des parts de marché dans le cloud.

« En vérité, nous sommes encore à la première phase d’adoption des infrastructures cloud. Il s’agit davantage de convaincre les clients de ne pas exécuter leur charge de travail sur site que de les convaincre d’aller sur un cloud ou un autre », affirme Leo Leung.

Par la même occasion, le porte-parole estime que les intégrateurs et leurs clients sont « très intéressés par ce partenariat ». Dans un communiqué de presse, Kyndryl – la société de services née de la scission des activités d’IBM – et Accenture Cloud First se réjouissent de cette association. Les deux acteurs supposent que ce mode BYOS intéressera d’abord les clients qui misent sur des déploiements multicloud, hybrides et Edge.

Concernant ces trois tendances, Oracle et Red Hat ont une approche similaire. Tous deux souhaitent que leurs logiciels et middlewares puissent être compatibles avec différents clouds et selon différentes modalités.

« En matière de système d’exploitation, nos clients déploient essentiellement des technologies Red Hat », indique de son côté Gilles Knoery, Président de Digora, une ESN experte des technologies Oracle située à Strasbourg. « Il y a de l’Oracle Linux sur certaines machines, mais les entreprises déploient d’autres technologies par-dessus RHEL. Le fait de pouvoir continuer à profiter du support Red Hat sur le cloud Oracle est une bonne chose. C’est clair et net », juge-t-il. « [OCI] est en train de devenir un cloud comme un autre ».

« Cela permettra aux clients de migrer et administrer plus facilement leurs environnements utilisant Red Hat dans le Cloud Oracle et de bénéficier de divers services gérés par Oracle (par exemple, les mises à jour et le commissionnement de serveurs) », anticipe pour sa part Jacques Orsini, pilote de la communauté OCI au sein de l'AUFO, l’Association des Utilisateurs Francophones d’Oracle.

« Cependant, cela ne permettra pas de bénéficier des optimisations et de la synergie et des optimisations entre le système d’exploitation et la base de données (les bases de données Oracle sont développées sur Oracle Linux) », nuance-t-il.

D’autres annonces à venir

À terme, cette relation pourrait mener au support des solutions d’automatisation et de conteneurisation de Red Hat, à savoir Ansible et OpenShift sur OCI. Leo Leung n’a pas écarté cette possibilité. « Actuellement, nous nous concentrons sur le support de RHEL, mais nous avons l’intention d’étendre ce partenariat. Attendez-vous à voir d’autres annonces entre nos deux entreprises », signale le vice-président, produits et stratégie.

« Ce sera intéressant de voir comment ce partenariat évoluera, y compris au regard du potentiel support d’OpenShift par Oracle », déclare Gilles Knoery.

En attendant, Leo Leung estime que les capacités des machines virtuelles flexibles permettent de ne pas se mettre directement à la conteneurisation et de subir la gestion complexe des conteneurs. « Les entreprises se tournent souvent vers Kubernetes parce que ces architectures ont des caractéristiques comme l’autoscaling ou la possibilité de régler finement la consommation de l’infrastructure », avance-t-il. « Il y a des charges de travail qui ne correspondent pas aux tailles de T-shirt que proposent les fournisseurs cloud. La combinaison des VM flexibles d’OCI et de RHEL permet d’obtenir ce dimensionnement précis ».

Enfin, Oracle n’abandonne pas le développement de son OS. La version 9.1 d’Oracle Linux a été diffusée au début du mois de janvier. Le fournisseur maintient la possibilité de convertir les distributions RHEL vers Oracle Linux, tout comme Red Hat continue de proposer son outil Convert2RHEL. « Certains de nos clients nous demandent d’effectuer cette migration de RHEL ou de CentOS vers OEL et j’ai l’impression que, dans une certaine mesure, Oracle Enterprise Linux fonctionne mieux qu’auparavant », relate Gilles Knoery.

Article mis à jour avec les commentaires du pilote de la communauté OCI au sein de l'AUFO.

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