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Frank Lyonnet, Riverbed : "le rachat d'Ocedo va accélérer notre stratégie SD-WAN"

Riverbed a fait du SD-WAN l’un de ses axes clés de développement pour 2016 et a récemment racheté l'un des pionniers du secteur, l'Allemand Ocedo. Dans un entretien avec LeMagIT, Frank Lyonnet, le deputy CTO de Riverbed, revient sur la stratégie du constructeur et sur les implications du rachat d’Ocedo.

Riverbed a fait du Software Defined WAN (ou SD-WAN) l’un de ses axes clés de développement sur l’année 2016. Le constructeur travaillait sur le développement de sa propre offre SD-WAN mais vient récemment de faire l’acquisition d’Ocedo, l’un des pionniers du secteur. LeMagIT s’est entretenu avec Frank Lyonnet, le deputy CTO de Riverbed pour faire le point sur la stratégie SD-WAN du constructeur et sur les implications du rachat d’Ocedo.

LeMagIT : Pourquoi Riverbed s’intéresse-t-il aujourd’hui au marché du SD-WAN et comment cela s’intègre-t-il avec vos activités existantes.

Frank Lyonnet : Historiquement, nous dérivons l’essentiel de nos revenus de nos gammes SteelHead et SteelFusion. Notre portefeuille SteelCentral est aussi une source de revenus de plus en plus significative. Mais cela fait quelques années que nous envisageons une extension de notre proposition de valeur dans des domaines connexes à ces activités. Sur le côté réseau notamment, nous travaillions depuis plusieurs années sur des composants de contrôle de trafic et de réseau hybride. C’est dans ce cadre que nous avons lancé le projet Tiger qui est à la base de notre stratégie SD-WAN.

LeMagIT : Quel est l’impact du rachat d’Ocedo dans cette stratégie.

Frank Lyonnet : Ocedo a créé une architecture de management et d’orchestration de services et ils sont tombés juste du premier coup. C’était l’un des gros chantiers de Riverbed. Lorsque nous avons rencontré Ocedo, nous avions commencé à mettre en place du VPN full Mesh à la sauce SDN, nous avions aussi commencé à mettre en place un outil de management, même si sur ce dernier point nous étions très dépendants de notre legacy. Nous avions entamé la refonte de l’OS RiOS des Steelhead pour donner naissance à SteelOS, un nouvel OS moderne avec du service chaining, avec le support des VM et des conteneurs pour supporter des composants tiers. Ce nouvel OS devait aussi embarquer des piles de routage applicatif. Avec le rachat d’Ocedo, nous allons pouvoir accélérer la mise à disposition de SteelOS tout en concoctant une gamme d’équipements plus complète que celle envisagée.

LeMagIT : Cela veut-il dire qu’au-delà des passerelles SD-WAN, vous entendez conserver l’offre de commutation LAN et de Wi-Fi d’Ocedo, qui n’est actuellement pas dans votre spectre de couverture et qui vous positionnerait en concurrence directe avec une offre comme celle de Cisco Meraki ?

Frank Lyonnet : Oui nous entendons conserver l’intégralité de la gamme qui nous permet d’avoir une offre adaptée y-compris aux petits sites avec peu d’utilisateurs. Elle peut nous permettre de mieux services les comptes hyperdistribués qui ont des besoins de simplifier la façon dont ils délivrent des services réseaux dans leurs agences, leurs magasins ou leurs filiales. Mais nous ne visons pas le marché des grosses PME, plutôt celui des petits sites. (…) Effectivement, cette stratégie nous place clairement sur une trajectoire de collision avec Cisco. C’est d’ailleurs un défi qui motive nos équipes en interne

LeMagIT : Certains acteurs du SD-WAN, comme VeloCloud, mettent en avant le côté réseau WAN hybride avec en arrière pensée la perspective de réaliser de substantielles économies en remplaçant des liaisons WAN par des agrégats de liaisons IP. Qu’en pensez-vous ?

Frank Lyonnet : La partie internet est importante mais beaucoup de clients avec lesquels nous avons discuté veulent aussi du SDN WAN sur du MPLS. Leur problème n’est pas de remplacer MPLS mais de déployer des politiques facilement sur le WAN. Il y aura des clients SD-WAN pur Internet, des utilisateurs de VPN hybrides et des gens qui continueront à utiliser majoritairement MPLS. Il faut bien comprendre que chez certains grands clients MPLS, on a aujourd’hui un foisonnement de VRF et son corollaire : des problèmes aigus de mal à la tête en matière de gestion des configurations. Pour nous le SD-WAN règle ces problèmes.

L’abstraction ultime c’est le groupe de communication. On a une application qui est associée à des ressources et à des utilisateurs. Avec le SD-WAN, on peut définir simplement les besoins de communication entre les deux. Il suffit de relier tel groupe d’utilisateur à telle application en définissant les règles de sécurité et de communication entre les deux. C’est exactement ce que permet le contrôleur d’Ocedo. C’est pourquoi notre intention est de nous appuyer sur ce plan de management d’autant que ce contrôleur est disponible en version cloud et en version on-premise. Ce qui est important pour nombre des clients du Fortune 500 qui ne sont pas prêts à mettre un contrôleur de ce type dans le cloud.

Frank Lyonnet, Deputy CTO,  RiverbedFrank Lyonnet, Deputy CTO, Riverbed

LeMagIT : Le calendrier initial du projet Tiger prévoyait des livrables au premier trimestre. En quoi le rachat d’Ocedo modifie-t-il ces plans ?

Frank Lyonnet : À l’origine, le projet Tiger devait avoir des livrables au 3e trimestre 2016. Le rachat d’Ocedo va permettre d’arriver plus vite avec des éléments combinant les deux technos. Nous allons mettre sur le marché des produits combinant des éléments des deux constructeurs. L’objectif est d’être capable de couvrir tous les segments de marché y compris les datacenters complexes. Riverbed connaît bien les datacenters des Fortune 500, Nous en connaissons la complexité et nous sommes conscients que certains ont des architectures WAN très complexes. Notre offre inclut des éléments technologiques basés sur cette expertise et on va les combiner avec le savoir-faire d’Ocedo.

LeMagIT : Certains fournisseurs comme Velocloud, mettent en avant une approche d’overlay et expliquent que leur approche n’oblige pas à changer ses routeurs et qu’elle peut se déployer sans perturber l’existant…

Frank Lyonnet : La réalité est que l’argument du « on ne change pas votre routeur » est un argument marketing. On peut bien sûr choisir de laisser les routeurs en place et d’ailleurs certains acteurs du SD-WAN ne souhaitent pas remplacer le routeur pour des questions de maturité. Mais dans la pratique, il y a des palettes entières de routeurs ISR de Cisco qui vont être éliminées avec la montée en puissance du SD-WAN, en partie parce que l’élimination des routeurs sera l’un des moyens de rentabiliser ces projets.

LeMagIT : Comment entendez-vous vous différencier des concurrents ?

Frank Lyonnet : La chose importante pour nous est de savoir ce qui va nous permettre de nous différencier. On ne veut pas faire de la vente de routeurs pour faire de la vente de routeurs. Très rapidement, nous allons par exemple ajouter des éléments de SteelCentral dans Ocedo pour améliorer la visibilité applicative. Les éléments d’expérience utilisateur, hérités d’Opnet, seront intégrés dans notre offre SD-WAN. Il ne faut pas non plus oublier notre expertise dans les agences et les sites distants avec SteelFusion.

LeMagIT : Concrètement, cela veut dire qu’il n’y aura qu’une appliance qui combinera le rôle de routeur et de passerelle de services et couplera les services SD-WAN d’Ocedo avec le savoir-faire d’optimisation de WAN, de qualité de service et d’optimisation de performance pour les agences de Riverbed ?

Frank Lyonnet : L’architecture logicielle sera unifiée. Mais nous n’avons pas encore pris de décision définitive sur le facteur de forme matériel final, si ce sera une grosse appliance ou une appliance principale et des modules additionnels.

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