À l’ère de l’IA agentique, Salesforce se (re) lance sur le marché de l’ITSM
Salesforce tente à nouveau d’investir le marché de l’ITSM et de l’ITOM, cette fois-ci sans partenaire. Une réponse à ServiceNow, mais aussi (et surtout ?) un moyen de tenter d’augmenter le panier moyen des clients de Service Cloud au travers d’Agentforce.
À quelques jours de Dreamforce, Salesforce se lance sur le marché de l’ITSM avec Agentforce IT Service.
À la surface, le géant du CRM propose des agents IA pour les métiers et les équipes de support IT. L’IA agentique est un prétexte pour cibler les clients qui souhaiteraient compléter leur déploiement de Service Cloud avec des briques de support IT.
Les métiers, eux, peuvent interagir avec un chatbot depuis Slack, Microsoft Teams, un portail interne, par email ou à travers un site Web. Évidemment, Salesforce a effectué une démonstration où Slack est le point de contact des métiers avec les services IT. Commander un équipement, demander des conseils pour résoudre un problème de réseau, mais aussi démarrer l’emboarding d’une nouvelle recrue… ces agents IA doivent couvrir des processus standards dans ce domaine. Quand les problèmes ou les demandes vont au-delà de leurs compétences, ces agents IA génèrent des tickets transmis aux équipes de support humaines. À l’inverse, ils génèrent des résumés des incidents ou des mises à jour au moment où un membre d’une équipe de support commence à résoudre le problème.
Ces équipes de support IT, elles aussi, sont aidées par des agents IA. Ceux-là rappellent les processus en place, les questions à poser et suggèrent des résolutions. Ils peuvent analyser les causes profondes. Ils génèrent par ailleurs les messages de résolution. Un algorithme Einstein est dédié au routage, à la classification et à l’assignation des incidents. Certaines tâches peuvent combiner un agent conversationnel et un flux conçu avec Flow Builder. Salesforce a donné l’exemple de la réinitialisation automatisée d’un mot de passe ou l’accès aux informations de la base de connaissances.
Certains cas d’usage peuvent donc être transverses : cibler à la fois les métiers et les clients.
Au-delà des agents IA, le géant du CRM propose une suite ITSM « développé en interne ». Une petite partie de cette solution est issue d’une acquisition, indique Kishan Chetan, vice-président exécutif et directeur général de Salesforce Service Cloud.
L’éditeur met sur pied une CMDB spécifique, ainsi qu’un graphe de connaissances. La CMDB propulse un centre de service IT se matérialisant sous la forme d’un tableau de bord. L’interface ressemble comme deux gouttes d’eau à celle servant à présenter un client dans la suite CRM. Avec la CMDB, Salesforce a concocté 200 objets personnalisables pour identifier les terminaux, les applications, les infrastructures et les services IT concernés.
Service Graph doit aider à former une vue de l’ensemble des dépendances IT. L’idée est d’aider les équipes de support IT à comprendre la cause profonde d’un incident. Les différents logiciels et services peuvent être connectés à l’aide de Data Cloud.
Et l’éditeur d’évoquer une centaine de connecteurs vers les services dont ceux de Google, Box, Okta, Qualtrics, IBM, Microsoft, Oracle NetSuite, Workday et Zoom.
Se différencier sur un marché saturé
Zendesk, ServiceNow, Atlassian,Freshworks, etc. Les compétiteurs sur le marché de l’ITSM ne manquent pas. Salesforce croit pouvoir se différencier.
« Le modèle ITSM fragmenté et obsolète est fondamentalement défaillant », affirme Muddu Sudhakar, vice-président directeur et directeur général des services informatiques et RH chez Salesforce, dans un communiqué de presse. « En développant Agentforce IT Service de manière native sur la plateforme Salesforce et Service Cloud, nous menons une révolution axée sur la conversation et les agents, grâce à des innovations technologiques et des produits qui transforment les services informatiques et RH, pour une efficacité et une réduction des coûts incroyables ». Une déclaration qu’il a reprise mot pour mot lors d’une réunion préparatoire avec les journalistes.
Son plus gros adversaire du moment, ServiceNow, a également lancé une offre agentique. Tout comme les trois autres acteurs cités plus haut. ServiceNow cherche aussi à proposer un CRM automatisé. Bill McDermott, CEO de l’entreprise et ses vice-présidents n’ont cessé de répéter que le modèle traditionnel du CRM est « défaillant ». L’annonce de Salesforce serait-elle une réponse à l’incursion de ServiceNow sur son territoire ?
Pas une première pour Salesforce
Selon Rebecca Wetteman, fondatrice du cabinet d’analystes Valoir, il y a de « fortes chances » que Salesforce était en train de bâtir des fonctionnalités ITSM bien avant ces affirmations.
« Je pense que l’ITSM est dans le viseur de Salesforce depuis un certain temps. Mais j’estime que nous allons assister à une concurrence beaucoup plus agressive entre les deux acteurs ».
Rebecca WettemanFondatrice du cabinet d’analystes Valoir
« Je ne pense pas que Marc [Benioff, PDG de Salesforce] ait entendu Bill McDermott dire “Le CRM ne fonctionne plus” et répondu “Oh, je vais m’en prendre à toi maintenant” », déclare-t-elle. « Je pense que l’ITSM est dans le viseur de Salesforce depuis un certain temps. Mais j’estime que nous allons assister à une concurrence beaucoup plus agressive entre les deux acteurs ».
De fait, chez Salesforce, une solution met deux à trois ans avant d’entrer en disponibilité générale. Le lancement de l’offre au mois d’octobre suggère que l’éditeur avait déjà lancé des services par le passé.
Et c’est le cas. Mais c’est l’une des premières fois qu’il le fait seul. L’IT Service Center a été présenté en 2020, codéveloppé avec Tanium et lancé en 2021. Il faisait partie du volet RH de Service Cloud, Work.com. En 2010, avec BMC, le géant du CRM avait lancé RemedyForce, une suite ITSM basée sur BMC Helix, mais propulsée par la plateforme CRM. La fin du support pour RemedyForce est annoncée pour le mois de septembre 2026. Salesforce ne propose plus la souscription à ce service depuis février 2016. En outre, l’éditeur a poussé un temps la solution de Samanage sur AppExchange, une startup dans laquelle il avait investi avant qu’elle soit rachetée par SolarWinds en 2019.
Mais Salesforce ira-t-il chasser les comptes sur les terres de ServiceNow ? Pas forcément dans l’immédiat. « Nous avons déjà fort à faire avec les dizaines de milliers de clients de Service Cloud », a affirmé Kishan Chetan, lors du briefing presse. Le géant du CRM mise depuis plusieurs années sur une stratégie « land and expand ». Une approche qui lui a plutôt réussi.
Au deuxième trimestre fiscal 2026 terminé le 31 juillet 2025, les revenus des souscriptions et du support liés à Service Cloud représentaient 2,5 milliards de dollars, en croissance annuelle de 8 %. Cela représente un peu moins de 25 % (24,51 %) des 10,2 milliards de dollars de chiffre d’affaires engrangé durant cette période.
Cela ne veut pas dire que Salesforce ne tentera pas de convaincre les clients de ServiceNow d’adopter sa solution. Ces mouvements seront, de ce que LeMagIT comprend des dires des porte-parole de Salesforce, plus opportunistes.
Dans le camp opposé, ServiceNow affirme que la composante CRM est présente dans 17 des 20 plus gros accords signés au deuxième trimestre fiscal 2025. Il a davantage axé sa stratégie sur la résolution de problèmes, en lien avec les centres de contact, et la réalisation de devis (CPQ). Une part du gâteau du CRM qui n’inclut pas forcément le suivi des prospects.
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