eEVOS, la nouvelle alternative européenne à VMware pour les PME
L’éditeur allemand euroNAS produisait depuis 20 ans des systèmes de stockage en marque blanche. Après avoir ajouté la virtualisation, il intègre aujourd’hui à sa solution le fonctionnement en cluster élastique. Son atout : tout est graphique.
Il faut désormais compter un nouveau nom dans la quête des alternatives à VMware. Développeur de solutions de stockage depuis vingt ans, l’Allemand euroNAS propose à présent un système d’hyperconvergence eEVOS, censé remplacer à un prix attractif le couple ESXi/vSAN.
« Nous sommes peu connus, car 80 % de nos ventes se sont faits jusqu’ici via des fournisseurs de matériels de stockage, qui intégraient notre système en marque blanche », commence Tvrtko Fritz, le PDG d’euroNAS (en photo en haut de cet article), que LeMagIT a rencontré à l’occasion d’un événement IT Press Tour consacré aux acteurs européens qui innovent dans le stockage. Il n’a pas le droit de citer ses partenaires, mais se targue d’un certain succès dans les studios de postproduction : son système aurait été utilisé sur le montage de la série Game of Thrones aux USA, ou encore par la BBC au Royaume-Uni.
« Il y a dix ans, plusieurs de ces partenaires qui devaient concourir contre Nutanix dans les appels d’offres nous ont demandé d’ajouter une couche de virtualisation. Puis, en 2024, après que le rachat de VMware par Broadcom a convaincu nombre d’entreprises de fuir les nouveaux tarifs, les demandes pour cette solution de virtualisation ont explosé. Alors nous l’avons adaptée pour en faire un vrai concurrent de vSAN », raconte-t-il.
Le système eEVOS n’est pas le seul à proposer une alternative à VMware à un tarif taillé pour les PME. On pense à la solution Open source Proxmox.
« Proxmox est gratuit, alors que nous sommes payants. Cela nous a fait très peur au début. Mais en définitive, nous avons un immense avantage qu’ils n’ont pas : tout dans notre solution est aussi graphique que chez VMware ou Nutanix. Nous sommes utilisables par tout le monde. Alors que seuls les techniciens experts en Linux peuvent se servir de Proxmox ; même pour une simple mise à jour, il faut lire une documentation de plusieurs pages pour savoir quoi taper dans la ligne de commande », lance le PDG d’euroNAS.
D’un simple NAS à un serveur de virtualisation
Au départ, euroNAS proposait – et propose toujours – un système éponyme pour transformer un serveur avec des disques ou des SSD en un NAS capable de partager ses contenus dans tous les protocoles (y compris l’ancien AFP d’Apple, cher aux studios de création). Ce système supporte les tiroirs des disques externes en Fiber Channel, en iSCSI, en NVMe-over-Fabrics et gère la fiabilité de l’ensemble grâce au système de fichiers ZFS, lequel assure à la fois un RAID logiciel, de la compression à la volée et des snapshots.
Selon Tvrtko Fritz, cette solution serait souvent utilisée avec le tiroir Exos Corvault de Seagate qui contient plus de cent disques durs, pour une capacité brute de 2,5 Po. Le tiroir seul ne serait qu’un volume à monter sur un serveur pour archiver les données. Avec euroNAS, son accès est partagé et accéléré via un serveur frontal contenant des SSD et ses données sont indexées dans l’interface graphique du système. Surtout, il devient possible d’assembler trois tiroirs pour travailler sur un seul volume de 7,5 Po.
Cette solution est encore montée d’un cran en matière de fiabilité avec l’arrivée d’un modèle dit HA Cluster (cluster haute disponibilité). Soit les accès vers un seul tiroir de disques sont partagés par deux serveurs euroNAS redondants, soit les deux serveurs euroNAS ont chacun un tiroir de disques rattaché et synchronisent leurs contenus en permanence.
« Nous avons […] développé des choses propriétaires autour de KVM, notamment un système de ref-links pour les snapshots. »
Tvrtko FritzPDG d’euroNAS
« Puis, en 2016, on nous a demandé de pouvoir exécuter des machines virtuelles, parce que l’infrastructure hyperconvergée de Nutanix, qui faisait de la concurrence à nos partenaires, n’était pour ainsi dire qu’un système de stockage sur des serveurs Supermicro, avec la capacité d’exécuter lui-même des applications de sauvegarde ou de gestion des données », se souvient Tvrtko Fritz.
« D’emblée, cela nous a paru très facile à faire : il nous suffisait d’utiliser KVM, l’hyperviseur accolé au noyau Linux, sur lequel repose notre système. Pour autant, plusieurs de ses aspects nous déplaisaient, notamment ses outils de snapshots incrémentaux qui présentent le défaut de devoir reconstruire un snapshot synthétique au moment de la restauration. Selon la taille de la VM, cela peut prendre des heures. Nous avons donc développé des choses propriétaires autour de KVM, notamment un système de ref-links pour les snapshots. »
En 2025, la transformation vers Ceph
Le système euroNAS, agrémenté de la possibilité de virtualiser, est commercialisé à part sous le nom d’eEVOS, pour euroNAS Enterprise Virtualization OS. Cependant, eEVOS seul n’était pas assez robuste pour exécuter la multitude de VM applicatives que les PME ne voulaient plus confier à VMware à partir de 2024.
« Le problème n’était pas dans la capacité de virtualisation, mais dans l’élasticité. Un client de VMware ou de Nutanix a besoin de pouvoir ajouter des serveurs au fur et à mesure que ses besoins augmentent et, ce, de manière transparente. Or, ce n’était pas possible avec ZFS. Nous l’avons donc remplacé par Ceph », explique Tvrtko Fritz.
L’ensemble fonctionne apparemment si bien qu’euroNAS a même décidé d’étendre l’élasticité de Ceph à son système de stockage traditionnel il y a quelques semaines. Cette nouvelle version s’appelle eEKAS ; l’éditeur n’est pas parvenu à nous dire ce que signifiait cet acronyme. Toujours est-il qu’eEKAS aurait ouvert à euroNAS tout un nouveau marché pour le stockage élastique. Notamment dans son milieu favori de la postproduction vidéo, où il part affronter des solutions de stockage comme PowerScale de Dell, ou Qumulo qu’intègre HPE.
Les systèmes eEVOS et eEKAS supportent aujourd’hui la mise en cluster de 60 nœuds.
Jusqu’ici, euroNAS était modestement assis sur un chiffre d’affaires annuel de 5 millions d’euros. « Nous anticipons que nos prochains bilans atteindront 20, voire 30 millions d’euros. Avant, nous vendions à un client une licence pour un ou deux serveurs euroNAS. Désormais, nous vendons des licences pour des clusters entiers. Je viens juste de signer un contrat pour une configuration eEVOS en 60 nœuds, dont le prix catalogue est de 900 000 €. Même en faisant une ristourne de 50 %, vous voyez que nos revenus vont exploser », se réjouit Tvrtko Fritz.