L’administration Trump lance un nouveau plan pour l’IA
Il n’est plus question de Stargate. Le nouveau plan d’action américain pour l’IA tout juste dévoilé par l’administration Trump vise à déréguler les chantiers de datacenters aux USA et à réglementer l’IA selon ses objectifs pour le reste du monde.
Ça n’aura pas traîné. OpenAI n’a pas sitôt montré des signes de faiblesses dans la conduite du projet Stargate que le gouvernement Trump est monté au créneau pour redynamiser son plan de suprématie mondiale dans le domaine de l’IA. Baptisé « America’s AI Action Plan » et surtitré « Winning the Race » (« gagner la course »), le nouveau document qui décrit le prochain chapitre de la conquête de l’IA par les USA contient une trentaine de mesures. Parmi celles-ci, l’allègement des contraintes légales qui retarderaient la construction de nouveaux datacenters aux USA.
« Pour réussir dans la compétition mondiale en matière d’IA, les États-Unis doivent faire plus que promouvoir l’IA à l’intérieur de leurs propres frontières. »
America’s AI Action PlanDocument du plan d'action américain pour l'IA, juillet 2025
Il y a aussi, en filigrane, la récupération des datacenters Stargate qui commençaient à se construire aux Émirats arabes unis, au profit d’une nouvelle doctrine. Une doctrine plutôt offensive de prolifération de l’IA américaine dans le monde. « Pour réussir dans la compétition mondiale en matière d’IA, les États-Unis doivent faire plus que promouvoir l’IA à l’intérieur de leurs propres frontières. Les États-Unis doivent également encourager l’adoption des systèmes d’IA, du matériel informatique et des standards américains dans le monde entier. […] Les États-Unis doivent répondre à la demande mondiale en matière d’IA en exportant l’ensemble de leur technologie vers tous les pays désireux de rejoindre l’alliance américaine pour l’IA. […] La distribution et la diffusion de la technologie américaine empêcheront nos rivaux stratégiques de rendre nos alliés dépendants de la technologie d’adversaires étrangers », lit-on dans le document.
On ignore à ce stade comment les USA se positionneront face aux pays ou aux entreprises qui utiliseraient, par exemple, le processeur franco-européen Rhea de SiPearl, pour exécuter l’IA du Français Mistral. Ou, pire, qui stockeraient leurs données sur des baies de disques Huawei pour les soumettre aux IA chinoises DeepSeek et Qwen.
Une IA pour les alliés, réglementée par les USA
Plus bas, le document précise que les USA sont ouverts à une collaboration internationale pour définir des plateformes d’IA standardisées, mais du bout des doigts : « Les États-Unis soutiennent les nations partageant les mêmes idées, qui travaillent ensemble pour encourager le développement de l’IA conformément à nos valeurs communes. Mais trop souvent, ces efforts ont préconisé des réglementations contraignantes, des codes de conduite [entre guillemets dans le texte, N.D.R.] vagues, qui promeuvent des agendas culturels non conformes aux valeurs américaines, ou qui sont influencés par la Chine. »
« [Il faudra] réviser le cadre de gestion des risques liés à l’IA du NIST afin d’éliminer toute référence à la désinformation, à la diversité, à l’équité et à l’inclusion, ainsi qu’au changement climatique. »
America’s AI Action PlanDocument du plan d'action américain pour l'IA, juillet 2025
La possession de technologies américaines sera donc fortement recommandée, mais aussi scrupuleusement réglementée : « Les États-Unis doivent imposer des contrôles stricts à l’exportation des technologies sensibles. Nous devons encourager nos partenaires et alliés à suivre les contrôles américains et à ne pas les contourner. S’ils le font, les États-Unis devront utiliser des outils comme le Foreign Direct Product Rule [une loi qui date de la Guerre froide et qui permet aux USA d’interdire aux autres pays de commercialiser certains de leurs produits, s’ils ont été fabriqués avec des technologies américaines, N.D.R.] et des droits de douane annexes, pour parvenir à une plus grande harmonisation internationale », dit le texte.
Sur le fond, les USA entendent aussi faire la police quant aux contenus des bases de connaissance des IA. Au bénéfice de « la liberté d’expression », le gouvernement américain ne fera affaire qu’avec des IA nettoyées de tous « biais idéologiques ». Le texte précise qu’il faudra « réviser le cadre de gestion des risques liés à l’IA du NIST afin d’éliminer toute référence à la désinformation, à la diversité, à l’équité et à l’inclusion, ainsi qu’au changement climatique. ».
Sortir les datacenters américains des contraintes écologiques
Concernant la dérégulation au profit de la prolifération des datacenters aux USA, le texte prévoit d’abord d’exclure les datacenters des obligations de la loi NEPA (National Environmental Policy Act), parmi lesquelles le devoir d’évaluer et de rendre public les impacts environnementaux d’un chantier. Cette exclusion permettrait d’obtenir des permis de construire plus rapidement. D’ailleurs, la délivrance rapide de permis de construire devrait être étendue à tout ce qui sert au fonctionnement d’un datacenter : centrale d’énergie, logistique, etc.
Dans un second temps, les datacenters seront également moins concernés par toutes les contraintes légales ayant trait à la pollution de l’eau, de l’air… : « Le système américain d’autorisations environnementales et d’autres réglementations rend pratiquement impossible la construction de ces infrastructures aux États-Unis à la vitesse requise. […] Heureusement, l’administration Trump a réalisé des progrès sans précédent dans la réforme de ce système. Depuis son entrée en fonction, le président Trump a déjà réformé les réglementations de la loi NEPA dans presque toutes les agences fédérales concernées, et lancé un programme d’autorisation des technologies de modernisation. […] Il est temps de tirer parti de cet élan », encourage le texte.
Dans la foulée, le texte incite les acteurs de l’énergie à moderniser leurs réseaux et ceux des semiconducteurs à accélérer la construction de leurs usines sur le sol américain.
Ce dernier point pose question. Le texte assure que l’administration Trump dirigera tout particulièrement cette réindustrialisation américaine des semiconducteurs. Cependant, cette même administration Trump a plutôt reculé sur le Chips Act, le programme qu’avait imaginé l’administration Biden pour relancer ce secteur.
Enfin, notons que le texte ne cite pas une seule fois le projet Stargate. Comme si l’administration Trump avait entretemps pris acte qu’il s’agissait surtout d’asseoir le succès du seul éditeur OpenAI. Le texte encourage au contraire le développement des IA Open source et Open Weight, ce que n’est clairement pas le très propriétaire ChatGPT d’OpenAI.
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