IA agentique : Appian dit se concentrer sur les usages les plus utiles
L’année dernière, Appian avait annoncé les grandes lignes de sa feuille de route en matière IA, avec un peu de retard sur le reste du marché. Un an plus tard, l’éditeur coche la majorité des cases qu’il a listé. Tout en préparant l’adaptation de son offre aux clients les plus régulés.
Face à Salesforce, ServiceNow ou encore Outsystems, Appian n’est pas le plus prolixe en matière d’IA agentique. Pourtant, il parie sur cette technologie pour moderniser les applications et les processus critiques des entreprises.
En décembre 2024, le spécialiste du BPM avait présenté à ses clients européens Composer, « une nouvelle expérience de conception low-code ». Il n’en avait pas dit davantage. Il promettait de détailler cette fonctionnalité en avril 2025.
Appian Composer a été introduit en dans la version 25.3 de la plateforme. L’outil infusé à l’IA est désormais en disponibilité générale dans la version 25.4, lancé à la mi-novembre.
Appian Composer : l’IA au service de la modernisation applicative
Composer permet de générer le plan d’une application à partir d’un prompt en langage naturel et d’une description de l’application dans un fichier (TXT, Doc, Docx, PDF). Il s’appuie sur les prérequis évoqués dans les documents pour créer un plan. Plusieurs personnes peuvent affiner les activités (une phase principale au sein d’un processus ou d’un parcours), les étapes (les composants principaux) et les actions (les sous-tâches au sein d’une étape) au sein de l’application.
L’outil établit les processus (représentés sous la forme d’un diagramme), les rôles qui agiront sur les activités principales, les modèles de données, les objets, les règles métiers (exprimé en langage naturel, converti en expressions), et les écrans. Le tout peut être raffiné à la main ou à l’aide de l’AI Copilot d’Appian. Une fois le travail terminé, un bouton permet de lancer un prototype de l’application.
Outre un potentiel gain de temps pour développer de nouvelles applications plus difficiles à développer dans d’autres environnements (un ERP, par exemple), Appian considère que Composer aidera ses clients à « transformer » des applications ou des processus existants.
« Nos clients ont des applications spécifiques qui sont difficiles à faire évoluer et coûteuses à maintenir », expose Pascal Pinon, Consultant principal en solutions de conseil chez Appian. « Appian Composer permet de porter des applications complexes sur notre plateforme dans le cadre d’une modernisation. Cela intéresse nos clients qui souhaitent obtenir une vision de bout en bout des processus, peu importe les systèmes sources ».
L’éditeur disposait déjà de Quick Apps Designer, un outil similaire qui n’intégrait pas l’IA générative. Il a été déprécié dans Appian 25.2.
Si Composer semble familier aux clients de PegaSystems, c’est qu’il partage bon nombre de fonctionnalités avec Pega GenAI Blueprint, une solution concurrente. Alors que Composer doit encore faire ses preuves, Blueprint est disponible depuis le deuxième trimestre 2024. Pega vante la popularité de son outil, tandis qu’il réunit des partenaires intégrateurs pour y injecter des connaissances métiers spécifiques.
« Nous avons passé près d’un an avec certains clients en pilote sur ce sujet [Composer] », indique pour sa part Pascal Pinon. « Ils ont principalement cherché à améliorer des applications Appian existantes ». Le consultant n’a pas cité de clients. Selon Appian, 130 organisations ont créé plus de 1300 applications avec Composer. En septembre, Gartner notait que l’éditeur accusait un certain retard en matière d’IA agentique par rapport à d’autres acteurs du marché, dont ServiceNow et Pegasystems.
Le process mining et l’IA font bon ménage
Appian compte toutefois se différencier de ses adversaires en intégrant plus profondément Composer dans Process HQ, sa fonctionnalité d’exploration des processus obtenue par le rachat de Lana Labs. Il est déjà possible de mapper les objets générés ou reproduits dans Composer avec Process HQ. L’outil de planification crée automatiquement un tableau de bord afin de superviser les processus de la nouvelle application. Pour l’instant, son concurrent propose plutôt de créer un plan (un Blueprint) à partir de la cartographie d’un processus existant.
À noter que les fonctions de création de rapports sur les processus à l’aide d’AI Copilot et de visualisation des flux de données (Process Insights) sont maintenant en disponibilité générale dans Appian Cloud.
Des agents IA assignés au processus
Prudent concernant l’IA agentique, l’éditeur dit avoir trouvé les cas d’usage principaux à travers Agent Studio. Agent Studio décline, en quelque sorte, les fondamentaux de Composer à l’échelle d’une étape dans un processus. Visuellement et techniquement, le système ressemble à ce que propose Salesforce dans Agentforce. Les agents IA d’Appian orchestrent des tâches à partir d’un prompt, de documents et d’outils : de modèles de processus, de documents, de types d’enregistrement, et de règles d’expression.
L’éditeur fournit un exemple dans sa documentation d’un agent IA responsable de la classification et de l’assignement de déclarations de sinistre au sein d’une assurance. Une fois l’agent IA créé, il peut être intégré comme un « objet de design » la plateforme Appian au sein d’un processus plus large.
« Bien entendu, nous mettons en place des garde-fous », précise Pascal Pinon. « L’agent IA ne fonctionne que dans le cadre du processus auquel il est associé. Process HQ permet ensuite d’observer comment il se comporte. S’il y a une déviation, il est ensuite possible de rectifier l’agent IA à travers Agent Sudio ».
Et comme c’est un objet de design, chaque exécution et chaque version des agents IA sont conservées. Dans la démonstration effectuée sur son site Web, la prochaine étape du processus est une vérification humaine des résultats produits par l’agent IA. Appian suit les mêmes préceptes que Bloomfilter et Celonis.
Selon Appian, il convient de documenter correctement les processus, d’appliquer une politique stricte de nommage. Les agents IA seraient plus pertinents au moment de traiter du texte et des images, ainsi que de petites tâches incluant un processus de décision à faible valeur ajoutée. L’automatisation robotisée des processus (RPA) prévaut pour les tâches lourdes les plus déterministes. Des bots dont la vitesse de chargement a été améliorée de 90 % dans Appian 25.4.
Pour extraire les informations des documents sources et les classer (documents, emails), l’éditeur disposait déjà des AI Skills. Ils peuvent traiter des images d’une résolution maximale de 10 000 x 10 000 pixels, en sus de PDF. Il est également possible d’enclencher un mode traitement long au moment de gérer des documents en lot ou lorsque les tâches de vérification d’informations sont ardues. Ici, Appian utilise plusieurs modèles de langage-vision. « Nous avons mis en place deux LLM distincts qui vont passer sur le même document et nous comparons les résultats des deux », détaille Pascal Pinon.
Un tel dispositif est synonyme d’accroissement du volume de données. Des documents et des enregistrements. Ainsi, Appian poursuit l’amélioration de sa plateforme Data Fabric qui peut désormais prendre en charge 50 millions de lignes par type d’enregistrement au lieu de 20 millions précédemment. Par ailleurs, la plateforme disposerait d’une vitesse d’écriture cinq fois plus rapide. Elle peut traiter jusqu’à 30 000 transactions par minute.
L’IA générative sera disponible en mode hybride et sur site
Tout cela vaut pour Appian Cloud. L’éditeur dispose également d’une distribution self-managed pouvant être déployée dans une instance de cloud privé ou sur site. Comme prévu, Appian 25.4 s’installe obligatoirement sur Kubernetes (OpenShift, Azure AKS, Amazon EKS, Google GKE, ou « vanille »/bare metal). Ce changement de taille s’accompagne d’un outil de migration.
Or, l’éditeur ne fournissait pas jusqu’alors certaines de ses fonctionnalités dans sa version self-managed. Lui-même proposait l’accès à Amazon Bedrock en allouant un tenant à chaque client. Certaines entreprises ont fait le choix d’Azure AI Foundry ou de Google Vertex AI. « Nous sommes en train d’APIser nos solutions pour appeler des modèles disponibles depuis les autres plateformes du marché », indique Pascal Pinon.
Cette capacité devrait être disponible courant 2026. Pour ses clients les plus régulés, dont les ministères régaliens, Appian proposera d’appeler depuis leur plateforme self-managed des modèles d’IA déployés sur site. « Nous sommes en train d’étudier cette solution avec des modèles Mistral AI », illustre le consultant.
« S’ils ont fine-tuné des modèles ou déployer des solutions d’IA spécifiques, il faudra que ces clients s’appuient sur des API standards », ajoute-t-il.
Ici, Pascal Pinon évoque la structure des interfaces de programmation. L’ensemble du marché s’est entendu pour s’appuyer sur le format proposé par OpenAI.
Au vu des enjeux de modernisation des entreprises européens et des tensions géopolitiques, le maintien d’une version on premise et hybride « complète » n’est pas de trop. Et un avantage économique, espère l’éditeur qui ne compte que 20 salariés en France.
« En France, nous avons identifié un marché total adressable de 2 milliards d’euros pour l’automatisation », déclare Sabine Bührer, vice-présidente régionale pour l’Europe Centrale. « Si nous incluons l’IA, c’est environ 8 milliards. Le potentiel est significatif et nous voulons nous assurer notre place ».
Crédits photo : Gaétan Raoul pour LeMagIT, photographie prise lors de l'événement Appian Europe 2023.
