Nutanix : « les clients de VMware viendront graduellement à nous »

Face au remaniement sévère du catalogue de VMware par son nouvel acquéreur Broadcom, le PDG de Nutanix se garde bien de crier au feu. Mais il estime que la récupération des clients de son concurrent est inéluctable.

« Non, je ne m’attends pas à une migration rapide des utilisateurs de VMware vers Nutanix. Cela prendra sans doute des années. Mais ils migreront. Au fur et à mesure. Car nous réunissons les conditions pour que cela leur soit favorable. » Ainsi s’est exprimé Rajiv Ramaswami, le PDG de Nutanix, lors d’un entretien avec la presse qui a eu lieu cette semaine. Il s’agissait pour l’éditeur d’illustrer à la fois ses derniers résultats financiers et le rachat tout frais de D2IQ, dans le domaine de la supervision des containers Kubernetes.

Pour Rajiv Ramaswami, il s’agissait aussi de clarifier le message de son entreprise sur un marché où, d’un côté, les concurrents de VMware crient au sauve-qui-peut et où, de l’autre, ses clients semblent pour l’instant plutôt impassibles.

L’objet de tous les débats est bien entendu les coupes franches et les augmentations de tarif que Broadcom continue d’annoncer, depuis qu’il a mis la main sur VMware. Nutanix et Red Hat étant les deux fournisseurs qui ont l’offre la plus alternative à VMware, leurs commerciaux sont soit sursollicités – pour proposer vite des solutions de remplacement –, soit critiqués, pour attiser les rumeurs de catastrophe imminente.

« De nombreux clients de VMware lui ont fait signer des contrats qui l’obligent à leur fournir du support sur les prochaines années. Cela donne du temps aux entreprises pour préparer la suite. »
Rajiv RamaswamiPDG, Nutanix

« Juste avant que le rachat par Broadcom soit définitivement entériné, de nombreux clients de VMware lui ont fait signer des contrats qui l’obligent à leur fournir du support sur les prochaines années. Cela donne du temps aux entreprises pour préparer la suite. Mais vous avez aussi d’autres clients qui veulent amorcer dès maintenant leur migration. Nous recommandons de le faire en douceur, en migrant par exemple d’abord le stockage puis les machines virtuelles », explique Rajiv Ramaswami.

Et de préciser : « le cas que nous rencontrons le plus à l’heure actuelle est celui des entreprises qui étaient clientes à la fois de Nutanix et de VMware. Celles-ci n’ont globalement pas signé de nouveaux contrats avec VMware et choisissent à présent de migrer toutes les applications qu’elles avaient sur les solutions VMware vers des infrastructures Nutanix. »

Des ventes en progression et des acquisitions

C’est, selon lui, dans ce contexte qu’il faut interpréter la croissance certaine sans être explosive des ventes de Nutanix. L’éditeur a ainsi réalisé lors du dernier trimestre un chiffre d’affaires de 562 millions de dollars, soit 16 % de mieux qu’il y a un an.

« Dans le même temps, nous avons également bénéficié de la décision de Cisco d’abandonner son propre système d’hyperconvergence pour le remplacer, sur ses serveurs, par le nôtre. Cela dit, les bénéfices de cette opération sont pour l’instant minimes dans nos résultats actuels. Et, pour être franc, je n’ai à date aucune idée si les contrats apportés par Cisco représenteront, dans les semaines qui viennent, plus de CA que les ventes de licences aux entreprises qui souhaitent quitter VMware », commente Rajiv Ramaswami.

Concernant D2IQ, dont le montant du rachat n’a pas été précisé, il s’agit de l’éditeur de la plateforme DKP qui sert à administrer des clusters Kubernetes. Le logiciel déploie un cluster Kubernetes sur des machines virtuelles et configure automatiquement les droits d’accès, les API possibles ou encore les dépôts GIT, selon des fichiers déclaratifs préparés en amont par l’administrateur.

Il sert ensuite à monitorer l’activité des clusters Kubernetes installés sur site, mais aussi de clusters Kubernetes que le client utiliserait en cloud, chez AWS (EKS), Azure (AKS) ou GCP (GKE).

DKP est une solution plutôt mature, dans le sens où ce logiciel descend du système Mesos qu’avait lancé son éditeur en 2013, quand il s’appelait encore Mesosphere. Mesos avait l’ambition d’incarner une plateforme d’exécution des containers alternative à Kubernetes. Il n’y est jamais parvenu et l’éditeur s’est rebaptisé D2IQ pour ne plus proposer que la partie administration de son système.

Nutanix ou Red Hat ?

Officiellement, Rajiv Ramaswami maintient une position ambiguë par rapport à Kubernetes. Nutanix offre de déployer gratuitement sur son système de virtualisation AHV son propre Kubernetes, Karbon, accompagné d’un trousseau d’outils qui s’étoffe au fil du temps. Mais dès lors qu’il s’agit de déployer du Kubernetes en production, Nutanix recommande de plutôt utiliser la solution OpenShift, le Kubernetes commercial de Red Hat, qui est aujourd’hui parfaitement adapté à AHV.

L’ambiguïté repose ici sur le fait que Red Hat et Nutanix concurrencent tous deux VMware et sont donc susceptibles de rivaliser pour récupérer ses clients. Pour autant, cette rivalité est floutée par le constat, sur le terrain, qu’OpenShift fonctionne mieux quand il s’appuie sur une solution de virtualisation. Or, celle de Red Hat, bâtie à partir de son Linux RHEL, est moins prête à l’emploi que celle de Nutanix. On ignore si le partenariat entre les deux fournisseurs perdurera lorsqu’ils auront suffisamment amélioré, l’un, Karbon et l’autre, RHEL.

Mais comme le suggère Rajiv Ramaswami, en attendant que les clients de VMware arrivent au bout de leur dernier contrat – soit cinq ans en moyenne –, Nutanix et Red Hat ont eux aussi du temps pour préparer la suite.

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