Plateforme d’engagement client : Twilio mise beaucoup sur les API

La nouvelle plateforme d’engagement client de Twilio fusionne les services de messagerie de l’éditeur avec la CDP développée à l’origine par Segment.

Les développeurs qui utilisent Twilio pour la messagerie, la gestion des données clients et les communications ont eu un premier aperçu de la plateforme d’engagement client Twilio Engage. La Customer Data Platform (CDP) est enfin en disponibilité générale, comme l’a indiqué l’éditeur lors de sa conférence annuelle Signal.

La plateforme extrait les données en provenance des différents canaux de communications avec les clients et des outils internes des entreprises, tels les CRM. Twilio utilise un modèle graphe pour combiner les données et former – idéalement – des profils uniques.

La CDP est connectée aux différents canaux de marketing et de service client. Après avoir créé un profil unifié des consommateurs d’un service ou d’un produit à partir de leurs données, il est possible de bâtir des expériences et des campagnes publicitaires personnalisées « en temps réel ».

Ainsi, la plateforme modulaire (plus de 400 intégrations possibles) dispose d’une fonction d’ETL et de streaming pour envoyer les données en provenance des sites Web et des applications mobiles vers les outils d’analyse, de gestion de campagnes publicitaires, de ticketing ou encore les entrepôts de données tels Google BigQuery ou Amazon Redshift.

Mais Twilio Engage introduit aussi un outil de création de campagnes d’email et de SMS – via les services de messagerie de l’éditeur –, en sus d’un gestionnaire des abonnements client.

Les utilisateurs de la CDP ont également accès à différents outils pour superviser ces projets marketing en simultanée, analyser les taux de conversion après coup, ou encore « réactiver » les membres d’une audience restés trop longtemps insensibles aux messages d’une marque.

Fruit d’un travail de près de deux ans et précédemment présentée comme une plateforme d’automatisation du marketing, Engage est née de l’acquisition de Segment par Twilio à la fin de 2020 pour 3,2 milliards de dollars.

Selon une enquête de Gartner menée auprès de 405 spécialistes du marketing au début de l’année, 60 % d’entre eux préfèrent une suite intégrée d’applications CX fournie par des éditeurs tels que Salesforce. Twilio s’adresse aux 40 % restants, ceux qui veulent construire des outils personnalisés en s’appuyant sur les API de messagerie. Ceux qui souhaitent communiquer à travers les applications les plus populaires et qui veulent également essayer les canaux émergents.

Segment a construit une plateforme censée être conviviale pour les développeurs. Une caractéristique qui a initialement attiré l’attention de Twilio et qui a justifié ce rachat. Selon Kathryn Murphy, vice-présidente de Twilio en charge des produits, des données et de la croissance, les entreprises veulent personnaliser leurs expériences client. Une demande à laquelle des plateformes « moins conviviales » n’arriveraient pas à répondre.

Si les termes « composable » et « headless » ne font peut-être pas partie du vocabulaire du marketeur moyen, c’est pourtant ce que beaucoup d’entre eux recherchent, avance la vice-présidente.

« Ils n’utilisent pas encore tout à fait ces mots, [mais] c’est un peu ce qu’ils décrivent », affirme-t-elle. « Par exemple, un spécialiste du marketing dira des choses comme : “J’ai besoin de parcours de réengagement du client qui traversent les canaux et les médias payants”. Il ne dira jamais : “Ce dont j’ai besoin, c’est d’un système headless, ou d’un système ouvert qui me permette de connecter tous ces autres systèmes et canaux ».

Les données clients deviennent précieuses

Les entreprises qui cherchent à construire des expériences telles que des produits pourraient trouver cette approche plus difficile à exécuter avec une pile de solutions intégrées, déclare Ben Bloom, analyste vice-président chez Gartner.

En effet, l’orchestration des parcours peut souvent poser des problèmes techniques épineux. Les clients qui ont besoin d’une plus grande flexibilité pour construire leurs expériences numériques pourraient voir en Engage une alternative intéressante.

« Comme il devient de plus en plus difficile de persuader les clients de se séparer de leurs précieuses données first-party, je pense qu’il est tout à fait raisonnable que les entreprises cherchent à créer davantage d’expériences de type produit, plutôt que de simplement publier du contenu », avance Ben Bloom. « Cela pourrait inciter à envisager l’intégration d’une technologie davantage axée sur les développeurs dans la pile des technologies marketing ».

Capture d'écran Twilio Engage.
Twilio Engage gère les données des clients et les permissions et les envoie vers des outils tiers

Les Customer Data Platorm, qui étaient principalement l’apanage des spécialistes du marketing au cours de la dernière décennie, se sont étendus à d’autres domaines de l’expérience client, comme le centre de contact. Salesforce, avec la présentation de Genie en septembre, a consacré une grande partie de son événement Dreamforce 2022 pour promouvoir la généralisation de sa CDP au marketing, au service clientèle, aux ventes, à l’e-commerce, et même à Tableau et MuleSoft.

Les outils de Twilio séduiront spontanément les clients potentiels du secteur de la vente au détail, ainsi que les clients existants qui utilisent de nombreux canaux de messagerie différents et, par extension, les API de Twilio pour gérer cette messagerie, affirme Daniel Newman, partenaire fondateur et analyste principal chez Futurum Research. Comme de plus en plus d’entreprises réalisent la puissance de la connexion de toutes leurs données, les éditeurs devront rivaliser sur le traitement des données et les intégrations avec les fournisseurs cloud.

« Les données d’une entreprise – données ERP, données de la chaîne d’approvisionnement, celles des ressources humaines, données sur vos ressources, celles de la gestion de projet – sont toutes interdépendantes », assure Daniel Newman. « Le précepte selon lequel les données sont un avantage pour l’entreprise ne cesse de s’étendre. Salesforce le fait maintenant de manière holistique au niveau du client. Et vous pouvez zoomer encore plus loin avec les Oracle et les SAP qui le font au niveau de l’entreprise. Et je ne vois pas de raison pour que cela change ».

Twilio Flex se connecte avec Google Contact Center AI

En sus de la disponibilité générale d’Engage, Twilio a présenté des améliorations pour ces solutions Flex et Voice.

Les utilisateurs de Twilio Flex et Voice, les outils de la plateforme ouverte de centre de contact de la société, peuvent désormais intégrer plus facilement des chatbots et des outils de réponse vocale interactive (RVI) avec Google AI. La société a lancé une intégration de Twilio Voice et Google Dialogflow CX en version bêta publique, qui permet d’automatiser les serveurs vocaux interactifs.

Les utilisateurs de Twilio Flex peuvent également intégrer Google Contact Center AI et Dialogflow CX avec un nouveau connecteur via Sabio, partenaire de Twilio. Celui-ci permet d’utiliser à la fois des agents virtuels et des outils d’assistance aux agents en direct.

 Le climat économique actuel, notamment une récession potentielle, stimule le besoin d’automatisation et de libre-service, assure Simonetta Turek, directrice générale de Twilio Flex.

« La situation économique met davantage l’accent sur l’efficience et l’efficacité – des domaines d’intérêt traditionnels pour le centre de contact, [mais encore plus] pour les clients Flex en particulier, car une grande partie du parcours du client [se situe] au-delà du support après-vente », affirme Simonetta Turek. « Ils servent aussi le cycle de vente... [et] cette infusion de personnalisation des données et d’intelligence est très importante ».

Justement, Twilio est impacté par la crise en cours. Au premier coup d’œil, ses résultats du troisième trimestre fiscal 2022 présentés le 3 novembre semblent bons. L’éditeur a généré un chiffre d’affaires de 938 millions de dollars, en hausse de 33 % par rapport à la même période l’année dernière. À y regarder de plus près, l’éditeur affiche des pertes nettes atteignant 482 millions de dollars. Il a annoncé une vague de licenciement prévue au cours du quatrième trimestre. Elle concerne 816 de ses 8 992 employés référencés au 30 septembre dernier.

Twilio a effectué des prévisions pour le quatrième trimestre, mais ne l’a pas fait pour l’année suivante. La sanction se fait déjà sentir : le cours de son action au New York Stock Exchange est passé de 65,36 dollars à la clôture le 3 novembre à moins de 45 dollars à 9 h 39 heure locale le 4 novembre. Si cette baisse se confirme, le cours de l’action Twilio se rapprochera des niveaux enregistrés en 2018.

« Comme beaucoup d’entreprises, nous sommes confrontés à des vents contraires à court terme », commente Jeff Lawson, PDG et cofondateur de Twilio. « Mais l’opportunité à long terme reste forte, car les entreprises continuent de développer leurs stratégies d’engagement client, deviennent plus efficaces et visent à établir des relations meilleures et plus personnalisées avec leurs clients ».

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