La valeur générée par les assistants IA, pas si forte que ça

Les promesses des éditeurs d’assistants IA embarqués dans des suites applicatives (Copilot, Gemini) semblent surévaluées. Pire, il n’y aurait pas de gains de temps de travail. En cause, des outils peut-être trop génériques, mais surtout le manque d’analyse en amont des cas d’usage à réelle valeur ajoutée. Quand ils existent.

Les assistants d’IA génératives (GenAI) embarqués dans les suites bureautiques ne séduisent pas forcément tout le monde. Non pas qu’ils ne soient pas bons, mais les entreprises semblent avoir du mal à trouver les bons cas d’usage – ceux avec un réel ROI qui justifierait l’achat de licences Copilot (Microsoft) ou Gemini (Google).

100 000 sièges Copilot chez un industriel français

« Si j’investis pour créer le meilleur outil, que je le mets dans les mains de quelqu’un, mais qu’il ne l’utilise pas : le retour sur investissement sera nul. Et c’est précisément ce qui se passe avec ces outils d’IA génériques, comme Copilot [pour Microsoft 365] », soulignait Ted Schadler, VP et principal analyst chez Forrester, lors de l’évènement organisé à Paris autour des prévisions 2025 du cabinet de conseil.

Son propos n’était pas de dire que Copilot était en soi une mauvaise IA, mais que, contrairement à Github Copilot, « l’adéquation entre les besoins métiers et un outil d’IA qui traite des connaissances non spécialisées est loin d’être parfaite ».

Il faudrait donc mener une réflexion encore plus approfondie, au niveau de chaque « métier », et en accompagner l’usage.

En attendant, les déploiements susciteraient plus de déception qu’autre chose. « Chez un très grand industriel français, le DSI s’est vu confier 100 000 sièges pour Copilot », raconte Ted Schadler. « Il s’est dit : “Je ne vais pas déployer 100 000 sièges immédiatement. Commençons par 10 000” ».

Verdict ? « L’adoption a été faible, la valeur créée a été faible, et donc le ROI a été horrible. Le PDG s’est alors demandé pourquoi ils avaient acheté 90 000 licences pour tous ses travailleurs du savoir ». Conclusion, il faut, en amont, interroger la valeur.

Les promesses trop élevées des promoteurs de la GenAI

Le cabinet de conseil en transformation digitale Lecko confirme ce constat. Il a étudié l’impact de l’IA générative sur une population de managers qui ont utilisé Copilot pendant 3 mois. Résultat, « le rythme de travail de ces managers, à l’agenda saturé, n’a pas été allégé de manière significative ».

Pas de gain de temps, donc. Il aurait pour cela fallu « mieux questionner les pratiques et cibler des problèmes précis à résoudre », note Lecko. S’assurer d’un bénéfice effectif serait d’autant plus pertinent que « l’usage de l’IA générative doit être raisonné au regard de son impact environnemental et sociétal ».

Ce qui n’a pas empêché Microsoft et Google de déployer leurs assistants en l’incluant nativement dans leurs suites – et en augmentant le prix de celles-ci pour un bénéfice qui s’avérerait donc, somme toute, limité pour l’utilisateur.

Lecko et Cog'X ont évalué quatre dimensions : nombre de jours de travail en débordement, niveau de multitâches durant les réunions, volume de réunions, et temps de récupération entre les visios.

En 2023 (période avant Copilot), l’étude a évalué que les cadres étaient à 40 % en hyperconnexion (travail en débordement 1 jour sur 2 en moyenne sur un trimestre) et 60 % en hyperconnexion occasionnelle.

Malheureusement, « aucun changement significatif, encore moins approchant les gains de production annoncés par les promoteurs de l’IA générative, n’a été constaté », insiste Lecko.

Des gains à condition de résoudre « de vrais problèmes »

« Cela ne signifie pas pour autant l’absence de gain », nuance cependant le cabinet. « L’usage de Copilot se révèle être principalement à la frontière des compétences des utilisateurs, sur des tâches de confort ou de renfort ». Or « libérer du temps nécessite de substituer une action », insiste le cabinet.

Autre bénéfice des IA génératives intégrées, elles peuvent réduire la durée des réunions (qui représenteraient 40 % à 80 % du temps de travail des jeunes managers). « Mais le plus important est de questionner le rôle de la réunion aujourd’hui et d’améliorer les rythmes de travail pour contrer l’effet rebond » invite Lecko.

Conclusion, identique à celle de Forrester : « déployer une technologie n’apporte de valeur que si elle est mise au service de la résolution de vrais problèmes ».

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