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Sorti du Chapitre 11, Avaya veut doper sa stratégie commerciale

Restructuré, Avaya sort de la protection du chapitre 11. L'équipementier américain vise une entrée en bourse au plus vite afin de retrouver la croissance.

Après pratiquement une année placée sous la protection du chapitre 11, Avaya redevient une entreprise comme les autres, mais avec de sérieux challenges à relever. Créée en 1995 sur les cendres de Lucent Technologies, l'équipementier s'était placé sous la protection du chapitre 11 pour faire face à une dette de 6,3 milliards de dollars due, pour part, au poids de son LBO et de nombreux rachats de sociétés réalisés 100% en cash  - et non pas par échanges d'actions comme c'est souvent la règle dans la Silicon Valley.

Cette dette colossale faisait planer le spectre d'un dépôt de bilan alors que, comme le souligne aujourd'hui Erwan Salmon, directeur général d'Avaya France, l'équipementier restait un poids lourd du secteur : « Avec un Ebitda de l'ordre de 25% à 30%, nous avions donc une excellente rentabilité opérationnelle et bien supérieure à d'autres acteurs du secteur. Il nous fallait traiter cela réduisant la dette, mais aussi changer de business model alors que notre métier glisse de la vente de hardware vers la vente de logiciels et de services. »

 Les dirigeants d'Avaya placent alors l'entreprise sous la protection du chapitre 11 en janvier 2017 et engagent une restructuration qui va laisser des traces dans le portefeuille produit de la marque. Les switchs et leur technologie phare Fabric Attach ainsi que les équipements pour WLAN sont cédés à Extreme Networks pour seulement 100 millions de dollars tandis que le comité de direction est renouvelé. Priorité est donnée aux ventes et aux performances commerciales. La seconde phase du plan de restructuration de l'équipementier a été avalisée par le juge qui a autorisé l'Américain de sortir de la protection du chapitre 11 et de reprendre une activité normale.

Avaya se met en ordre de bataille pour sa prochaine IPO

Si Erwan Salmon minimise l'impact de la sortie des équipements réseaux du catalogue produit d'Avaya, soulignant les faibles synergies dégagées entre cette activité et les solutions de communications unifiées et de call center (le cœur de métier de l'entreprise), le coup est rude pour la filiale française. Celle-ci réalisait 20% de son CA sur ces équipements, notamment grâce à son référencement par l'UGAP. Cela  représente une part bien supérieure à celle du groupe dans le monde où celle-ci oscillait entre 7 à 8% du chiffre d'affaires. La cession de cette activité à Extreme Networks a néanmoins participé en partie à l'indispensable réduction de la dette d'Avaya qui a été divisée par 2 en 2017, mais qui reste de l'ordre de 3 milliards de dollars.

Néanmoins, avec 300 millions de dollars de cash, l'Américain et ses investisseurs peuvent préparer la prochaine étape de la construction du nouvel Avaya : son introduction en bourse. L'opération, maintes fois repoussée avant cet épisode sous Chapitre 11, reste encore extrêmement périlleuse pour les investisseurs. Le niveau d'endettement reste élevé tandis que le chiffre d'affaires trimestriel plafonne désormais sous les 800 millions de dollars. Le basculement du chiffre d'affaires d'un modèle vente de hardware à celui de services facturés mensuellement provoque de sérieuses turbulences dans les comptes convalescents d'Avaya.

« Beaucoup de temps a été passé sur cette restructuration. Désormais l'entreprise est 100% dédiée aux ventes et à la satisfaction client », souligne Erwan Salmon. « Plus de pouvoir est laissé aux pays et c'est un plus pour la vente de solutions Cloud qui nécessitent des prises de décision rapides. Pour la France, nous avons pu adapter notre organisation aux spécificités du marché français et nous avons atteint 105% de nos objectifs de l'année. »

 Avaya France aborde donc l'année 2018 le couteau entre les dents, avec un objectif de croissance fixé à +15%. Un objectif qu'Erwan Salmon compte atteindre en restant fidèle au modèle indirect, mais en élargissant sa cible commerciale aux entreprises de plus petites tailles et en recherchant de nouveaux partenaires. Le DG France veut mieux quadriller le territoire français. Mais il lorgne aussi du côté des ESN qui soient capables d'exploiter les API Avaya pour intégrer la solution de centre d'appel à de multiples applications. Le réseau de distribution d'Avaya France compte 220 partenaires actifs et le DG compte en ajouter une vingtaine en 2018, essentiellement dans les régions où le groupe est moins présent.

Techniquement, Avaya joue la carte des API

En effet, côté produit, Avaya veut jouer la carte des API. « Nous avons véritablement initié notre stratégie API voici un an et demie et c'est aujourd'hui un atout pour Avaya ». L'Américain pousse sa solution de communication unifiée Aura auprès d’entreprises équipées de 500 à 300 000 postes, une solution aujourd'hui 100% disponible sous forme d'API. Pour les entreprises de taille plus modeste, de 5 à 3 000 postes, c'est l'offre IP Office qui est mise en avant. Si celle-ci est plus packagée, Erwan Salmon souligne que de multiples intégrations ont d'ores et déjà été développées pour la solution, notamment vers Salesforce.com. Une marketplace permet d'ores et déjà aux intégrateurs de piocher dans un vaste catalogue d'extensions.

Pour le DG, la montée en puissance du Cloud, notamment des offres UCaas est un non-événement : « Il s'agit plus d'une évolution de business model qu'une évolution technique. Nos solutions sont déjà multi-tenant et un déploiement dans un Cloud privé ou un Cloud public ne pose pas de difficultés.  Nos partenaires sont libres de choisir l'opérateur de services Iaas qui va porter la plateforme de leurs clients. »  Là encore, le modèle indirect reste la priorité et Erwan Salmon ne compte pas lancer en France l'offre 100% Cloud Avaya Zang à brève échéance.

Enfin, à l'heure du smartphone, le terminal téléphonique reste l'un des chevaux de bataille d'Avaya. Si, depuis l'acquisition de Radvision en 2012, Avaya s'est attaché à développer des versions de son softphone Equinoxe pour de multiples terminaux, les entreprises continuent à déployer des postes fixes et Avaya se positionne tant sur les téléphones SIP d'entrée de gamme que sur les E169 Media Station. Celles-ci sont une sorte de tablettes tactiles fixes capables de porter toutes les applications de communications unifiées d'Avaya mais aussi celles développées par les clients.

Désormais restructuré et clairement axé sur une stratégie commerciale agressive, 2018 va être une année clé pour Avaya qui va devoir démontrer, chiffres de vente à l'appui, que l'entreprise peut à nouveau séduire les investisseurs et réussir son retour à la bourse américaine.

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