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Intégration de données : Fivetran maintient ses ambitions en France

Le spécialiste de la migration et la réplication de données espère étendre son influence en Europe, en commençant par renforcer sa présence en France.

En 2012, il était le petit nouveau sur un marché dominé par des acteurs historiques dont Qlik, Informatica, Talend, Oracle ou encore IBM.

Treize ans plus tard, Qlik et Talend ne font plus qu’un. IBM a acquis StreamSets (via Software AG), mais est principalement présent aux États-Unis sur ce marché de l’intégration de données. Oracle et Informatica, malgré une très grande base installée, perdent de la vitesse, selon Gartner. Les fournisseurs cloud ont pris du terrain. Des nouveaux venus, comme Matillion, DBT ou Airbyte se sont fait un nom auprès des ingénieurs.

Malgré tout, Fivetran a sorti son épingle du jeu. D’abord en ciblant les petites entreprises, puis les ETI et désormais les grands comptes.

En septembre dernier, Fivetran a dépassé 300 millions de dollars de revenus récurrents annuels, contre 200 millions en 2023.

« Nous nous attendons à atteindre rapidement le prochain cap des 100 millions de dollars d’ARR, et l’Europe joue un rôle majeur dans cette équation », affirme Scott Jones, chief revenue officer de Fivetran, auprès du MagIT.

La France, le moteur de la croissance de Fivetran en Europe

Scott JonesScott Jones, CRO, Fivetran

En ce sens, Fivetran a recruté en janvier Simon Quinton comme directeur général EMEA. Simon Quinton a exercé des rôles similaires chez Salesforce pour Tableau, Infor et SAP, principalement pour couvrir l’Europe du Nord.

« Nous nous attendons à atteindre rapidement le prochain cap des 100 millions de dollars d’ARR, et l’Europe joue un rôle majeur dans cette équation ».
Scott JonesCRO, Fivetran

Selon Scott Jones, l’Europe est déjà un « marché important » pour Fivetran. Et la France est actuellement le moteur de la croissance dans cette région pour l’éditeur américain.

Selon une étude réalisée par Fivetran, la France serait d’ailleurs « en première position du classement des pays à l’origine de mouvements de données ».

« La France est notre marché qui connaît la plus forte croissance au niveau mondial, avec 141,8 % de croissance d’une année sur l’autre entre l’année fiscale 2024 et 2025 », déclarait Taylor Brown, cofondateur et COO de Fivetran dans un communiqué de presse diffusé en février. « Cette croissance équivaut à 1,18 pétaoctet de données déplacées au cours de l’année écoulée par Fivetran pour nos clients français ».

D’après Scott Jones, ces mouvements de données sont principalement effectués par les acteurs du luxe, l’industrie manufacturière (dont Schneider Electric et Saint-Gobain) et les services financiers.

« Ici en France, il y a de grands groupes concentrés sur l’expérience client, la satisfaction client, l’élégance et le luxe », évoque Scott Jones. « […] C’est pourquoi nous sommes un acteur clé des stratégies de gestion des données pour des entreprises comme LVMH et Hermès ».

Le CRO évoque également le « dynamisme de la France en matière d’innovation autour des données et de l’intelligence artificielle ». Et de citer les partenariats que Fivetran entretient avec le spécialiste de la data science Dataiku et Pigment, l’éditeur d’un logiciel de planification « stratégique ».

La modernisation des architectures de données comme point d’entrée

Mais Fivetran suit aussi ses partenaires Google Cloud, Databricks et Snowflake.

« Au cours des dernières années, ces trois fournisseurs ont fait des investissements substantiels pour construire une empreinte ici [en France] », note Scott Jones.

« Nous observons plusieurs opportunités autour de notre plateforme : la “replateformisation”, la migration vers les lakehouses en cloud, ainsi que les applications basées sur l’IA ».
Scott JonesChief Revenue Officer, Fivetran

« Nous avons beaucoup travaillé l’année dernière pour développer l’écosystème de partenaires technologiques, dont GCP, Snowflake, Databricks, mais aussi AWS et Microsoft », précise Virginie Brard, directrice de la région France et Benelux chez Fivetran.

La migration vers les plateformes de gestion de données en cloud ne serait qu’un des aspects qui guide la croissance de Fivetran.

« Nous observons plusieurs opportunités autour de notre plateforme : la “replateformisation”, la migration vers les lakehouses en cloud, ainsi que les applications basées sur l’IA », liste le CRO Scott Jones. « Même au sein de l’écosystème SAP, la transition vers RISE représente une opportunité majeure ».

D’après lui, les entreprises ne remplacent pas systématiquement leurs outils ETL/ELT comme Talend, Qlik ou Informatica, mais ceux-là ne répondraient pas aux besoins actuels générés par le cloud et l’IA. « Ces produits existants […] requièrent davantage d’aptitudes techniques pour fonctionner. Ils sont donc plus chers et nécessitent parfois un architecte de données ou un ingénieur de données, qui ne sont pas en nombre insuffisant », ajoute-t-il. « Les entreprises préfèrent que ces personnes travaillent sur des projets d’IA et, très franchement, ces ingénieurs de données préfèrent faire cela plutôt que de répliquer des données et de les déplacer ».

Aussi, beaucoup d’entreprises combineraient encore ces outils avec des pipelines de données codés en interne.

« Nous sommes généralement sollicités à l’occasion d’un nouveau projet, qu’il s’agisse de l’adoption de Databricks, de Snowflake ou d’une migration vers le cloud, et nous sommes alors sélectionnés comme outil de support », poursuit Scott Jones.

C’est à partir de ce moment que les entreprises se poseraient la question de la consolidation des solutions.

Une vingtaine d’intégrateurs en France

Virginie BrardVirginie Brard, directrice région
France & Benelux, Fivetran

Même si Fivetran défend que sa solution soit plus simple à déployer, en France et dans une bonne partie de l’Europe, ces discussions impliquent le client, ses fournisseurs technologiques et les intégrateurs.

« Nous avons une vingtaine d’intégrateurs locaux en France qui connaissent à la fois les technologies des fournisseurs partenaires et les nôtres », indique Virginie Brard. Et d’indiquer que l’équipe locale de Fivetran devrait doubler de taille d’ici à un an.

« Nous avons une vingtaine d’intégrateurs locaux en France qui connaissent à la fois les technologies des fournisseurs partenaires technologiques et les nôtres ».
Virginie BrardDirectrice région France & Benelux, Fivetran

« Cette approche repose sur trois niveaux : d’abord, nos partenaires technologiques ; ensuite, les GSI (Global System Integrators) ; et enfin, les revendeurs », détaille Simon Quinton. « Aujourd’hui, nous avons atteint une taille et une notoriété suffisantes, notamment grâce à l’excellent travail de l’équipe de Virginie pour renforcer ces relations clés », poursuit-il. « Nous pouvons désormais être beaucoup plus stratégiques dans nos choix et nos investissements ».

La souveraineté de données, une « exigence incontournable »

Fivetran a bâti sa réputation sur une solution SaaS d’intégration de données (ELT) comptant aujourd’hui près de 700 connecteurs (688 au moment d’écrire ces lignes). Il a ensuite racheté HVR, une solution de réplication de données sur site.

Scott Jones évoque le fait que certains clients réclament des fonctionnalités d’ELT inversé, de mise en qualité de données et davantage de capacités de transformation de données.

Simon QuintonSimon Quinton, DG EMEA, Fivetran

De fait, Fivetran s’appuie en grande partie sur un partenariat avec DBT pour cet aspect et se concentre majoritairement sur l’intégration, l’extraction et le chargement de données. « C’est important de satisfaire les clients, mais il ne faut pas que nous nous éloignions de trop du marché de la migration de données », considère Scott Jones. « Le marché total adressable représente plus de 30 milliards de dollars et nous en détenons seulement 1 % ».

En septembre dernier, l’éditeur a lancé une offre nommée Hybrid Deployment permettant de gérer des flux de mouvement de données déployés sur site depuis la plateforme cloud de Fivetran. « Je pense que nous ne savions pas réellement comment les clients réagiraient à ce type d’options de déploiement, mais cela a été très favorable », assure le chief revenue officer. « Les sociétés régulées, dont les services financiers, ont rapidement fait preuve de leur intérêt – certains clients l’utilisent déjà et beaucoup testent Hybrid Deployement – ce qui nous rend très optimistes ».

« Nous offrons du choix à nos clients et nous tentons de faire évoluer rapidement notre feuille de route produit en fonction des défis qui se présentent sur le marché ».
Simon QuintonDirecteur général EMEA, Fivetran

En parallèle, Fivetran discute avec S3NS, la joint-venture entre Google et Thalès proposant une offre de cloud souveraine. Un client utilise déjà les deux solutions et plusieurs autres seraient intéressés, selon Virginie Brard.

« Comme dans de nombreux domaines technologiques, la souveraineté des données a d’abord été un sujet d’intérêt et de réflexion, puis, du jour au lendemain, une exigence incontournable », remarque Scott Jones.

L’éditeur est également en train de développer un produit de niveau entreprise qui combine son offre SaaS et HVR, une initiative en tête de liste de sa feuille de route produit qui devrait porter ses fruits cette année, selon le CRO.

« Nous offrons du choix à nos clients et nous tentons de faire évoluer rapidement notre feuille de route produit en fonction des défis qui se présentent sur le marché », estime Simon Quinton.

Certains clients utiliseraient l’offre SaaS de Fivetran et HVR, suivant le cas d’usage.

Optimisation des coûts (et hausse tarifaire)

« En France, la plupart des grands comptes utilisent notre offre SaaS et HVR suivant les systèmes à connecter », confirme Virginie Brard. « L’autre composante est l’optimisation des coûts : l’un de nos clients nous a indiqué qu’il avait pu économiser 60 % de ses coûts de mise en œuvre et d’exploitation en rationalisant son parc d’outils ».

Pour autant, en février, Fivetran a changé sa politique tarifaire. Celle-ci impliquerait une hausse importante des coûts suivant le nombre de lignes actives par connecteur, selon ses compétiteurs. De son côté, l’éditeur se défend en argumentant que son modèle permet de mieux prendre en compte l’usage et de réduire les coûts en fonction du volume. Ce changement symbolise sa volonté de cibler les grands comptes.

« Je pense que nos interlocuteurs changent en raison de l’importance stratégique de ce que nous fournissons », avance Simon Quinton. « Auparavant, les ingénieurs de données se procuraient nos solutions et les suggéraient parfois à d’autres équipes au sein d’une entreprise », poursuit-il. « Désormais, nous discutons plus régulièrement avec les cadres supérieurs, les DSI, principalement, et nous souhaitons engager des conversations avec les directeurs financiers ».

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