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Dev et IA : bientôt ce sont les humains qui seront « dans la boucle »

Pour Forrester, les outils d’aide au développement de code (les « TuringBots ») vont monter en puissance avec des gains possibles de productivité de 80 % d’ici 8 ans. Et à la clef une inversion probable des rôles entre développeurs humains et machines.

Le domaine du développement est souvent cité comme un de ceux qui bénéficient le plus de l’intelligence artificielle générative, ou qui sont le plus affectés par elle. Récemment, l’ancien co-CEO de Workday, aujourd’hui à la tête d’un éditeur spécialisé dans l’IA appliquée aux RH, Chano Fernandez confiait au MagIT qu’il pensait que les gains de productivité pour les développeurs pourraient rapidement atteindre les 50 %.

Forrester fait exactement la même prévision. Et va même plus loin.

Les « TuringBots existent »

L’outil créant la fonction, Diego Lo Giudice, principal analyst chez Forrester, note que les outils d’IA disponibles sont déjà pléthoriques et qu’ils « augmentent » – voire automatisent – les 6 étapes du développement.

De GPT4 à Google Duet AI, en passant par AWS CodeWhisperer ou GitHub Copilot, Diego Lo Giudice liste une petite trentaine de ce que Forrester appelle des « TuringBots ». Certains se cantonnent à une étape, d’autres sont plus « multitaches ».

Photo de la session de Diego Lo Giudice
« TuringBots are real » - Diego Lo Giudice liste les outils d’aides au développement qui existent déjà, classés par chaque étape du process de production du code.

Et d’autres acteurs comme ServiceNow devraient rapidement rejoindre cette liste.

Le potentiel TuringBots se révélera réellement d’ici 2032

Pour illustrer la puissance de l’évolution des TuringBots, Diego Lo Giudice évoque l’exemple, encore balbutiant, d’une démonstration d’OpenAI où ChatGPT analyse en entrée un croquis dessiné sur une page de carnet et produit en sortie un code HTML.

Pour autant, nous n’en serions qu’au tout début. D’ici 2024, Forrester anticipe un gain de productivité moyen de 15 % à 20 %. Bien, mais pas énorme.

Sur la période 2024 à 2028, les choses devraient en revanche nettement s’accélérer avec des gains de productivité qui doublent (pour atteindre les 50 % de Chano Fernandez). IA générative et développeurs humains seront alors « des pairs » (comprendre « quasiment des égaux »), qui se partagent équitablement la production du code.

Et d’ici 2032, « à mesure que l’IA se sera améliorée, ce sera l’humain qui entrera dans la boucle [pour superviser le code] et non plus l’IA », dixit Diego Lo Giudice. C’est alors un gain de productivité de 80 %, voire plus, que prédit Forrester.

Une révolution plus qu’une évolution donc.

Des freins qui n’en seront bientôt plus ?

Il reste évidemment aujourd’hui des freins à cette révolution. Quid de la propriété intellectuelle d’un code produit par une IA Générative ? De la confidentialité du projet ? L’IA connaît-elle les subtilités de telle ou telle API interne ? Et, peut-être plus important, le code produit ainsi à la chaîne sera-t-il réellement sûr ? Et de quelle qualité (optimisation, etc.) ?

Cette liste de freins et de questions n’est pas exhaustive. Mais elle se lèverait petit à petit.

Par exemple, raconte Diego Lo Giudice, une grande banque de la zone APAC a décidé de faire une expérience intéressante. Elle a constitué quatre équipes de « codeurs ». Puis elle a comparé leurs résultats.

Le premier code a été généré avec l’aide de Whisperer. Le second avec GitHub Copilot. Le troisième avec GPT4. Et le quatrième par des développeurs. Résultats des courses ? La qualité du code des machines « n’était pas parfaite, mais ce n’était pas pire [que celle du code des humains] ».

Petite anecdote. À la fin de la session de Diego Lo Giudice, voyant que j’étais journaliste, un participant m’apostrophe. « Vous n’avez pas peur de perdre votre boulot ? Avec l’IA Générative, ce n’est pas dit qu'il existe encore demain », lance-t-il. Avant de continuer, après un court silence : « remarquez, nos boulots à nous aussi risquent de ne plus exister… ».

Signe que si le potentiel de l’IA est très prometteur pour les développeurs, il est aussi, visiblement, très anxiogène.

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