Oracle va devoir se mettre au réseau

Oracle pousse son Cloud. Mais qui dit Cloud dit également réseau. Un point qu’Oracle n’a pas encore pris à bras le corps et qui freinerait les migrations. C’est ce qui ressort des retours des clients de Digora, l’ESN spécialiste d’Oracle, présents à l’OpenWorld 2016.

L’OpenWorld 2016, la grand-messe d’Oracle qui s’est tenue en septembre à San Francisco, a été 100% Cloud. L’éditeur s’est véritablement mis en ordre de bataille pour réaliser sa transition et pousser ses offres « as a service ».

Oui mais voilà, les clients – même s’ils sont réceptifs aux arguments de simplicité et de paiement à l’usage – regardent aussi de près la dimension pratique d’une telle évolution.

Le Cloud d’Oracle séduit

Présent à San Francisco, Digora a accompagné sur place une quinzaine d’entreprises françaises. « Le sujet [du Cloud] a beaucoup muri chez Oracle », confirme Gilles Knoery, Directeur Général de l’ESN alsacienne.

Le Cloud public d’Oracle, complété et augmenté, a visiblement été bien perçu par les clients. D’une part parce que le Cloud est devenu mature (« beaucoup d’entreprises utilisent déjà AWS et ça se passe bien »), même si cette maturité est évidemment à nuancer en fonction des types d’entreprises et des projets (les projets critiques tendent à rester en interne).

D’autre part parce que « Oracle a des moyens de persuasions pour les pousser. Et [son cloud public] devient vraiment utilisable. La couverture fonctionnelle des modules SaaS est beaucoup plus vaste que AWS. Donc oui, les clients traditionnels d’Oracle vont assez facilement et forcément y aller ».

Quant au Cloud privé (ou hybride), là encore Oracle semble avoir visé juste. Pour Gilles Knoery, « les clients se montrent très intéressés par Cloud@Customer » - l’appliance managée qui permet d’installer un Cloud Oracle dans un datacenter, derrière le pare-feu d’une entreprise. Les banques réfléchiraient beaucoup à cette option.

Le réseau…

Ceci étant, les responsables IT constatent aussi que migrer vers le Cloud n’est pas une chose aussi facile que présentée par Oracle. « Les directions générales captent le discours ambiant, elles demandent à ce que ce soit mis en œuvre. Mais du côté IT, c’est un peu plus compliqué », analyse Gilles Knoery.

Une célèbre entreprise de prêt-à-porter est venue témoigner de son expérience à San Francisco. Le point clef qui ressort de son intervention est bien connu des SI traditionnels : le réseau. Encore et toujours.

« L’accès au Cloud Public par Internet c'est bien, mais il faut réfléchir plus loin. Par exemple est-ce que je mets mon infrastructure en France (or Oracle n’est pas présent en France) ? Et la plupart des clients utilisent d'autres Cloud comme AWS ou Azure. Donc comment gérer le multi-cloud ? Tous les fournisseurs n’ont pas les mêmes pré-requis d'accès », résume le DG.

… encore le réseau…

Le Cloud – dont le SaaS et le DBaaS – n’affranchissent donc pas totalement des contraintes d’infrastructure. Bien au contraire. Des acteurs comme Microsoft en ont bien conscience. L’éditeur de Dynamics Online (désormais Dynamics 365) a passé depuis plusieurs années des accords avec des opérateurs Telecom un peu partout dans le monde (comme Orange) pour proposer à ses clients des VPN ou pour tirer des lignes dédiées vers ses datacenters. Une manière de proposer une vraie offre de bout en bout pour son SaaS.

Chez Oracle, il existe bien une offre (Fast Connect) pour « palier la nature imprévisible d’Internet » explique Oracle. Mais « l’outil est facturé entre 4.000 et 40.000 dollars par mois en fonction du débit souhaité», prévient Digora. Un prix qui n’est pas indolore.

Par ailleurs, regrette le partenaire de l’éditeur, « Oracle n’a pas assez la culture infra, réseau, sécurité. Il n’y a pas encore grand monde chez Oracle pour parler de réseau ».

Et contrairement à un Microsoft ou à un AWS, Oracle n’a pas – ou pas encore – vraiment pris ce problème à bras le corps.

« Historiquement, Oracle vendait des licences de bases de données et d’ERP, et à ma connaissance ils n’ont pas encore franchi le pas des accords avec les opérateurs français de Datacenters ou de réseaux ». Une situation qui ne pourra pas durer éternellement. En clair, Oracle va devoir se mettre au réseau et renforcer sa présence en Europe et en France.

… toujours le réseau

D’autant plus que pour le DG de Digora, « l’externalisation est en cours ». Les entreprises ont compris l’intérêt de « mettre leurs infrastructures chez AWS ou sur Azure ». Ou chez Oracle donc. Même si, quand l’ESN a posé la question à trois acteurs significatifs  de la Silicon Valley (LinkedIn, Docker et Zendesk - qui ont tous une infrastructure totalement Cloud), la réponse est la même : « Oracle ? Pour l'instant, on ne les voit pas dans le IaaS.».

L’intérêt est là. Les projets de migration sont dans les starting-blocks. Mais Gilles Knoery insiste. Ce qui ressort de cet OpenWorld 2016 et des retours du terrain, ce sont deux choses.

La première, c’est qu’avant de migrer Oracle DB sur le PaaS ou de passer d’un PeopleSoft ou d’un JD Edwards à un Cloud ERP dans l’Oracle Cloud, « il faut d'abord mettre au carré son réseau ».

La deuxième c’est qu’au final « les clients avaient la banane » (sic). Oracle a su adapter son discours et accompagner les DSI vers une optique un peu moins technique et plus axée transformation. « On leur a parlé de choses intéressantes. On ne parle plus seulement d'extrêmes performances ou d'Exadata, mais aussi de services ». Même si, donc, l’infra n’est jamais bien loin.

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