Réseau : Broadcom revend le SD-WAN VeloCloud à Arista
Dans cette opération, l’équipementier récupère un module qui donne un accès extérieur aux infrastructures réseau qu’il vend pour façonner un cloud. Broadcom repositionnant lui aussi VMware en plateforme cloud, son sacrifice de VeloCloud interroge.
L’équipementier réseau pour datacenters Arista rachète le logiciel de SD-WAN VeloCloud à Broadcom. Ce logiciel faisait précédemment partie du catalogue d’offres de VMware. Selon les analystes, ce rachat permet à Arista d’élargir ses fonctions réseau, avec une dimension de connectivité sécurisée depuis l’extérieur d’un datacenter, alors que ce fournisseur était surtout connu pour sa capacité à virtualiser des réseaux à l’intérieur du datacenter. Mais comme cette virtualisation était surtout pensée pour supporter des offres de cloud, il est pertinent d’y inclure la gestion de la connexion à ce cloud.
Pour rappel, un SD-WAN est une passerelle qui permet à toutes les succursales d’une entreprise qui en sont équipées de créer une connexion Internet virtuelle par-dessus leur connexion physique (éventuellement au pluriel, quand une succursale est par exemple équipée d’une connexion Internet en fibre publique et d’une autre en 5G, ou de deux connexions fibre).
Le but de cette connexion virtuelle est de mettre directement les succursales sur le réseau privé d’une entreprise, celui qui donne accès à ses applications internes. Ces applications sont en l’occurrence hébergées soit dans le datacenter du siège de l’entreprise, soit sous la forme de services cloud (SaaS, IaaS…) pour lesquels l’entreprise cliente a souscrit un accès privé.
« Des fournisseurs tels que HPE, Cisco et Extreme Networks proposent déjà à leurs clients une intégration plus poussée entre la sécurité et la mise en réseau. »
Shamus McGillicuddyAnalyste, Enterprise Management Associates
« Cela dit, n’avoir qu’une connexion SD-WAN à offrir pour se connecter à un cloud est une approche un peu obsolète au regard de ce qui se pratique désormais sur le marché », pointe l’analyste Shamus McGillicuddy, du cabinet de conseil Enterprise Management Associates, au micro de nos confrères de SearchNetworking. « Des fournisseurs tels que HPE, Cisco et Extreme Networks proposent déjà à leurs clients une intégration plus poussée entre la sécurité et la mise en réseau, en offrant des capacités de confiance zéro et d’accès sécurisé à la périphérie, soit le concept du SASE. »
Selon lui, il est probable qu’Arista complète prochainement VeloCloud avec un autre rachat qui lui permettrait de proposer un SD-WAN plus moderne, qui intègre le concept de SASE.
En fait, l’intérêt de VeloCloud se situe ailleurs. Il intègre une couche baptisée VeloRAIN (Robust AI Networking) qui s’appuie sur un moteur d’IA pour fluidifier les accès selon les trafics qui paraissent les plus importants. Un des avantages de VeloRAIN, par exemple, est de détecter qu’un utilisateur veut soumettre une quantité importante de données locales à une IA en ligne et d’ajuster automatiquement la bande passante en sa faveur, sans trop léser les autres utilisateurs.
L’intérêt de cette vente n’est pas clair
VMware avait racheté VeloCloud en 2017, à l’époque pour enrichir sa solution de réseau virtualisé NSX d’une couche SD-WAN. NSX faisant la même chose qu’EOS, le système de virtualisation embarqué dans les switches d’Arista, l’intérêt que Broadcom tire de cette revente à un concurrent direct n’est pas très clair.
Shamus McGillicuddy spécule que Broadcom ayant décidé de ne plus vendre NSX comme un produit à part (il est fourni dans l’abonnement à VMware Cloud Foundation), il souhaite sans doute minorer ses investissements dans le réseau et, donc, se débarrasse à présent de tout ce qui lui est accessoire, dont le module SD-WAN.
Sauf que NSX reste essentiel à VMware Cloud Foundation, dans le sens où c’est surtout lui qui fait passer la solution de virtualisation de serveurs basique pour une plateforme d’infrastructure cloud, ce que Broadcom vend désormais. Réduire les investissements dans NSX paraît donc paradoxal.
NSX et EOS servent tous les deux à désolidariser des adresses réseau (IP, MAC) des cartes Ethernet présentes dans les serveurs physiques. Ce mécanisme est clé dans un cloud où les VM sont déplacées d’un serveur physique à l’autre, au gré des pics d’activité. Il permet par exemple de bouger dynamiquement les firewalls avec les applications. C’est d’ailleurs pourquoi Broadcom/VMware et Arista revendiquent tous les deux de vendre des plateformes d’infrastructure pour façonner le cloud, plus que des fonctions de base pour datacenters.
Une stratégie purement financière ?
En toute logique, Broadcom aurait plus à gagner à montrer la plus grande richesse de NSX pour mieux vendre toute la plateforme VMware Cloud Foundation qui va avec. Avec VeloCloud, Arista peut désormais vendre une plateforme d’infrastructure cloud plus complète, en tandem avec Nutanix qui fournit la virtualisation des serveurs et du stockage.
Cela dit, ce n’est pas la première fois que Broadcom se débarrasse de produits accessoires dans le catalogue de VMware. En février 2024, il avait ainsi revendu tout ce qui avait trait à la virtualisation du poste de travail (Workspace One, Horizon) à un fonds d’investissement. Quant aux produits de cybersécurité Carbon Black, ils ont été sortis de VMware pour être fondus dans le catalogue de Symantec, une autre marque rachetée par Broadcom.
Qu’il s’agisse de Symantec comme de VMware, Broadcom s’est taillé la réputation de racheter des marques très populaires et de faire bondir les tarifs de leurs produits pour ne plus vendre qu’aux grandes entreprises. Cela lui permettrait d’éliminer les investissements dans une multitude de produits accessoires dont seules les PME sont clientes.