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2020 restera-t-il comme l’an 1 du cloud souverain pour l’Europe ?

L’année 2020 est le point de départ de GAIA-X, projet pan-européen sponsorisé par les gouvernements allemands et français. Les acteurs locaux du numérique s’efforcent de convaincre les entreprises... et eux-mêmes.

Cette année 2020 aura été marquée par le lancement de GAIA-X, une nouvelle tentative de cloud souverain européen, pour permettre aux entreprises locales d’échapper à la mainmise des lois américaines sur leurs données.

Résumons : grâce aux lois Patriot-Act/Cloud-Act, les États-Unis donnent le droit à leur justice de perquisitionner n’importe quelles données de n’importe quelle entreprise dans le monde à partir du moment où celles-ci sont stockées sur les équipements d’un acteur de droit américain. Et quand bien même ces équipements seraient installés en Europe, dans les locaux d’une filiale européenne.

À la base, le Patriot-Act sonnait comme une légitime prise de moyens des services de contre-espionnage américains dans leur lutte contre le terrorisme. Mais ce n’est plus ce qu’est le Cloud-Act. Le Cloud-Act, lui, donne le droit à une société américaine privée d’aller fouiner dans les listes de clients, dans les propositions commerciales, dans les comptes financiers, dans les secrets industriels de ses concurrents européens. Il suffit juste d’un prétexte qui implique de près ou de loin un bien américain. Par exemple, argumenter auprès d’une cour de justice américaine qu’on suspecte le concurrent européen d’avoir verser des pots-de-vin en dollars, ou alors en euros mais en utilisant un iPhone. Peut-être que ce n’est pas le cas, mais les américains auront récupéré toutes les données confidentielles pour le vérifier. Et au nom de l’efficacité de l’investigation, la victime n’est pas forcément mise au courant que l’on a dévalisé son patrimoine numérique.

Le problème, évidemment, est que les entreprises du monde entier vident en ce moment leurs datacenters pour déménager leurs données en Cloud. C’est-à-dire sur les machines de prestataires qui ne leur facturent plus qu’un usage mensuel, à un coût bien plus intéressant que celui de serveurs à maintenir soi-même. Or, les grands acteurs du cloud - Amazon AWS, Microsoft Azure, Google GCP et, dans une moindre mesure, Oracle – sont tous américains. Donc le Cloud-Act s’applique.

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AWS persiste : le CLOUD Act ne serait pas (vraiment) un problème

Lors de son Summit EMEA, AWS a une nouvelle fois tenté de déminer la loi américaine face aux arguments des acteurs européens, et évoque le chiffrement ainsi que la gestion des clefs par le client pour mettre fin au débat.

Droit américain et cloud computing : « Nous sommes extrêmement naïfs » (Outscale)

Des « Serious Crimes » pas si « Serious ». Un droit pénal instrumentalisé comme une arme dans une guerre économique mondiale. Une donnée devenue un patrimoine critique. Les décideurs français n’auraient pas tous pris conscience du contexte de leurs achats IT.

Accord Oracle – TikTok : avertissement et source d’inspiration pour l’Europe de l’IT

Le feu vert est donné. Les informations des utilisateurs américains de l’application d’origine chinoise seront bien hébergées par Oracle. Au-delà de cette affaire de IaaS, l’accord suscite des réactions en Europe sur la question de la souveraineté.

GAIA-X, une arme européenne contre le Cloud-Act ?

Après des années de déni, les pouvoirs publics européen ont finalement réagi : en juin 2020, les responsables politiques allemands et français sonnaient le point de départ du projet GAIA-X. Derrière ce nom qui résonne comme l’arme ultime dans un space opera, il y a une association privée d’acteurs locaux du numérique, fédérés autour d’un sponsoring étatique, qui réunissent leurs offres dans un annuaire commun de services.

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GAIA-X : le SeLoger.com du cloud européen

Le projet GAIA-X veut contrer la domination des clouds américains et chinois en Europe. Mais comment ? Servane Augier, de 3DS OUTSCALE, explique très concrètement ce qu’il est aujourd’hui. Et ses évolutions techniques à venir.

GAIA-X : pourquoi le politique soutient un projet privé

Bien qu’il soit privé, GAIA-X a été annoncé par deux ministres, français et allemand. Outscale, membre fondateur du projet, explique que les institutions publiques ont bien vu ce qu’elles avaient à y gagner en termes d’indépendance technologique.

L’initiative européenne GAIA-X se concrétise

Devenue association à but non lucratif, GAIA-X voit ses statuts renforcés et des initiatives sont d’ores et déjà en préparation.

Cloud souverain : prêt à décoller, GAIA-X attire tous les regards

L’initiative de métacloud européen prend de l’ampleur. Son premier sommet, le GAIA-X Summit, a été l’occasion de laisser entrevoir les futurs cas d’usage.

Les espaces de données au cœur de GAIA X

Le projet de métacloud européen suppose la mise en place d’espaces de données sécurisés, par secteur d’activité, afin de favoriser une collaboration en toute confiance.

GAIA-X : Cedric O anticipe des « oppositions » et confie le Hub français au Cigref

Chaque État de l’UE a été invité à créer un hub pour coordonner les démarches locales autour de GAIA-X. En France, le secrétaire d’État en charge du numérique a confié cette tâche au Cigref. Il souligne au passage les oppositions que pourrait rencontrer ce projet européen ambitieux.

Convaincre de l’utilité d’un cloud souverain... 

L’ambition première de GAIA-X est de faire comprendre aux entreprises européennes que des hébergeurs de cloud public comme OVH, Outscale ou même Scaleway sont tout autant compétents que les américains. OVH et Outscale sont des fournisseurs d’infrastructures informatiques à la demande, ou IaaS, comme AWS, Azure et GCP. Les industriels, les pouvoirs publics, les banques et toutes les entreprises soumises à des réglementations sur le secret des données devraient à terme être convaincues du bien-fondé d’un IaaS local, notamment par les grandes ESN qui les accompagnent et qui rédigent pour elles les contrats.

Mais au-delà de l’infrastructure, il y a surtout les applications SaaS, celles qui s’exécutent depuis le web pour les utilisateurs et depuis une infrastructure IaaS pour leurs éditeurs. GAIA-X a tout autant vocation à promouvoir des applications SaaS européennes qu’à convaincre les éditeurs de ces applications SaaS de s’installer sur un service d’IaaS local.

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OVHcloud en route pour devenir l’alternative européenne à AWS

Le fournisseur français se donne à présent les moyens de rivaliser avec les géants du cloud américains : à ses arguments de souveraineté s’ajoutent des infrastructures de pointe et moins chères.

Cloud souverain : l’alliance Capgemini-OVH s’implante à l’Agence de Service des Paiements

Depuis deux ans, Capgmini et OVHcloud collaborent avec une certaine discrétion autour d’offres souveraines communes qui ont remporté « quelques contrats » publics. Cette année, c’est l’agence en charge du paiement des aides de la PAC qui les a choisis.

OVH ouvre son supermarché d’applications souveraines

« OVHCloud Marketplace » liste des solutions B2B qui utilisent les services d’infrastructure du cloud nordiste. Encore en bêta, cette vitrine propose déjà de belles références de l’IT français.

Suite bureautique : OnlyOffice débarque sur OVH pour sa première version vraiment souveraine

La suite open source OnlyOffice vient d’intégrer la marketplace d’applications SaaS d’OVH, lancée cet été. En s’appuyant sur l’infrastructure du Français, l’éditeur letton propose sa première offre cloud « souveraine », 100 % européenne, concurrente de Microsoft Office et de G Suite.

Les services de chiffrement des fournisseurs cloud français

Après avoir fait le tour des services de chiffrement KMS et HSM des fournisseurs cloud américains, voici ce que proposent les acteurs français 3DS Outscale et Orange Business Services. OVHcloud, lui, fait bande à part.

Alternatives françaises et sécurisées de visioconférence : Jamespot

L’application de l’éditeur français Jamespot est une alternative de visioconférence motorisée par le framework open source Jitsi (qui repose sur WebRTC) et par l’infrastructure ultra-sécurisée d’Outscale (le IaaS de Dassault Systèmes).

Comment faire sa e-boutique ? Alternatives françaises ou open source

Les outils pour monter une e-boutique ne manquent pas. Y compris dans l’écosystème local où les options à taille humaine n’ont pas à rougir des offres des géants mondiaux.

Référentiels pour consommer « une IT locale » (1/3) : Play France Digital

Cartographies, classements, pages membres d’associations professionnelles, moteurs de recherche à la GAIA-X, les sources d’informations pour trouver des outils européens, ou souverains, se multiplient. Première partie d’un dossier sur les référentiels d’achats d’outils « locaux ».

Le Comité Stratégique de Filière concocte une cartographie des acteurs IT locaux (2/3)

Les sources d’informations pour trouver des outils européens, ou souverains se multiplient. L’État travaille même depuis peu avec le secteur sur un référentiel commun. Deuxième partie de ce dossier sur « l’IT locale ».

Référentiels de « solutions IT locales » (3/3) : des sources précieuses, mais éparpillées

Cartographies, classements, pages membres d’associations professionnelles, moteur de recherche à la GAIA-X : les sources d’informations pour trouver des outils européens, ou souverains, foisonnent. Au risque de perdre le DSI ?

Un enjeu particulièrement difficile

Or, c’est sur le deuxième point – l’embarquement dans les infrastructures européennes des acteurs locaux du logiciel - que les choses se compliquent. D’une part, SAP, la locomotive des éditeurs européens, prévient qu’héberger les applications dans un cloud européen coûte plus cher que chez les américains. Selon Frédéric Chauviré, le DG de SAP en France, les entreprises françaises seraient de toute façon bien plus attirées par l’aura internationale des « hyperscalers », c’est-à-dire AWS, Azure et GCP.

D’autre part, ces fameux hyperscalers américains ont, contre toute attente, rejoint eux aussi GAIA-X, au prétexte qu’ils seraient mieux équipés pour héberger des applications et des services européens.

La question, à présent, est de savoir si GAIA-X ne va pas, en définitive, servir qu’aux grandes ESN locales, qui mettront en valeur les contrats européens qu’elles peuvent rédiger autour des offres de cloud américains.

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ERP Cloud : les grands groupes veulent aller chez les hyperscalers (SAP France)

Alors que le cloud séduirait les entreprises françaises, SAP explique qu’il n’a – pour l’instant – aucune demande de ses clients locaux pour migrer vers des infrastructures alternatives aux géants du cloud ni pour se mettre à l’abri du CLOUD Act. Un constat qui tranche avec les positions de l’USF et du Cigref.

GAIA-X : les Américains participent aux groupes de travail

Loin de snober l’initiative de cloud européen dont un des buts est pourtant de leur créer une alternative commerciale crédible, les éditeurs américains collaborent déjà au projet. Outscale, membre fondateur de GAIA-X, explique pourquoi.

Atos ouvre « Atos OneCloud », son nouveau guichet unique pour ses services cloud

L’offre OneCloud centralise tous les services cloud de l’ESN, qui vont du conseil à l’orchestration, en passant par la feuille de route de migration ou le Green IT. Atos la veut technologiquement agnostique et personnalisée par secteur et industrie.

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